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Le lit d'Aliénor

Le lit d'Aliénor

Titel: Le lit d'Aliénor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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magie dont il ignorait l’origine.
    – Viens, lui dit Jaufré. Allons chercher nos compagnons. Elle est quelque part dans une des tavernes du port. Elle nous enverra un signal.
    – Si ce que tu dis est vrai, il faut prévenir Geoffroi de Rançon. Qu’il prête l’œil au moindre détail. Hâtons-nous.
    Prenant leurs jambes à leur cou, ils se dirigèrent vers le lieu du rendez-vous.
    Je voyais leurs visages défiler dans la nuit, comme portés par le vent.
    « Presse-toi, mon amour, mais sois prudent », murmurai-je.
    Je faisais corps avec lui, et son esprit me répondait sans que les mots aient besoin de franchir ses lèvres. Je devinais où ils se trouvaient à présent et pouvais les guider. Mais comment repérer la taverne qui me dissimulait parmi les dizaines qui se côtoyaient sur le port ? Une idée me vint, qui m’obligerait cependant à briser le cercle et à perdre tout contact avec Jaufré. Tant pis. L’aube ne tarderait pas, il fallait en finir. Vite. Je laissai Jaufré et Denys atteindre Geoffroi de Rançon, Uc de Lusignan et Bertrand de Monfaucon près de la jetée, et lui soufflai une dernière fois :
    « Affirme-leur que vous avez eu des informations par une servante du basileus. Un des gardes royaux sortira d’une taverne. Entrez-y, vous y verrez une porte basse en bois dans un mur de pierre, probablement à droite du comptoir. Plusieurs sbires sont en faction dans la pièce. Vous devrez sans doute entrer en force. Les Byzantins ne vous soutiendront pas. Je vous attendrai là. Soyez prudents, mais hâtez-vous. »
    Je quittai lentement ma léthargie et repris contact avec la réalité. Rien n’avait changé dans la pièce. Les gardes derrière les tentures restaient égaux à eux-mêmes, fidèles serviteurs qui ne voyaient ni n’entendaient rien. Ils devaient me supposer endormie. Je sortis du cercle en dénouant mes jambes endolories par la transe et pris soin de rassembler en un petit tas le caviar dont je m’étais servie pour m’isoler. Il ne fallait surtout pas que le basileus puisse se douter de mes origines.
    Je fus bientôt devant l’autre issue secrète. Dans la pièce, les hommes n’avaient pas bougé. J’eus simplement l’impression que la garde avait été renforcée, certainement parce que j’avais découvert le passage. J’appelai de toutes mes forces.
    Presque aussitôt, je me trouvai face à un sbire qui pointait sur moi une épée fine et légèrement recourbée.
    – Que fais-tu là, chienne ! Retourne dans tes appartements !
    L’homme était peu commode. Je pris un air enjôleur et lui glissai en confidence :
    – C’est que je souhaiterais parler à ton maître. J’ai réfléchi à son offre et suis prête à me soumettre à son désir. Je ne sais comment l’appeler à moi. Il serait satisfait pourtant de me rejoindre. Ne pourrais-tu le faire prévenir ?
    – Va ! Retourne d’où tu viens !
    La muraille se referma sur ces dires. Je glissai un œil contre l’ouverture. L’homme lança quelques mots, qui furent aussitôt suivis d’un rire gras et collectif dont je préférai ne pas imaginer la haute portée. Puis l’un d’entre eux se leva et sortit. Nul doute qu’il s’en allait rendre compte au basileus de mes résolutions. Il me restait à espérer qu’il passerait par le port et non par quelque autre chemin secret dont cette ville semblait regorger.
     
    – Là !
    Bertrand de Monfaucon pointa un doigt en direction d’une porte qui venait de s’ouvrir.
    – Laissons-le s’éloigner, ordonna Geoffroi de Rançon.
    L’homme ne les avait pas remarqués. Lorsqu’il partit au grand galop sur les chemins pavés du port, les cinq hommes s’avancèrent à visage découvert. Comme de bons camarades, ils entrèrent dans la taverne en riant et plaisantant, essuyant les regards hostiles et quelque peu surpris des marins byzantins qui se trouvaient là. Faisant mine d’avoir déjà trop bu, ils allèrent se vautrer sur quelques divans d’où ils pouvaient embrasser d’un coup d’œil la pièce étroite et longue. Une putain au trémoussement langoureux s’avança pour leur servir du vin de cannelle. Ils la repoussèrent fermement, puis s’employèrent à vider leurs verres. Ils attendirent que les regards curieux se détournent d’eux et, au bout de quelques minutes, profitant de l’effet de surprise, bondirent de concert, l’épée au gant. En deux enjambées ils atteignirent la porte. Uc de Lusignan se campa, l’œil

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