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Le kabbaliste de Prague

Le kabbaliste de Prague

Titel: Le kabbaliste de Prague Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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Droite, rien d’autre nous ne connaissons. Celle que tu
maltraites est la chair de la Droite. Abandonne-la ! Abandonne-la, ou je
vais t’entendre brûler sous la paume du Saint-béni-soit-Il !
    Éva se dressa d’un coup. Ses mains se plaquèrent aux murs
tandis qu’un gémissement d’animal sortait de sa poitrine. Un instant, ce fut
comme si elle allait se jeter sur nous. Bachrach aussi bien que moi reculâmes.
Puis les paupières d’Éva se refermèrent, effaçant son regard halluciné comme
une eau glacée éteint des braises.
    Ses poings se joignirent sur sa poitrine tandis qu’elle
ployait le buste. Elle bascula sur la couche si brutalement qu’on crut qu’elle
ne respirait plus. On se précipita. Bachrach la retourna, posa la main sur son
sein, pressa sa joue contre ses lèvres.
    Il se redressa, murmura :
    — Elle respire.
    Il me tendit la menorah pour prendre un linge et essuyer le
visage de son épouse. Je me reculai pour qu’il puisse la glisser sous les draps
et la recouvrir.
    Le vrai visage d’Eva était revenu. C’était tout à fait
stupéfiant. La bouche, les tempes, les joues, toute sa face avait repris sa
beauté innocente. Les cernes avaient disparu sous ses paupières un peu
gonflées, comme après des larmes.
    Bachrach me dévisagea. Je compris à son expression que
c’était moi, maintenant, qui devais avoir une drôle de face. Il me tendit le
linge pour que j’essuie ma sueur glacée. Mes mains tremblaient.
    Il me demanda :
    — Qu’est-ce qu’il disait ? Quelle est cette
langue avec laquelle il parlait ?
    — La langue du Zohar. La langue du Livre de la
Splendeur. Il ne peut pas faire un plus grand affront.
    — Et pour dire quoi ?
    Je ricanai.
    — Pour avouer qui il est et d’où il vient. Une puanteur
d’émanation de Gauche.
    — De Gauche ? Je ne comprends pas.
    J’hésitai, puis songeai que Bachrach avait mérité le droit
de savoir.
    — L’émanation de Gauche, c’est ainsi que se nomme le
monde du Mal, dans le savoir de la Kabbale. Le rabbi Moïse de Burgos a
dit : « L’émanation de Gauche est un monde complet. C’est le monde
qui tourne le dos au Bien qui réside dans la Droite. Car le Nom, béni soit-il,
a fait ceci et cela. Il a fait en sorte qu’on Le craigne : Il a fait
l’obscurité dans la lumière, et la durée qui détruit dans celle qui engendre.
Mais tenez-vous sur vos gardes : l’émanation de Gauche est la poigne de la
punition et le Mal veut en faire sa puissance pour éteindre le devenir. »
    Bachrach me considérait à présent avec effroi. Devant nous
Éva eut un soupir. Sans ouvrir les paupières, elle se tourna, se détendit comme
si ses muscles contractés enfin se relâchaient. Je crus qu’elle allait se
réveiller, mais non. Sa bouche s’amollit, son sommeil s’appesantit.
    Je rendis la menorah à Bachrach avant de reculer pour
rejoindre ma chambre. Avant d’atteindre le seuil, je lui dis encore :
    — Aller à Droite, c’est aller à Prague. À Gauche, cela
signifie revenir sur nos pas et céder à la peur. Le dibbouq n’aime pas que nous
emmenions Éva auprès de son grand-père. C’est bon signe. À l’approche du
MaHaRaL, il sent le danger qui le guette. Néanmoins, peut-être serait-il
prudent, si cela est possible, d’y aller d’une traite. Sans plus s’arrêter la
nuit dans des auberges. Il vaut mieux qu’Éva veille pendant deux nuits, jusqu’à
l’épuisement s’il le faut, plutôt que de se faire reprendre à nouveau par le
Malin. Elle risquera moins.
     
    Le lendemain matin, une fois nos prières chuchotées,
Bachrach alla régler son dû à l’aubergiste. Je me retrouvai seul avec Éva. Elle
me prit les mains, les pressa contre ses lèvres avant de ployer le cou et de
buter du front contre ma nuque.
    — Samuel m’a raconté ce que tu as fait pour moi cette
nuit.
    — Je n’ai rien fait. C’est le MaHaRaL qui te libérera
du dibbouq.
    Son front roula contre mon épaule pour protester.
    — Tu as fait quelque chose. Je me sens plus en paix ce
matin que je ne l’ai été depuis des mois.
    J’eus la faiblesse de la croire. Ainsi que je l’ai déjà dit,
la vanité est un rapace aux ailes assez vastes pour obscurcir toute raison.
    J’ai cru Éva, et nous sommes montés en voiture le sourire
aux lèvres. Un sourire que Bachrach arborait aussi. Comme je le lui avais
suggéré la veille, il a annoncé que nous rejoignions Prague sans un arrêt pour
dormir.
    — Nous changerons de

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