Le maréchal Ney
cavaliers autrichiens. Son cheval fut tué sous lui. S’étant dégagé et relevé, il continuait à se défendre à coups de sabre, mais les ennemis étaient très nombreux. La rage au coeur, il dut se rendre. Prisonnier ! Ce fut la consternation dans l’armée française. Hoche comprit qu’il se devait de faire quelque chose en faveur de son brillant subordonné. Il entra en rapport avec l’état-major autrichien pour obtenir sa libération sur parole. Mais connaissant la valeur de leur captif, les Autrichiens ne montrèrent aucun empressement à le relâcher. Ils le traitèrent fort bien, le comblèrent de prévenances... et le gardèrent jusqu’au prochain armistice, signé le 24 mai. On ne lui demanda même pas de ne plus servir pendant un certain temps contre les coalisés.
Bientôt, Hoche allait disparaître, emporté par la tuberculose qui le minait et, les forces en présence s’équilibrant, les fronts allaient se fixer pendant plusieurs mois. Ses régiments placés en avant pour surveiller les mouvements éventuels de l’ennemi, Ney, en réalité avait peu d’occupations. Il en profita pour parfaire son instruction. À présent qu’il était général, il mesurait encore davantage ses lacunes. Et sur les conseils de Hoche il s’appliqua à s’intéresser à la politique et afficha un républicanisme farouche. En réalité, il n’y comprenait pas grand-chose, si ce n’est que l’attitude et les intrigues des civils de l’intérieur l’écoeuraient passablement.
*
Le Directoire avait remplacé Hoche par Jourdan. Le gouvernement et surtout Carnot, responsable des opérations militaires, comptaient sur les armées d’Allemagne, Sambre-et-Meuse et Rhin-et-Moselle, cette dernière commandée par Moreau, pour contraindre l’Autriche et demander la paix. Elles devaient donc mener l’action principale dans le plan de campagne français. Une troisième armée en Italie aux ordres d’un général presque inconnu, Napoléon Bonaparte, ne devait jouer qu’un rôle secondaire.
Ce fut tout le contraire qui se produisit. Certes, Moreau mena une offensive qui le conduisit jusqu’au Danube, mais la défaite de Jourdan à Wûrzburg les contraignit tous deux à battre en retraite. Moreau parvint à atteindre le Rhin sans perdre un homme ou un canon.
Pendant ce temps Bonaparte se couvrait de gloire en Italie, et son armée, tout en battant à chaque rencontre les Sardes puis les Autrichiens, pillait consciencieusement le pays. Ney, toujours en Allemagne, n’eut aucune occasion de se distinguer, mais continua à se faire remarquer par la manière dont il reprit en main ses troupes quelque peu indisciplinées et vêtues d’uniformes trop disparates à son goût. Puis, comme le ministère lui avait fait savoir qu’il devrait vivre sur le pays, il le mit méthodiquement en coupe réglée, pour améliorer l’allure et le vivre de ses soldats plutôt que pour son profit personnel. Si sa manière de procéder fut peu goûtée de certains de ses camarades, elle lui valut les éloges de ses chefs. Ils commençaient à estimer pouvoir en faire un général de division, grade le plus élevé dans l’armée française. Bien entendu, lui seul ne voulait pas en entendre parler et plus que jamais il se plongea dans la lecture des oeuvres de Frédéric II et du chevalier de Guibert.
Cependant, après la paix signée par Bonaparte à Campo-Formio, il fallut réduire les effectifs de l’armée d’Allemagne. D’autant que le conflit continuait avec la Grande-Bretagne. Comme bien d’autres gouvernements avant lui, le Directoire caressait le rêve d’y réussir un débarquement. Des troupes furent concentrées dans ce but en Picardie et le général Ney fut envoyé à Abbeville pour y constituer une brigade. Quelques mois après, l’armée d’Angleterre était dissoute. Ney reprit le chemin de l’Allemagne. Il s’y retrouva sous les ordres de son ami Bernadotte.
Pour ne pas déroger à ses habitudes, à peine était-il arrivé que, par un coup de main hardi, il s’empara de Mannheim dont le souverain était encore en guerre avec la France. C’était donner aux Français une tête de pont sur le Rhin, fort utile pour les opérations à venir. Sur la demande de Bernadotte, le Directoire nomma Ney général de division. Nouveau refus de ce dernier : modestie ou habileté ? Bernadotte dut insister et il finit par accepter, tout en clamant qu’il s’interrogeait sur ses capacités à remplir ces
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