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Le maréchal Ney

Le maréchal Ney

Titel: Le maréchal Ney Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric Hulot
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ces interrogatoires, qui l’amusaient plutôt, pour laver son linge sale. Il se montra agressif vis-à-vis de Soult qui l’avait envoyé, dit-il, dans un guêpier. Ensuite, il chargea Bourmont en assurant que le 14 mars au matin, après avoir pris connaissance de la fameuse proclamation de Napoléon, celui-ci avait déclaré « qu’il fallait se joindre à Bonaparte parce que les Bourbons avaient trop fait de sottises ».
    En tout cas, rien de bien positif, qui ne fut déjà connu, ne sortit de ces entretiens. Plusieurs juristes consultés par le gouvernement estimèrent que si le maréchal avait eu un comportement outrancier, il n’y avait pas là de quoi fouetter un chat. On ne pouvait lui faire grief de n’avoir pas su commander à des troupes qui refusaient de lui obéir. C’était l’avis du roi. Mais comme on voulait en faire un bouc émissaire, les ultra-royalistes entendaient lui faire payer tout ce qu’à leurs yeux représentaient les Cent-Jours et même la Révolution et l’Empire. Aussi ne s’arrêtèrent-ils pas à ces arguments juridiques.
    Cependant, Ney subit son incarcération avec tant de calme et de sang-froid, ne se plaignant de rien, qu’au bout de trois semaines on le transféra dans un local plus spacieux : le logement du greffier, qui fut prié d’aller gîter ailleurs. On lui permit également de se promener dans un préau que, pour sa commodité, on vida de ses locataires habituels. Il fut autorisé à fumer et à jouer de la flûte, car il avait conservé son instrument. C’était, comme il le dit, en dehors des visites de sa femme (il n’était plus au secret), sa seule distraction. Mais bientôt, des surveillants à l’esprit tortueux et enfiévré virent dans cette paisible et inoffensive traversière un moyen de communiquer clandestinement avec ils ne savaient qui. La flûte fut confisquée !
    Eglé et son beau-frère Gamot se dépensaient beaucoup. Le beau-père du maréchal, qui aurait été si utile dans un tel moment à cause de ses nombreuses relations, ne put rien faire. À la nouvelle de l’arrestation de son gendre, il avait été frappé d’apoplexie et devait en mourir peu après. D’abord la maréchale chercha, en vain, à solliciter la clémence du roi. Agitée, brouillonne, elle n’était que d’une faible aide à son mari. Ce fut toutefois elle qui sur les conseils de Gamot prit contact avec des avocats qui accepteraient de défendre le maréchal. Le choix fut bon. D’abord, elle intéressa à sa cause Berryer père. Juriste de renom et, ce qui ne gâchait rien, royaliste convaincu, il était très connu au palais. Elle vit également Bonnet, qui avait victorieusement défendu Moreau et était un redoutable procédurier. Avec beaucoup de sagesse, il se récusa en faisant valoir que ses opinions personnelles bien connues (il était demeuré ardent républicain) pourraient desservir son client. Mais il donna à Eglé le conseil de s’adresser à Dupin pour seconder Berryer. L’avis était judicieux. C’était lui aussi, encore qu’il fût au début de sa carrière, un très bon orateur. Sa collaboration avec son confrère se révéla fructueuse. En revanche, la maréchale, sans motif bien valable, refusa les services de Bellard, ancien conseiller juridique de la famille, et ce rejet eut des conséquences néfastes.
    Pour traduire Ney en conseil de guerre, encore fallait-il en constituer un. Et là commencèrent les vraies difficultés. Le règlement en vigueur précisait que le conseil de guerre ayant compétence pour juger un maréchal de France devrait d’abord être présidé par un autre maréchal, n’ayant si possible pas servi sous les ordres du prévenu. Il devrait être exclusivement composé d’officiers généraux du même grade que lui, c’est-à-dire de généraux de division, puisque le maréchalat n’est pas un grade, mais une dignité.
    Comme bien l’on pense, les maréchaux ne se bousculèrent pas pour faire partie de la juridiction. Le premier, Mortier, voyant monter l’orage, prit contact avec Dupin en lui demandant de lui rédiger une lettre de récusation. Il s’expliqua : « Nous ne sommes pas un tribunal politique... On veut nous mettre en face du fait matériel de défection, comme si le fait s’était passé en présence de l’ennemi. » Il avait admirablement compris que c’était là ou le bât blessait l’accusation. Assimiler Napoléon à une puissance étrangère était un peu gros. Les réticences de

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