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Le livre du magicien

Le livre du magicien

Titel: Le livre du magicien Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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Requiescat in Pace. Elle s’agenouilla et tira de sous sa chape le brin de houx aux feuilles d’un vert vif et aux baies brillantes qu’elle venait de cueillir. Elle le déposa près de la croix. Elle aurait voulu apporter des fleurs, mais on était au milieu de l’hiver. Le père Matthew ne disait-il pas que le houx représentait le Christ, le Dieu vivant et éternel, et que ses boules symbolisaient son sang sacré ? Alusia se frotta le nez et essaya de se remémorer une prière. Le père Matthew leur avait appris le Notre Père en latin. Elle tenta de le réciter. Le latin, langue de Notre-Seigneur, avait plus de poids. Elle bafouilla sur les mots Qui es in caelo, « qui êtes aux cieux », renonça et se contenta de se signer. Puis elle s’assit sur ses talons. Pourquoi avait-on occis la pauvre Marion et les autres ? L’une après l’autre, de la même façon, par un carreau d’arbalète en plein coeur ou, dans le cas de Sybil, à travers la gorge, déchirant ainsi la chair des deux côtés. Qui était coupable ? Qu’avaient donc à se reprocher les victimes ? Dans leur naïveté, les servantes bavardaient à propos des jeunes hommes, attendaient avec impatience telle fête ou tel jour saint, la Noël quand l’énorme bûche craquait dans l’âtre du château ou le 1 er mai quand on dressait le mât sous le pur ciel bleu du début de l’été. Quel mal y avait-il à cela ?
    Alusia leva la tête, les yeux fixés sur la grille. Un instant, elle crut avoir aperçu quelqu’un. La cloche se mit à sonner et appela à sexte, sans éveiller grand intérêt chez les paroissiens. Alusia se signa derechef et se releva. Les autres jouvencelles étaient enterrées tout près. Pourquoi étaient-elles mortes ? On prétendait qu’elles n’avaient point été violées, alors pourquoi ? C’était de pauvres filles sans rien dans leur besace ni même un anneau bon marché au doigt.
    Alusia se dirigea avec lenteur vers la grille et s’engagea dans l’étroit sentier, encadré d’arbres drus, menant à la forteresse. La brume s’était épaissie. Elle hâta le pas puis fit halte en entendant du bruit derrière elle. Elle se retourna d’un coup : il n’y avait personne. Elle reprit sa marche et remarqua une touche de couleur sur le bord du chemin. Intriguée, elle se précipita. C’était un paquet de tissus, vert foncé et bruns, parmi lesquels on apercevait des cheveux bruns. Alusia s’arrêta, paralysée de terreur. N’était-ce pas la chevelure de Rebecca ? N’étaient-ce pas les couleurs des habits qu’elle portait ? Haletante, elle se baissa et tira sur le paquet. Le corps roula sur le dos : yeux vitreux, bouche maculée de sang, et, sous le menton, une horrible blessure sanglante d’où sortait le carreau d’arbalète. C’était Rebecca, morte et pourtant vivante, car Alusia entendit un terrible cri.
    Dans la salle du conseil la discussion s’était enflammée. Bolingbroke faisait les cent pas, en rage à l’idée que lui et Ufford avaient risqué leur vie – et qu’Ufford avait payé le prix fort – simplement pour s’emparer d’une copie.
    — C’était nécessaire, cria Corbett. Le roi s’intéresse beaucoup aux écrits de frère Roger. Nous devions nous assurer que le livre que nous possédons, notre copie du Secretus secretorum, était fidèle. J’ai comparé les deux et, autant que j’en puisse juger, étant donné leurs symboles et codes étranges, elles concordent.
    Sir Edmund observait la confrontation ; Ranulf s’amusait sans en rien laisser voir. Rien ne lui plaisait davantage que de voir débattre le vieux « Maître Longue Figure ». De plus, il connaissait de longue date le caractère emporté de Bolingbroke et Ranulf, qui savait ce que fuir des poursuivants signifiait, partageait son ire.
    — Ce que nous devons comprendre, William, continua le magistrat d’une voix qu’il voulait sereine, c’est la logique de la situation.
    — La logique ? rétorqua Bolingbroke en se rasseyant. Sir Hugh, j’en sais autant que vous là-dessus : nous ne sommes pas à l’école céans !
    — Si.
    Corbett sourit, puis s’interrompit quand le serviteur mandé par le gouverneur apporta un pichet de bière fraîche et du pain sortant du four. La distribution lui fournit un répit bien venu.
    Il s’empressa de reprendre la parole pendant que Bolingbroke avalait pain et fromage.
    — Nous devons nous montrer logiques. Ce qui me soucie, ce n’est ni la copie ni ce

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