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Le loup des plaines

Le loup des plaines

Titel: Le loup des plaines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Conn Iggulden
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maître, talonna sa monture
qui partit au galop. Les chiens cessèrent d’aboyer pour le suivre, enfiévrés
par la chasse. L’air était froid mais les guerriers portaient des deels matelassés et le soleil se levait.
     
     
    Immobile, Temüdjin regardait une mouche trottiner devant son
visage. Il s’était recouvert le corps de boue pour dissimuler son odeur, mais
il ignorait si cela suffirait ou non. Il était allé aussi loin qu’il avait pu
dans le noir, boitant et sanglotant. C’était étrange comme il pouvait se montrer
faible dès lors qu’il était seul. La piqûre des larmes sur sa peau écorchée ne
le tourmentait pas s’il n’y avait personne pour en être témoin. Chaque pas
était une souffrance et cependant, il s’était forcé à continuer, ressassant
dans sa tête les mots de Hoelun les premiers soirs dans la ravine : il n’y
avait aucun secours à attendre, il n’y aurait aucun terme à leur souffrance s’ils
n’y mettaient fin eux-mêmes. Il avançait, comptant sur l’obscurité pour le
dissimuler aux guetteurs des collines.
    Lorsque l’aube était venue, il claudiquait tel un animal
blessé, quasiment plié en deux de douleur et de fatigue. Il s’était effondré au
bord d’une rivière, pantelant, la tête tournée vers le ciel pâle qui annonçait
le lever du soleil. Avec le jour, on découvrirait sa fuite. S’était-il beaucoup
éloigné du camp ? Il vit les premières étincelles dorées, trop
éblouissantes pour ses yeux, illuminer l’horizon sombre. Il se mit à creuser la
boue de ses mains gonflées, cria quand son doigt fracturé entra en contact avec
une pierre.
    Il perdit connaissance quelques instants et ce fut un
soulagement. La boue était une pâte qui glissait entre ses doigts quand il l’étendait
sur sa peau et ses vêtements. Elle était fraîche mais donnait de terribles
démangeaisons une fois sèche.
    Il fixa longuement son doigt cassé, la jointure gonflée et
la peau violacée sous la boue. Puis il sortit de son hébétude, subitement
effrayé par le temps qu’il laissait s’écouler. Son corps était au bout de sa
résistance, il n’avait plus qu’une envie : renoncer et se laisser glisser
dans l’inconscience. Au plus profond de lui, il y avait encore une petite
flamme qui voulait vivre mais elle étouffait dans cette forme crottée et
abrutie qui se vautrait sur la rive et pouvait à peine se tourner pour suivre
la progression du soleil dans le ciel.
     
     
    Entendant des chiens aboyer au loin, il s’arracha au froid
et à la fatigue. Il avait dévoré depuis longtemps le mouton d’Arslan et mourait
à nouveau de faim. Les bêtes semblaient proches et il craignit soudain que la
boue ne lui soit d’aucun secours. Il se souleva, caché par les herbes de la
berge, rampa par à-coups. Les aboiements se rapprochaient. Le cœur affolé, il
songeait avec terreur aux crocs déchirant sa chair, l’arrachant de ses os. Il n’entendait
pas encore les sabots des chevaux mais il savait qu’il n’avait pas fui assez
loin.
    Avec un grognement, il se laissa glisser dans l’eau glacée, se
dirigea vers les roseaux. La partie de lui-même encore capable de penser le
força à poursuivre au-delà des premières touffes. Si ses poursuivants
découvraient l’endroit où il était demeuré allongé, ils fouilleraient les
environs immédiats.
    La rivière l’engourdit et, bien qu’elle fût encore peu
profonde, Temüdjin s’aida du courant pour en descendre le lit à quatre pattes
dans la vase. Il sentait des créatures vivantes filer entre ses doigts, mais le
froid l’avait réduit à un noyau de sensations sans lien avec la réalité. Les
guerriers d’Eeluk remarqueraient le nuage de boue qu’il avait soulevé, c’était
sans espoir. Il ne s’arrêta cependant pas et chercha une eau plus profonde.
    La rivière faisait un coude sous de vieux arbres qui la
surplombaient. Sur l’autre berge, un bloc de glace bleue constamment à l’ombre
avait survécu à la fin de l’hiver. Le courant avait érodé sa base et, malgré le
froid mordant, Temüdjin se dirigea droit vers la glace.
    Il se demanda vaguement combien de temps il tiendrait dans l’eau.
Il se glissa sous la corniche de glace et s’agenouilla dans la vase, les yeux
et le nez au-dessus de la surface. Les guerriers devraient se mettre à l’eau
pour le repérer, mais ils lanceraient probablement leurs chiens en amont et en
aval.
    Paralysé par le froid, il se dit qu’il allait mourir.

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