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Le livre du magicien

Le livre du magicien

Titel: Le livre du magicien Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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chose ?
    — Certes non, bien que sa dépouille ait pu s’y trouver. N’oubliez pas qu’il neigeait. Je ne quittais ni le cheval ni le chemin des yeux. Il faisait un froid de loup. Alusia, emmitouflée dans sa mante près de moi, a eu la même remarque.
    — Par conséquent, remarqua Ranulf en reposant sa plume, Rebecca aurait pu aller au cimetière auparavant et y croiser son assassin, non ?
    — Mais pourquoi ne pas m’attendre ? Je crois...
    Elle avala une rasade.
    — ... qu’elle a quitté le château après moi et a rencontré sa mort.
    Elle regarda le magistrat.
    — Je ne peux vous en dire davantage, Messire. Les gens accusent les hors-la-loi, mais moi pas.
    Elle vida sa coupe et se leva.
    — Merci pour l’argent.
    — Maîtresse Feyner ?
    Elle souleva le loquet et se retourna.
    — Si je vous fais prêter serment, si je forme un jury et vous somme au nom de la loi de nommer un suspect...
    La lavandière laissa retomber la main et revint sur ses pas.
    — Et pourquoi feriez-vous ça, Messire ? Si vous le faisiez, vous ne pourriez m’assigner : ma fille est l’une des victimes, j’en suis sûre. Mais je vais vous confier quelque chose et j’y pense chaque fois que je me rends à la taverne. Notre hôte est un ancien soldat. Plusieurs jouvencelles ont servi dans sa grand-salle et Maître Reginald... disons qu’il a la main indiscrète et la lèvre gourmande. Ma Phillipa a aidé aux cuisines. Elle le prétendait luxurieux et ardent comme un bouc.
    — Mais il n’appartient pas au château.
    — Oh, si, Sir Hugh ! Il vient souvent avec sa charrette, son escarcelle tintinnabulante et ses yeux brillants.
    — Aucune des bachelettes n’a été violée, n’est-ce pas ?
    Maîtresse Feyner se dirigea vers l’huis.
    — Demandez aux jouvencelles, Sir Hugh. Maître Reginald – comment dirais-je ? – est peut-être un coq dans une petite basse-cour, mais c’est un coq châtré.
    — Vous répétez des ragots, commenta Ranulf.
    — Non, Messire, qui que vous soyez.
    Elle leur adressa un sourire par-dessus son épaule.
    — Maître Reginald a voulu palper mon corselet, mais a pris de la peine pour rien ! Il en a culbuté d’autres : le sol était frais, mais l’araire peu efficace. Il n’ignore pas que, en dépit de ses cocoricos, les femmes mêmes qu’il poursuit se raillent de lui. Vous devriez aller poser vos questions à la taverne, Sir Hugh. Il commerce avec Horehound.
    — Horehound ?
    — Oh, lui et sa bande se donnent des noms de simples et de plantes, mais ils ne sont pas aussi redoutables qu’ils en ont l’air ! Ce ne sont que claquedents et braconniers, soupira-t-elle, des hommes et des femmes coincés entre le château et la forêt. Bon, si c’est tout... ?
    Et, sans attendre qu’on lui réponde, elle ouvrit la porte et sortit.
    Le magistrat se mit en devoir d’enfiler ses bottes.
    — Oh, non ! grommela Ranulf. Allons-nous chasser, Sir Hugh ?
    Corbett se leva et boucla son ceinturon.
    — Non, manger. Nous partons à l’auberge goûter la cuisine de Maître Reginald. Puis nous irons à l’église. Je crois que le père Matthew célèbre une messe tard dans la journée.
    Ranulf et Chanson s’apprêtèrent en hâte et, bottes et éperons aux pieds, se rendirent aux écuries quérir les chevaux. La neige avait cessé de tomber, mais on s’y enfonçait jusqu’à la cheville. Corbett guida sa monture avec précaution sur les pavés couverts de boue neigeuse puis se mit en selle.
    — Sir Hugh ?
    Il se retourna. Bolingbroke dévalait l’escalier de la salle des Anges et, chape au vent, se précipitait vers lui.
    — Voulez-vous que je vous accompagne ?
    Bolingbroke repoussa ses cheveux qui se clairsemaient et essuya les gouttes sur son visage.
    — Je perds mon temps ici. Sanson et moi comparons les manuscrits. Ils sont identiques, mais quant à leur signification...
    Corbett se pencha et tapota le bras de son clerc.
    — Non, non, restez céans et surveillez ce qui s’y passe.
    Ils traversèrent le baile, silencieux sous son épais tapis. La plupart des membres de la garnison s’étaient abrités à l’intérieur. Ils franchirent le pont-levis à grand bruit, laissant derrière eux les odeurs du château au fur et à mesure qu’ils approchaient du chemin menant à la lisière de la forêt. Le paysage était glacial, le ciel menaçant et gris d’acier et seules deux couleurs dominaient : le noir et le blanc. Les arbres et les buissons,

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