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Le mariage de la licorne

Le mariage de la licorne

Titel: Le mariage de la licorne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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ne se prêtaient guère à mieux.
    — En effet, en effet. Mais voyons. Trêve de formalités, mon bon ami. Nous nous connaissons depuis trop longtemps tous les deux pour avoir à nous éterniser en ronds de jambe.
    — C’est trop d’honneur.
    — Aucunement. Vous représentez la seconde plus grande cité de mon royaume. Par conséquent, mon geste n’a rien de fortuit. Le vôtre non plus, j’en suis sûr. Je suis en droit de m’attendre à pouvoir compter sur vous si besoin est.
    — Tout humble serviteur que je sois, ma dévotion vous est entièrement acquise.
    — Parfait. Mais, comme vous pouvez le constater par vous-même, il ne s’agit ici aucunement d’une audience dite officielle. Vous pouvez donc parler tout à votre aise.
    Friquet sourit et porta une main prudente à sa tonsure qui avait légèrement rosi au cours de cette journée riche en émotions. Le roi demanda encore :
    — Que puis-je faire pour vous, Excellence ?
    — Eh bien, voilà, sire, il s’agit d’une affaire euh… comment dire… de nature plutôt… personnelle. Enfin, presque. Avec votre permission, j’aurais à vous présenter deux personnes qui m’ont accompagné en ce grand jour. Elles ont manifesté le désir de vous présenter leur hommage sans attendre.
    — Ah bon. Il doit s’agir d’une mesure d’extrême urgence, puisque ces gens ne sont pas capables de patienter jusqu’à la réouverture des audiences publiques.
    La voix de Charles était très douce, réfléchie, empreinte d’une langueur vaguement railleuse. Ce jeune homme s’avérait très différent de son père, dont les engueulades étaient célèbres. Friquet, mal à l’aise, se racla la gorge avant de répondre :
    — Sans vouloir vous incommoder, sire, je me permets d’insister. Est-ce que le nom d’Augignac évoque quelque chose pour vous ?
    Charles prit un temps de réflexion en frottant son menton pointu.
    — D’Augignac. Un nom de la langue d’oc. Oui, il me semble avoir déjà entendu ça quelque part. Cette famille appartient au Mauvais. Est-ce que je me trompe ?
    — En toute franchise, je l’ignore. Ce que je sais en revanche, c’est que la petite damoiselle dont c’est le nom, ainsi que son fiancé, le maître Baillehache, sauront vous être tout aussi dévoués et aussi dignes de confiance que je le suis moi-même.
    — Baillehache, dites-vous ? Ce nom-là m’est familier. Plus encore que l’autre. Cependant, je serais bien en peine de savoir pourquoi.
    Friquet effleura précautionneusement sa tonsure du bout des doigts et éluda :
    — Bien que la damoiselle d’Augignac provienne d’un riche et ancien lignage, elle est, hélas, sans grande fortune. Son modeste bien est exploité grâce aux excellents soins de son promis, et ce, avec la bénédiction de…
    Charles leva une main impérieuse.
    — Je vous arrête tout de suite, mon bon ami : mes coffres sont à sec. Vous me voyez malheureusement incapable d’assurer une rente viagère à tous ceux qui se disent mes loyaux sujets et qui sont dans le besoin.
    — Oh, il ne s’agit pas du tout de cela, sire. Rassurez-vous. Comme je vous l’expliquais, la petite damoiselle n’est nullement dans le besoin, à cause de son fiancé qui se trouve être aussi mon…
    — Bien, bien, vous m’en voyez ravi. Maintenant, si vous en veniez à l’objet de cette visite ? Vous désiriez me présenter ces gens. Alors faites donc, Excellence, faites donc. Il me faut repartir dès demain pour Paris et j’aimerais pouvoir me retirer bientôt, si vous n’y voyez pas d’inconvénient.
    — Non. Bien sûr que non, sire. Daignez m’accorder un instant. Friquet s’inclina, recula de quelques pas et fit un signe au serviteur qui se trouvait là.
    Louis laissa Jehanne prendre les devants et faire sa révérence, comme il se devait. Pendant que la jeune fille échangeait quelques propos timides avec ce personnage mythique, Louis prit le temps de l’étudier d’un peu plus près, avec discrétion. Sa main enflée l’intriguait au plus haut point. Charles V, qui était plus jeune que lui de cinq années, affichait, lorsqu’il souriait, des dents grises dont certaines devaient être branlantes. Impressionnée, Jehanne restait figée sur place, alors que le roi lui prenait les deux mains pour lui montrer qu’il acceptait son hommage. Soudain, elle s’exclama :
    — Maintenant, je n’aurai jamais à craindre d’attraper les écrouelles* !
    Friquet de Fricamp

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