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Le lit d'Aliénor

Le lit d'Aliénor

Titel: Le lit d'Aliénor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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ces alliances et ces jeux d’adultes. Du jour où le sort a basculé, je n’ai cessé d’être à tes côtés et de faire en sorte que cela se passe le mieux possible. Mais ce que tous avaient prédit s’est réalisé. Tu n’as rien en commun avec Louis, quand tu ressembles tant à Henri. Peut-être est-il temps pour toi de désunir ce que l’on a consenti dans la traîtrise et le sang.
    – Tu voudrais que je me sépare de Louis pour épouser Henri ? C’est bien cela ?
    – Tu feras selon ton cœur. Mais sache qu’une partie de sa haine contre le roi de France vient du fait qu’il lui a ravi sa promise.
    – Il m’aimerait donc ? Mais il est si jeune !
    – Te souviens-tu de ce jour où, sous le saule pleureur à l’Ombrière, je t’avais demandé quels seraient tes sentiments si tu rencontrais quelqu’un qui aimerait et userait du pouvoir autant que toi ?
    – Je m’en souviens, oui, répondit-elle en souriant.
    Une flamme coquine éclaira son regard. L’Aliénor d’autrefois fut devant moi soudain.
    – Je t’ai répondu que sans conteste je l’aimerais, pour peu qu’il ne déserte pas ma couche au profit de la guerre… Ou de Dieu, ajouta-t-elle en souriant.
    – Henri n’a rien d’un prêtre !
    – Je le sais. Sa réputation est parvenue jusqu’ici. On prétend qu’il a déjà quatre bâtards. Quatre garçons. Loanna, crois-tu que, si je n’ai pu donner de fils à Louis, c’était pour cette raison-là, parce que des hommes avaient défait la volonté de Dieu ?
    – J’en suis sûre.
    – Mais Geoffroi le Bel est excommunié…
    – Pour une peccadille. Pour avoir mis la main par deux fois sur l’officier royal qu’est Giraud Berlai. Si ce sot n’avait pas recommencé à le narguer après que Geoffroi le Bel eut accepté de le relâcher, rien ne serait arrivé.
    – Tout de même.
    – Bernard de Clairvaux peut faire lever l’excommunication si Henri plie un genou.
    – Mais le fera-t-il ? demanda-t-elle avec une moue qui traduisait bien qu’elle en doutait fort.
    – Si cela doit être la condition pour que la promise devienne enfin l’épouse…, laissai-je tomber en clignant un œil complice.
    Elle écarquilla des yeux ronds comme des soucoupes, tandis que sa bouche s’ouvrait de même, mais aucun son n’en sortit. Dans son regard défilait en un éclair tout ce que cette perspective lui offrait de vengeance et d’agrément. Et soudain il n’y eut plus devant moi que la pucelle de l’Ombrière, à la veille d’une bonne farce soigneusement préparée. Spontanément, elle m’enlaça à me broyer et claqua une bise sonore sur ma joue.
    – Je t’aime, je t’aime, je t’aime, Loanna de Grimwald !
    – Ce n’est pas une raison pour m’étouffer, me moquai-je en riant.
    Elle desserra doucement son étreinte.
    – Je sens que nous allons bien nous amuser aux dépens de ce cher Louis, murmura sa petite voix perverse.
    – Pour l’heure, il faut prévenir Bernard de Clairvaux avant que le sang ne marque à jamais cette terre qui deviendra tienne.
    – Il va en avaler sa Bible !
    – De qui parles-tu, de Bernard ou de Louis ?
    – Peut-être bien des deux ! lança-t-elle avec un plaisir non dissimulé.
     
    Trois jours plus tard, Bernard de Clairvaux se présentait à l’abbaye de Saint-Denis pour y célébrer une messe. Ce n’était ni dans ses prérogatives, puisqu’un nouveau prieur s’occupait de l’abbaye en place de Suger, ni dans ses habitudes. Louis ne s’en offusqua point, pour la bonne raison qu’il s’apprêtait à rejoindre ses troupes, qui venaient de faire plier le comte d’Arques et s’étaient emparées de la ville sans véritable résistance. Ses hommes, augmentés de ceux d’Eustache de Blois, le fils de l’actuel roi d’Angleterre, campaient autour de l’enceinte, déployant leur puissance. Ni Geoffroi ni Henri n’avaient bronché, et Louis comptait bien réclamer son dû sur place.
    Aussi fut-ce naturellement qu’il voulut profiter de la venue de Bernard de Clairvaux pour faire bénir son départ dans cette croisade personnelle.
    Il fut reçu aussi rudement que possible. Bernard n’y alla pas par quatre chemins. Si la conduite du comte d’Anjou était inqualifiable, celle de Louis ne l’était pas moins. Ce que Suger avait réussi à unir était bafoué, violé. Ce n’était pas ainsi que devaient se régler les différends ! D’un ton sans réplique, il ordonna à Louis de s’en tenir à cette

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