Le Maréchal Berthier
et il rentra secrètement en France. La marquise demeura encore un mois près des siens. Comme Napoléon s'était montré plutôt froid avec elle, Giuseppa profita de son voyage de retour pour aller ostensiblement rendre visite à son amie Madame de Staël en Suisse, dans son château de Coppet. Là se rassemblaient tous les opposants de bon ton à l'Empire, à commencer par Chateaubriand.
Si l'empereur en campagne avait à ses côtés un certain nombre d'aides de camp flanqués d'officiers d'ordonnance et d'un cabinet, au demeurant assez restreint, ce n'était nullement un état-major. Le véritable qui portait le titre de « grand état-major général » était entièrement aux ordres du maréchal Berthier. Il comprenait d'une part, comme pour Napoléon, un certain nombre d'officiers de haut grade : deux généraux, deux colonels, six aides de camp colonels ou chefs d'escadrons, puis quatre aides de camp surnuméraires capitaines ou lieutenants ; trois aides de camp adjoints, un chef de bataillon, deux capitaines plus, après 1806, un certain nombre d'officiers provenant de pays alliés. Tous ces attachés étaient flanqués par le cabinet particulier du maréchal nommé « bureau du major général », composé de civils. Ceux-ci étaient essentiellement chargés du secrétariat, et si on peut s'étonner que pour exécuter ce travail Berthier et l'empereur aient employé des civils, c'est parce que ceux-ci, très instruits, habitués au service de bureau, étaient capables d'accomplir un travail considérable.
D'autre part, Berthier commandait l'état-major général proprement dit. Celui-ci avait à sa tête le premier aide-major général faisant fonction de chef d'état-major général. C'était au départ le général Andréossy. Il existe une subtile distinction entre les fonctions de major général et celles de chef d'état-major général. Le premier supervisait l'ensemble ; le second était chargé de faire fonctionner les différents bureaux de l'état-major et accessoirement de remplacer son chef. Cet état-major comprenait 3 divisions entre lesquelles étaient réparties les différentes activités : expédition des ordres, renseignement, logement du grand quartier général, police militaire, logistique, hôpitaux, prisonniers, conseils de guerre, etc.
Le travail des bureaux était donc administratif. À côté d'eux existait le bureau topographique essentiel en campagne pour effectuer des relevés de terrain. En outre, les états-majors du commandant de l'artillerie et du génie étaient subordonnés au G.Q.G.
Bien entendu, le G.Q.G. était un organisme trop important pour ne pas bénéficier d'une protection rapprochée permanente. Pour des raisons de mobilité, Berthier avait fait appel à un régiment de cavalerie cantonné d'habitude légèrement en avant du quartier général.
Cet ensemble finissait par réunir beaucoup de monde. Dès 1805, il comptait plus d'une centaine de personnes, essentiellement des officiers. Et pourtant, à plusieurs reprises, Napoléon avec raison fit remarquer à Berthier qu'il devrait étoffer ses services. En particulier, le 17 septembre 1806, il lui écrivit une longue lettre datée de Saint-Cloud à ce sujet, lui recommandant de doubler, voire de tripler ses effectifs.
Mais il n'était pas toujours facile de trouver des officiers actifs, intelligents, doués d'un minimum d'esprit d'initiative, sachant correctement rédiger et prêts à quitter leur corps de troupes même pour une période limitée. Entre le G.Q.G. et l'état-major général fort proches l'un de l'autre, il y eut forcément, au début, un certain nombre d'interférences, certains officiers passant aisément d'un des organismes à celui d'à côté, soit pour une mission définie, soit pour un certain temps afin d'y remplir un vide.
La « maison » de l'empereur, qu'elle logeât dans une bâtisse en dur ou sous la tente, avait obligatoirement celle du major général à proximité. Il arrivait souvent que Napoléon qui dormait peu ou mal fît appeler Berthier plusieurs fois dans la nuit pour des questions qui pouvaient aussi bien être importantes que des détails insignifiants. Le major général s'était donné pour règle, quelle que soit l'heure, de paraître devant le « patron » tiré à quatre épingles et d'humeur égale. Si l'empereur dormait peu, le major général était capable de le faire moins encore.
En arrivant à Pont-de-Briques, logement de l'empereur près de Boulogne et
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