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Le livre du magicien

Le livre du magicien

Titel: Le livre du magicien Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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yeux vers l’affreux visage, que le temps, le picotage des oiseaux et les morsures des animaux avaient rendu plus macabre encore. Il n’y avait plus d’yeux, seulement de noires orbites fixes, le cou était tordu et la tête penchait d’un côté. Horehound fronça le nez devant l’odeur de la putréfaction. Bien qu’elle fût hideuse, la dépouille n’avait à présent plus rien d’effroyable. Ce n’était que les restes pitoyables d’une jeune femme qui était montée dans le chêne et avait passé un morceau de sa longue robe de futaine sur la branche pour fabriquer un noeud coulant. Le hors-la-loi comprit combien cela avait dû être aisé ; même les vieillards auraient pu escalader un arbre comme celui-ci. Elle s’était sans doute avancée le long de la solide branche, avait attaché un bout du vêtement à son cou et l’autre à la branche et s’était tout simplement laissée tomber. Horehound fit le tour du corps. S’était-elle vraiment suicidée ? Ou quelqu’un l’avait-il conduite ici pour la tuer de cette horrible façon ? Il examina les mains aux ongles courts puis le vêtement tordu, solide comme une corde. Il faudrait un certain temps avant qu’il pourrisse et laisse tomber son fardeau.
    Horehound tira son couteau et gravit le tronc du chêne. Usant des noeuds du bois pour progresser, il avança le long de la branche et, après s’être assuré de son équilibre, entreprit de scier l’étoffe jusqu’à qu’elle se déchire et que le cadavre dégringole sur le sol. L’effort et la tension avaient suffi à épuiser le malheureux. Le couteau entre les dents, il sauta avec légèreté à terre. Il recouvrit la dépouille d’un magma de feuilles détrempées et gelées en évitant de regarder le visage, et priant en silence la miséricordieuse Mère du Christ de l’aider.
    — Qui est-ce ? demanda Skullcap en s’approchant.
    — Une autre jouvencelle, c’est tout. Les chairs commencent à se décomposer.
    Horehound alla se laver les mains dans un petit ruisseau proche.
    — Il n’y a pas de quoi avoir peur ; en tout cas pas encore, pas avant qu’on l’ait trouvée.
    Il ramassa son gourdin, jeta un dernier coup d’oeil au pitoyable petit tertre et retrouva le chemin qui le conduirait à la grotte discrète où s’abritait le reste de la bande. Il l’avait presque atteinte quand il sentit les premiers effluves de feu de bois et l’alléchant parfum de la viande rôtie. Il s’arrêta si brusquement que Skullcap le heurta.
    — Te souviens-tu de Fleawort ? chuchota-t-il. Et de ses visions ? Je sens une odeur de viande en train de cuire.
    — Moi aussi, répondit Skullcap.
    Ils se précipitèrent dans les broussailles, cherchant éperdument la source du fumet. Quand il parvint à la clairière, Horehound n’en crut pas ses yeux. Les hors-la-loi, abandonnant leur grotte, avaient allumé un grand feu. Ils y faisaient griller des morceaux de viande et buvaient avec avidité au tonnelet qu’ils se passaient de main en main. Horehound sortit son coutelas puis sourit quand une silhouette se détacha du groupe en repoussant un capuchon en loques. C’était Hemlock {15} ! Il se précipita pour embrasser son compagnon qui était parti peu avant la Toussaint en disant vouloir tenter sa chance un peu plus à l’est.
    — Pourquoi es-tu revenu ?
    Hemlock repoussa son étrange chevelure, épaisse et noire, mais striée de blanc comme la fourrure d’un blaireau. Il était grand et musclé ; une moustache et une barbe hirsute couvraient le bas de son visage. Horehound remarqua la cicatrice, encore fraîche, que son camarade avait sous l’oeil gauche.
    — J’ai ma propre troupe, à présent, dit ce dernier en montrant le feu du doigt. J’ai amené deux hommes avec moi, juste au cas où. Ils ont rapporté la viande et un tonnelet de bière.
    — D’où ? s’enquit Horehound.
    Hemlock sourit et posa un doigt sur ses lèvres.
    — Ah ! Je dois te narrer ce que j’ai vu ; ensuite tu devras voir ce dont j’ai été témoin.
    Il hocha la tête et éclata de rire devant les protestations de Horehound.
    — Allez, ajouta-t-il en faisant un geste, remplis-toi la panse, puis je résoudrai l’énigme...
    Corbett, adossé aux oreillers, assis sur son lit, se penchait en avant, un peu recroquevillé, pour profiter au mieux de la lumière de la chandelle posée sur la table proche. On avait dressé un feu et les braseros pétillaient. Le magistrat était heureux

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