Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le jour des reines

Le jour des reines

Titel: Le jour des reines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
Vom Netzwerk:
porcs prêts à saigner !
    — Des porcs, soit, Étienne, dit Guillaume. Mais des porcs-épics de France ! Par saint Michel ou la Très Sainte-Trinité, pique-le et qu’il en crève !
    Ogier ne répondit pas. Il observait Cobham, maintenant. Sans détestation ni hautaineté, à l’inverse de l’Anglais qui contenait tant de haine entre ses cils qu’il semblait verser un pleur. C’était un homme de taille moyenne, bien pris dans une armure solide dont la cubitière senestre s’ornait d’un long volet d’yraigne rouge. Son visage au teint bis, humide et blafard – comme si le fiel qui infusait sous sa peau, mêlé à sa sueur, suintait par ses pores –, se recommandait d’autant plus à l’attention d’Ogier qu’un sourire moqueur en éclairait le bas. Point de barbe, de moustache : une chair dure, sans la moindre cicatrice.
    — Tu dois le vaincre ! Tu dois l’occire !
    — Le vaincre, oui, Étienne, approuva Ogier. Quant à l’occire, eh bien, il devra m’y contraindre.
    — Tu es fou !
    — Je le préférerais vivant et vergogneux parce que je l’aurai dominé, que mort et dépourvu de toute inquiétude.
    Une santé puissante coulait dans les membres de cet Anglais : la même qu’à Sangatte. « Et moi, Ogier ? » À l’inverse de ce qu’il avait éprouvé tout au long de leur affrontement inégal, il se sentait les bras solides, la poitrine ample, les jambes sûres. Il perçut que cette haine dont il était l’objet entrait profondément en lui, et s’en trouva vivifié. La vengeance allait commencer, mais à égalité, cette fois : acier contre acier, fer contre fer, muscles contre muscles, habileté contre habileté.
    Et quelles que fussent les conditions de cette bataille dans laquelle Cobham avait l’avantage des chapitres, lui, Ogier, y accomplirait des merveilles.
    Le héraut, contrairement aux deux autres, avait porté son parchemin ployé en quatre sur son cœur. Il le déplia. D’un coup de paupière, Cobham lui signifia de commencer. D’une voix solide qui se dénaturait parfois lorsqu’il reprenait haleine, Burgibus proclama :
    —  Au nom de Dieu et de la benoîte Vierge Marie, de saint Michel et de saint Georges, je Renaud de Cobham pour mon nom exhausser, sachant certainement les prouesses de Chevalerie de France, ai, au jour de la date de ces présentes, pris un tronçon de grève [282] à porter à ma jambe jusqu’à temps qu’un chevalier dudit royaume de France m’aura délivré à faire armes qui s’ensuivent… Premièrement, d’entrer en place à pied et d’être armé chacun ainsi que bon lui semblera, et d’avoir chacun sa dague et son épée sur son corps, en quelque lieu qu’il lui plaira, ayant chacun une hache dont je baillerai la longueur.
    —  Holà ! s’exclama Guillaume. Il n’a ni dague ni hache…
    — N’interrompez point le héraut ! hurla le maréchal de lice. Argouges disposera des armes qui lui manquent !… Poursuivez, messire Prescott.
    Le héraut s’inclina.
    —  Et sera le nombre de coups de tous les bâtons et armes ensuivant : c’est assavoir : de la hache, dix coups sans reprendre. Et quand ces dix coups seront parfaits et que le juge dira : Ho ! nous férirons dix coups d’épée sans reprendre ni partier l’un de l’autre, et sans changer de harnois. Et quand le juge aura dit Ho ! nous viendrons aux dagues et férirons dix coups sur main. Et si aucun de nous perdait ou laissait choir un de ses bâtons, l’autre pourra faire son plaisir du bâton qu’il tiendra jusqu’à ce que le juge ait dit Ho !
    « Dix coups d’épée, c’est peu », songea Ogier.
    —  Et, les armes à pied accomplies , reprenait le héraut, nous monterons à cheval ; et sera armé du corps chacun ainsi qu’il lui plaira, et aura deux chapeaux de fer paraux, lesquels je livrerai ; et choisira mon dit compagnon lequel qui lui plaira des deux chapeaux ; et aura chacun tel gorgerin qui lui plaira, et avec ce, je baillerai deux selles dont mon dit compagnon aura le choix. Et outre plus, nous aurons deux lances d’une longueur ; desquelles lances nous férirons vingt coups sans reprendre, à cheval, sur main ; et pourrons férir par devant et par derrière, depuis le faux du corps [283] en amont. Et icelles armes de lances faites et accomplies, ferons les armes qui s’ensuivent : c’est assavoir, s’il advenait que l’un ou l’autre ne fût blessé, nous serons tenus après, en icelle journée même,

Weitere Kostenlose Bücher