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Le mariage de la licorne

Le mariage de la licorne

Titel: Le mariage de la licorne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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plutôt peur. Le souvenir ancien de la nuit où elle l’avait vu pour la première fois, étendu en pleine rue et gémissant auprès d’un sac dont le contenu angoissant lui avait été dissimulé avec peine par la main du père Lionel, revenait occasionnellement la hanter. Elle tourna timidement la tête vers lui pour lui demander :
    — Vous ai-je déplu de quelque manière ? Car si tel est le cas, je m’en excuse de tout mon cœur.
    — Pas du tout, soyez tranquille.
    — Si je vous ai fait de la peine parce que j’ai passé trop de temps avec Sam et si peu avec vous… Mais vous êtes toujours tellement occupé… Ce n’est pas ce que je voulais dire.
    — Laissez, laissez. Et calmez-vous. Je ne vous demande pas de vous justifier. Cela dit, il me faut vous prévenir que dorénavant je me verrai dans l’obligation de mettre votre ami Aitken sous haute surveillance. Ceci, bien sûr, afin d’éviter qu’il ne lui vienne à l’esprit de commettre une nouvelle bêtise. Vous me comprenez ?
    « Il sait », se dit Jehanne, qui ne put s’empêcher de se féliciter d’avoir rejeté l’audacieux projet de Sam. Elle ne pouvait évidemment se douter que cette idée pouvait être d’autant plus aisément soupçonnée qu’elle souffrait d’un manque flagrant d’originalité. Elle dit :
    — Oui, je comprends cela, maître. Et je ne vous en veux pas de le faire.
    — Bien.
    Il se rassit pour finir son souper qui était en train de refroidir et omit de rappeler les autres pour qu’ils pussent faire de même. Jehanne entretint Louis de choses et d’autres, de tous ces petits riens du quotidien qui faisaient leurs délices, à Sam et à elle. Ils ne paraissaient pas aussi amusants lorsqu’ils étaient racontés à Louis. Il était étrange de voir comment les mêmes mots, dits de la même façon, pouvaient se transformer en tout autre chose que ce qu’ils eussent dû être en réalité, selon la personne à qui ils étaient destinés. Les menus propos de Jehanne tombaient un à un sur la table comme des insectes morts. Mais Jehanne ne se découragea pas pour autant. Elle mit une telle ardeur à essayer de faire parler son fiancé qu’il fut incapable de placer un mot. Elle finit donc par en revenir au cœur du sujet qui la préoccupait :
    — Jamais vous ne m’avez frappée, moi. Et je vous aime.
    Elle surmonta sa gêne pour aller vers lui et lui posa une main sur l’épaule. Il tourna la tête vers elle.
    — Sam vous aimerait aussi, j’en suis sûre, si vous faisiez l’effort de rester aimable avec lui, dit-elle.
    — C’est votre ami et non le mien.
    — Mais il n’empêche que c’est quand même grâce à lui que nous avons trouvé l’abri souterrain qui nous a permis à tous de survivre. Promettez-moi au moins que vous ne le frapperez plus. Il y a tant d’autres moyens. Je vous en prie, maître. Toute cette violence, j’ai… Cela me fait très, très peur.
    Louis se leva, l’obligeant à retirer sa main, et lui fit face.
    — Avec tout le respect que je vous dois, ce n’est pas à moi de vous faire des promesses. Mais puisque vous tenez vraiment à en obtenir, allez en demander à Aitken. Pour ma part, je continuerai à faire mon devoir. Maintenant, si vous voulez bien m’excuser, l’heure avance. Dormez bien, damoiselle.
    Il s’inclina légèrement avant de lui tourner le dos. Désespérée, Jehanne le regarda marcher jusqu’à la porte. Il devait pourtant exister un moyen de le convaincre. Soudain, elle eut une idée.
    — Maître, pourrais-je avoir le fouet ?
    Il se retourna. L’un de ses sourcils presque noirs se relevait, interrogateur.
    — Quel fouet ?
    — Ce… celui avec lequel vous avez puni Sam. Puis-je l’avoir, s’il vous plaît ?
    Louis nota que la voix de la jeune fille tremblait. Il demanda :
    — Que comptez-vous en faire ?
    — Euh… c’est que… en fait, je n’en ai pas la moindre idée. Il hésita, la main sur la porte. Finalement il dit :
    — Bon, attendez-moi ici.
    Jehanne mentait, c’était l’évidence même. Sa requête était d’autant plus insolite qu’elle venait juste de lui avouer sa crainte de la violence. D’avoir en sa possession l’instrument qui avait servi à punir Sam ne devait donc pas être son but en soi. Mais elle en avait certainement un, qui sans doute représentait beaucoup pour elle. Il ne poussa pas plus avant ses réflexions. Jehanne avait toujours eu de drôles d’idées. Il n’y avait là rien

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