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Le mariage de la licorne

Le mariage de la licorne

Titel: Le mariage de la licorne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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seaux d’eau pour épargner une structure qui n’avait d’autre fonction que celle de servir d’aire de jeu. Sam demeura donc affalé par terre et laissa ses larmes lui brouiller la vue. Il eut à peine le temps de s’interroger sur ce qui avait bien pu se passer, car il se souvint d’avoir bien éteint son esconse* avant de s’endormir.
    — Aitken.
    Cette voix douce, cet accent, Sam les reconnut. Tout contre l’entrée incandescente de la tour se découpa la silhouette noire et immobile de Baillehache. Il brandissait quelque chose qui ressemblait à une grosse perdrix au-dessus du feu qui atteignait maintenant le seuil. C’était sa cornemuse.
    — NON !
    Le jeune homme s’élança vers Louis, dont la main s’ouvrit. L’instrument tomba parmi les flammes en produisant une gerbe d’étincelles. Le bourreau fit un pas de côté et observa la scène. Sam, impuissant, tendit la main en gémissant. La poche de la cornemuse se flétrit et ses bourdons se dressèrent, comme pour implorer le jeune musicien de lui venir en aide. Ils s’affaissèrent ensuite rapidement et l’instrument se transforma en boule de feu qui crépitait.
    En se retournant, il vit le visage imperturbable, satanique de Baillehache, que les flammes éclairaient par en dessous. Il se précipita vers lui et chercha à l’empoigner. Louis recula d’un pas et lui assena une gourmade*. Sam tituba, à demi assommé. Il chercha à nouveau à atteindre le bourreau, qui le frappa encore deux fois de sa canne avec une cruelle efficacité. Ses jambes se dérobèrent sous lui. Aucun des deux hommes ne s’était encore rendu compte que le père Lionel assistait, malheureux, à cet affrontement, ni que, peu à peu, des feux poussifs et isolés commençaient à les cerner à cause des brandons qui tombaient du toit. Sam roula sur lui-même et s’empara d’un fragment de pierre pointu dont il chercha à se servir pour défigurer son adversaire. Mais Louis, sans se soucier du danger, attrapa le poignet du garçon et lui tordit le bras en le tirant à lui. Il lui expédia un soubriquet* afin de lui faire échapper le caillou qui était parvenu à lacérer la manche de sa tunique. Sam s’écroula près d’un petit feu, le visage ensanglanté. Baillehache attendit un peu. Lorsqu’il se fut assuré que l’Écossais renonçait à se battre, il dit :
    — Jehanne a choisi. C’est moi qu’elle veut. Remercie ton grand-père d’être en vie, car s’il n’en tenait qu’à moi, je m’empresserais de te faire rejoindre ta cornemuse.
    Comme pour appuyer ces dires, le toit conique de la tour s’effondra à l’intérieur de l’édifice. Ils levèrent les yeux vers le faîte du bâtiment. Des flammes en jaillirent brièvement en ronflant de plus belle et projetèrent des étincelles jusqu’à leurs pieds. Avec cette nouvelle entrée d’air, le reste des structures de bois n’allait pas tarder à se consumer.
    Louis se détourna dans l’intention de s’en retourner au manoir, lorsqu’il s’avisa de la présence des autres qui venaient d’arriver. Tourmentée entre son désir d’aller au-devant de Sam qui était encore à terre et d’attendre Louis qui s’en venait vers eux, Jehanne sut se contrôler. Elle fit ce qui était convenable et ce qu’on s’attendait à la voir faire. Margot et Toinot allèrent s’occuper de Sam, qui voyait tout.
    — Vous êtes blessé, dit Jehanne doucement à Louis.
    — Ce n’est rien.
    — La tour… c’est vous ?
    — Oui. Je l’ai prévenu. Encore une fois.
    — Je… je suis désolée pour Sam. Son comportement me dégoûte.
    Des larmes se mêlèrent au sang sur les joues du jeune Écossais que l’on raccompagnait. Elles y mordirent comme si elles cherchaient à atteindre son cœur. Et son comportement, à Baillehache, qu’en était-il ? Il se rendait subitement compte que l’un valait l’autre. L’avertissement du père Lionel se réalisait. Qu’allait-il bien pouvoir faire pour se racheter aux yeux de celle qu’il aimait ?
    Louis retroussa sa manche. Jehanne détailla l’avant-bras, ses muscles noueux et les fins poils sombres qui n’arrivaient pas à camoufler quelques marques, certaines formant de petits trous à la surface de la peau, d’autres y traçant des lignes blanchâtres. Outre la coupure encore fraîche dont il ne s’inquiétait pas le moins du monde, son avant-bras droit portait une sorte de tatouage rougeâtre figurant une hache. Les yeux de Jehanne

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