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Le lit d'Aliénor

Le lit d'Aliénor

Titel: Le lit d'Aliénor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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cycles de la lune, ainsi que mère m’avait appris à le faire.
    Et puis il y avait Aliénor. Tant que Louis se tenait écarté d’elle, elle n’utilisait pas le philtre que je lui avais recommandé, mais pouvais-je être certaine qu’elle l’avait bu après chacune de ses unions avec Raymond ? Si elle se trouvait enceinte à présent, ce serait une catastrophe, d’autant plus que l’idée qu’elle avait semée prenait corps dans mon esprit. De retour en France, il faudrait examiner avec soin cette notion de droit canonique et s’en servir à bon escient. Ensuite, faire se rencontrer Aliénor et Henri serait un jeu d’enfant.
    Henri ! Me retournant dans mon lit, j’eus soudain la vision de ses yeux sombres et de sa tignasse flamboyante. C’était un homme à présent. Il plairait à Aliénor, j’en étais certaine. Il ne me faudrait pas longtemps pour la convaincre de troquer un royaume pour un autre, tout en préservant à ses côtés l’homme qu’elle aimait. Oui, cela semblait si facile que mon cœur se mit à bondir joyeusement dans ma poitrine. Si la mésentente de Louis et d’Aliénor se renforçait, alors je pourrais me laisser passer au doigt l’anneau du mariage et donner une fille à ma descendance et un fils à celle de Jaufré. Je caressai amoureusement mon annulaire autour duquel ne s’enroulait nul anneau et, souriant d’aise, je sombrai dans un sommeil paisible.
     
    – Vous, damoiselle ?
    Louis venait d’ouvrir la porte de sa chambre et découvrait avec une surprise non feinte Béatrice, menue et fragile, une chandelle à la main, qui, parée de ses atours de la soirée, se tenait dans l’encadrement. Tandis qu’il s’effaçait pour la laisser entrer, en prenant soin de vérifier que personne ne l’avait vue à l’exception des gardes qu’elle avait su persuader de l’importance de sa démarche, elle murmura d’une toute petite voix :
    – Il me fallait vous voir, mon roi. Vous m’avez semblé si lointain à table tantôt, goûtant à peine les plats et parlant si peu, que je m’inquiétais et vous imaginais souffrant. Mais sans doute les événements de l’après-midi sont-ils plus en cause que la nourriture trop riche, insista-t-elle en lui jetant un regard enflammé et contrit.
    A ces mots, Louis sentit monter en lui la rage qu’il avait contenue à grand-peine durant la soirée, tandis qu’il répondait à qui voulait l’entendre qu’Aliénor souffrait d’une affreuse migraine. Raymond n’avait pas été dupe mais avait joué en maître de son aplomb naturel, insistant devant tous pour qu’elle se repose avant de prendre la route puisque telle était sa décision. Louis avait bien remarqué les regards de suspicion des vassaux d’Aliénor réunis autour de ce dernier repas et il avait dû prendre sur lui pour ne rien afficher de sa mauvaise humeur. Enfin, tous avaient fait leurs bagages et les chariots étaient prêts à se mettre en branle peu avant l’aube.
    – Sire ?
    La voix de Béatrice le ramena à la réalité. Elle avait posé avec délicatesse une main chaude sur son avant-bras. Il la contempla d’un air absent, tout encore à son souvenir de la soirée, puis parut ressentir la brûlure de ses doigts et les regarda, plein de tristesse et de surprise aussi. Elle était si douce. Il lui prit la main comme on cueillerait un oiseau sur une branche. Béatrice levait vers lui ses yeux purs emplis d’amour et de plénitude. Elle s’inquiéta encore, la voix brisée par un désir qu’elle ne cherchait pas à dissimuler :
    – Voulez-vous que je vous laisse, mon roi ?
    Alors il l’attira contre lui et écrasa sur sa bouche un baiser qui l’alanguit tout entière. Nouant ses bras autour du cou de l’homme qu’elle chérissait, Béatrice se laissa soulever avec ferveur et poser sur le lit.
    – Je t’aime, murmura-t-elle, tandis que le souffle de Louis se perdait dans le sien.

7
     
     
    Jérusalem la blanche, la douce, la paisible nous accueillit telle une terre fraternelle. Louis n’avait pas desserré les dents de tout le voyage et Aliénor se garda bien de rompre ce silence douloureux. C’était désormais flagrant dans nos rangs, il n’y avait plus une armée, mais deux. Ceux du Sud et du Nord ne se mélangeaient plus. Si les Aquitains avaient accepté de mauvaise grâce d’appliquer la décision de leur duchesse, ils persistaient à considérer que le roi avait tort.
    Louis s’en fut se recueillir sur le tombeau du Christ

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