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Le livre du magicien

Le livre du magicien

Titel: Le livre du magicien Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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accompagner par deux des archers de Sir Edmund. Il n’avait pas oublié la terreur éprouvée cette nuit-là quand il était caché dans les ténèbres glacées alors que l’assassin attendait le moment propice.
    Il revint dans la cour intérieure au moment où les cercueils contenant les corps des trois Français étaient bénis et encensés par le père Andrew, avant d’être placés dans une charrette pour commencer leur long voyage vers Douvres puis vers la France. Corbett ne put distinguer la bière de Crotoy, mais, regardant s’éloigner le chariot, il se signa, récita le psaume des morts et se promit de tirer vengeance du meurtrier de son vieil ami.
    Ranulf l’attendait sur les marches de sa chambre.
    — Sir Hugh, vous errez dans ce château comme une âme en peine. Sir Edmund insiste beaucoup pour que nous fassions preuve de toute la courtoisie voulue envers Craon.
    — Vraiment ?
    Corbett prit sa clef et ouvrit sa chambre. Ranulf lui emboîta le pas. Il aida son maître à se raser, puis sortit la cotte-hardie rouge, bleu et or, la chemise blanche de batiste et les chausses bleu foncé que le magistrat revêtait toujours dans les grandes occasions. Ranulf voyait bien que le vieux « Maître Longue Figure » était distrait. Il oublia de passer la chaîne symbole de son office et de prendre les anneaux de la chancellerie dans le petit coffret posé sur la table. Même quand ils furent arrivés à la salle des Anges, Corbett garda silence et réserve, et sembla à peine se rendre compte des coûteux préparatifs que le gouverneur avait faits pour le banquet : le feu ronflait dans la cheminée, sur l’estrade flacons, gobelets, plats, couteaux d’or et d’argent étincelaient sur la haute table, couverte de linges blancs comme neige. L’air était chargé d’appétissantes odeurs venant des cuisines proches. Une douce musique descendait de la galerie des musiciens et d’ardents braseros réchauffaient tous les coins où le froid se réfugiait.
    Sir Edmund et sa famille étaient vêtus d’habits somptueux. Lady Constance était superbe dans sa robe bleu foncé. Une cordelette d’or ceignait sa taille mince et un exquis voile blanc couvrait ses cheveux chatoyants. Corbett, l’esprit ailleurs, les salua et quand Craon les invita à se rassembler autour du grand feu, il se contenta d’incliner la tête et alla s’installer près du père Andrew.
    — J’ai fait ce que je pouvais, chuchota le vieux prêtre. Je sais qu’un des Français était votre ami, Sir Hugh. À Douvres, on embaumera derechef les corps. Je suis heureux que vous ayez pu assister à l’office. Je dirai à nouveau la messe à leur intention demain, jour de la Saint-Damase.
    — Saint Damase ? s’étonna le magistrat.
    — L’un des premiers papes, répondit le père Andrew. Je crois que c’était un martyr, mort pour sa foi. Qu’y a-t-il, Sir Hugh ?
    — Des prunes de Damas, répondit Corbett, énigmatique. Des prunes de Damas, chuchota-t-il, qu’un pape pourrait déguster avant de chanter laudes.

 
    CHAPITRE XII
    « On pourrait construire des engins pour envoyer
des émanations empoisonnées
et infectées là où on veut. »
    Roger B ACON ,
    De l’admirable pouvoir et puissance de l’art, et de nature.
    Assis à la haute table, Corbett s’efforçait de garder son calme. Il faisait mine de boire et de manger, mais, dans son esprit, idées, réflexions, surexcitation et peur se bousculaient. L’anxiété qui l’avait tenaillé s’était dissipée et avait fait place à un flot d’émotions. En toute autre occasion, il aurait entrepris une longue promenade, aurait sellé son cheval pour une randonnée ou même aurait sorti ses recueils de chants pour entonner un air ou un psaume. Les conversations tourbillonnaient autour de lui comme un souffle de vent. Quelle importance tout cela avait-il ? Ce n’était que comédie. Craon pouvait bien être assis céans, à se remplir la panse des délices préparées aux cuisines, à se rengorger en écoutant avec toujours la même courtoisie le babil de Lady Catherine, il n’en était pas moins un assassin croupissant dans le mal, pensait le magistrat. Corbett poussa presque un cri de soulagement quand le banquet s’acheva. Sir Edmund se leva et remercia avec volubilité Craon qui lui répondit avec force afféteries. Corbett adressa un clin d’oeil à son écuyer et, affalé dans sa chaire, les jambes étendues comme s’il était à moitié endormi, joua les

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