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Le mariage de la licorne

Le mariage de la licorne

Titel: Le mariage de la licorne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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Blandine firent de même, suivis de Toinot. Tout le monde baissa respectueusement la tête. Margot jeta quand même un bref coup d’œil du côté de Louis, qui finit enfin par se signer aussi.
    Le courrier reprit :
    — On a arraché et renversé sa bannière avant de l’occire. Oui, je sais. Tout le monde perçoit cela comme une véritable profanation. Même ce maudit Montfort (110) en a été tout retourné lorsque ses sbires anglais sont venus lui montrer la dépouille de l’ennemi qu’ils avaient tué. Croyez-le ou non, ils ont trouvé un cilice sous la cuirasse du duc. Cet homme n’était ni plus ni moins qu’un saint en ce bas monde, le second qu’ait eu la maison de France.
    — Les saints ont habituellement pitié des autres, fit remarquer Louis. Si j’en crois ce que l’on m’a dit à son sujet, ce n’était pas sa plus grande vertu.
    « Oyez l’hôpital qui se moque de la charité », se dit Margot. Le courrier répondit :
    — Peut-être que non, mais ce sont ses belles qualités et sa piété que l’on se remémore. Il ne voyageait pas sans la compagnie d’un aumônier portant dans un pot, du pain, du vin, de l’eau et du feu pour dire la messe en route. Car Charles de Blois entendait quatre ou cinq messes par jour et se confessait matin et soir.
    — Voilà qui est bien, dit le père Lionel qui surgissait de nulle part en grattant sa petite tonsure qui disparaissait sous un chaume sombre et hirsute. J’aimerais avoir autant de succès avec la confession.
    Il souriait à Louis.
    — Ça, je ne vous le fais pas dire, mon père. Avec lui, vous en auriez eu. S’il vous avait vu passer, il se serait jeté à bas de cheval, dans la boue, pour recevoir votre bénédiction.
    — Bon, bon, ça va. On a compris, dit Louis.
    Non loin d’eux, un buisson s’agita brièvement Nul ne le remarqua et Sam put aller se dissimuler derrière le coin de la maison pour continuer à les espionner plus à son aise. Il rentrait d’une expédition au ruisseau avec un pieu effilé sur lequel étaient plantés quatre poissons dont l’un frétillait encore et il ne tenait pas du tout à se faire voir. Il s’abîma un instant dans ses pensées en contemplant alternativement ses poissons et le dos tourné du métayer. « Si ce pieu était une lance et l’un de ces poissons, Baillehache… »
    — Est-il vrai que Charles de Blois a fait plusieurs fois, pieds nus dans la neige, le pèlerinage de saint Yves, le grand saint breton ? demanda le moine.
    — Je le croirais volontiers. Même lorsqu’il n’était pas en pèlerinage, il mettait des cailloux dans sa chaussure, interdisait qu’on enlevât la vermine de son cilice et portait très serré trois cordes à nœuds qui lui entraient dans la chair. C’était à faire pitié, à ce qu’il paraît. Quand il priait, il se fustigeait à s’en rendre malade.
    — Moi, je n’ai pas besoin d’aller bien loin pour rencontrer des saints comme ça, dit Louis, qui songeait aux tourments de certains prisonniers.
    Tout le monde fit silence. Le père Lionel se racla la gorge :
    — Il est des fois, mon fils, où votre genre d’humour me donne froid dans le dos.
    — Je ne croyais pas avoir fait une plaisanterie.
    — Ah. Bon.
    Louis dit au messager :
    — Merci de m’avoir prévenu. Allez, au travail, vous autres. Non, pas vous. J’ai affaire à vous.
    Il avait intercepté le père Lionel, qui s’apprêtait à prendre la direction de la forêt avec un panier vide destiné à recueillir un fouillis d’herbes et d’écorces. Le groupe s’en retourna au champ en semant Louis, Lionel et Thierry derrière lui. Les deux derniers se rapprochèrent du manoir, tandis que le premier s’en allait d’un bon pas vers le ruisseau afin de voir si Sam s’y prélassait.
    — Il paraît que Charles de Blois était sodomite, laissa tomber Toinot en jetant un coup d’œil du côté de Louis qui s’éloignait.
    Il s’en retournait au champ en compagnie des autres.
    — Il paraît aussi qu’il ne se lavait jamais, dit Blandine en plissant le nez.
    Margot répliqua :
    — Ne parlez pas ainsi de ce saint homme. Que nous importe qu’il fût sale ou non, puisque son âme, elle, était pure comme celle d’un agneau. Maintenant qu’il a rejoint le bleu paradis, peut-être intercédera-t-il pour nous autres, pauvres gens.
    — Eh bien, moi, je lui souhaite bien du courage. Parce que notre bonhomme se baigne, lui. Tous les jours.
    Margot était bien

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