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Le kabbaliste de Prague

Le kabbaliste de Prague

Titel: Le kabbaliste de Prague Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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que les Juifs sont des menteurs et des charlatans. Bientôt ceux qui
nous détestent parviendront à ranimer la vieille haine. Ils voudront prouver
leurs accusations et nous irons de nouveau vers des violences. Nous
l’emporterons, puisque Golem est invincible. Mais, par notre attitude, nous
aurons laissé mourir la paix et fait couler le sang, alors que nous avons
promis à l’Empereur que Golem serait un instrument de justice.
    L’argument ébranla le MaHaRaL.
    Le lendemain, malgré son déplaisir, dans la lueur de l’aube,
alors que nous nous rendions à la synagogue pour la première prière, nous le
trouvâmes devant Golem debout. Le MaHaRaL gardait les yeux et la bouche clos.
On l’aurait cru endormi. Pourtant, la prudence nous incita à ne pas approcher.
À dix pas, l’air de la place se faisait irritant et difficile à respirer.
    Un peu plus tard, notre Maître annonça que, désormais, à
l’exception des jours de shabbat où la ville serait fermée à tout étranger non
juif, Golem se tiendrait debout, allant et venant dans nos rues du lever au
coucher du soleil, après quoi, durant la nuit, il se montrerait comme endormi.
    Maisel demanda :
    — Peut-on lui donner des ordres ?
    — Le Saint Nom donne des ordres, répondit avec humeur
le MaHaRaL. Nous, nous prions pour savoir bien les accomplir.
    C’est ainsi que l’on s’accoutuma à voir Golem debout, immobile,
ici ou là, puis se mouvant sans but d’une rue à une autre, au risque de
renverser une carriole, de bousculer une mule, d’écorner un coin de maison.
    Pour les enfants, ce devint un jeu que de courir devant lui
afin de prévenir de son passage. On s’habitua à leurs cris qui résonnaient avec
leurs rires « Golem ! Golem ! Attention, Golem !
Golem ! »
    Comme l’avait prévu le bourgmestre, les rumeurs de mensonge
cessèrent. Les curieux affluèrent en plus grand nombre.
    Prague se transforma en un étonnant spectacle. Les visiteurs
nous parvinrent des plus lointaines côtes du sud de l’Italie, de France,
d’Angleterre ou même des rives de la mer russe. Parmi eux se trouvaient des
savants en toutes sciences, des hommes et femmes de toutes croyances.
    Tous avaient la même soif : voir Golem s’agiter,
dormir, se réveiller. Sa laideur les impressionnait, mais ils ne pouvaient
s’empêcher de l’aimer un peu.
    Quelques-uns s’enhardissaient à le frôler. D’autres se
faisaient une gloire de gratter, ici ou là sur son corps, un peu de boue en
guise de souvenir. Afin d’éloigner ces malappris, le bourgmestre Maisel désigna
des gardes qui surveillèrent les jambes de Golem lorsqu’il se tenait immobile.
    Si tous les curieux avaient ce mouvement d’effroi, cette
crainte de sa puissance et une absolue curiosité devant son énigme, Golem
déclenchait également toutes sortes de réactions. Des femmes défaillaient à
seulement le sentir, des enfants lui lançaient des lazzis cruels. On en voyait
qui pleuraient de peur et ne parvenaient jamais à le regarder. Il fallut en
éloigner d’autres qui le considéraient comme une sorte d’animal bizarre et ne
pouvaient s’empêcher de le traiter de démon et de lui lancer des pierres.
    La plupart déploraient qu’il n’eût pas de bouche pour
parler, et tous rêvaient de lui donner des ordres. Les ennemis des Juifs les
plus acharnés cherchèrent à entraîner les foules en assurant que Golem n’était
qu’une illusion malsaine, qui, bientôt, mènerait le monde vers un nouveau
chaos.
    Ici ou là commencèrent d’apparaître des harangues en ce
sens, parfois même jusque dans nos rues. Les preuves contraires, la paix, la
réalité bien massive de Golem, ne les désarmaient pas.
    Aux beaux jours du printemps, de nouvelles plaintes
résonnèrent contre Golem. Elles ne provenaient pas des étrangers mais des
habitants de nos rues et se déclarèrent au Conseil. Les déambulations
incessantes de Golem suivi de ses cohortes de badauds excédaient. Les
va-et-vient de Golem s’avéraient souvent dangereux et inutiles. Plus d’une fois
une femme ou un enfant avait manqué d’être écrasé par sa masse. Ici ou là, il
avait détruit des murettes, renversé des étals. La vérité était que, désormais,
Golem compliquait la vie de la communauté sans se montrer utile.
    Une fois encore, Maisel, qui depuis toujours s’était révélé
un homme de grandes ressources, trouva la solution.
    — Serait-il inconvenant que Golem participe aux plus
durs travaux de notre

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