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Le marquis des Éperviers

Le marquis des Éperviers

Titel: Le marquis des Éperviers Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Paul Desprat
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nous aider ; puis-je emprunter votre cabriolet jusqu’à ce soir ?
    – Je vous en prie, Hercule ! répliqua celui-ci, mes prières vous accompagnent.
    Le vidame fit atteler en hâte puis, ayant commandé au cocher déjà grimpé en selle de le mener jusqu’à la demi-lune du Cours-la-Reine, il se hissa en voiture.
    Comme son petit équipage allait franchir le porche, dans un crépitement de sabots, il manqua heurter de front le carrosse des Thésut qui finissait de décrire un quart de cercle, le plus large qui soit possible dans l’étroite rue Dauphine, afin de s’engager dans la cour.
    – Que se passe-t-il ? s’écria l’abbé en passant une figure de spectre dans l’encadrement de sa portière, je ne vis plus depuis que j’ai reçu votre message.
    – Victor a disparu, lança le vidame, la prévôté enquête… Je m’en vais à sa recherche. Adieu !
    Relevant sa glace pour se parer du froid vif, il fit un signe aux gens de l’abbé pour qu’ils reculent et leur brûla politesse.
    Arrivé à grand train devant la chapelle des Feuillants, rue Saint-Honoré, Jean-Hercule, après s’être assuré qu’on ne le suivait pas, se pencha jusqu’à mi-corps pour ordonner de piquer droit par le chemin du Roule, et, de là, au pont de Neuilly. Parvenu peu avant midi à Colombes et n’ayant pas eu longtemps à chercher la maison des époux Lheureux, il fit irruption dans leur salle commune en demandant à voir Clémire.
    Cette dernière travaillait pour son frère dans sa chambre baignée d’une lumière satinée de décembre.
    – Clémire ! tu as de la visite, lui annonça la savetière depuis le bas de l’escalier.
    – Madame ! permettez-moi de monter, supplia le visiteur, je serai plus à l’aise, là-haut, pour lui parler.
    La mère Lheureux prit la mine embarrassée qu’ont les personnes affables lorsqu’elles s’apprêtent à élever des objections.
    – Je serai bientôt prêtre, précisa le vidame en dénouant son écharpe pour découvrir son petit collet.
    – Passez, monsieur l’abbé ! bredouilla l’aimable vieille en s’effaçant aussitôt.
    Jean-Hercule se trouva d’un bond à l’étage. Ce fut pour découvrir Clémire, debout, en robe retroussée de drap gris, ses cheveux retombant en rouleaux sur le grand col de Gênes recouvrant ses épaules.
    – Mademoiselle, dit-il, je suis l’abbé de Mériadec, un ami de Victor.
    – Il lui est arrivé malheur ! s’écria-t-elle en se laissant glisser sur une petite chaise de paille.
    – On est sans nouvelles, précisa Hercule, il n’est pas reparu chez son oncle depuis hier midi… Comme il m’avait confié être venu plusieurs fois vous voir et qu’il m’avait entretenu à mots couverts de votre frère engagé dans un procès qui devait se juger justement hier, j’ai pensé qu’il y avait peut-être un lien entre cette affaire et sa disparition.
    Clémire, plus blanche que le givre qui ourlait chaque carreau de la fenêtre donnant jour à son petit bureau, songea enfin à installer son hôte.
    – Tout ce que vous me dites n’est que trop vrai, soupira-t-elle, et je suis effrayée de ce que votre visite me laisse pressentir de funeste… Il suffisait du malheur qui nous poursuit, mon frère et moi… Victor a eu son lot de peines ; il est innocent de celles qui nous accablent.
    – Je vous en prie, mademoiselle, implora Jean-Hercule, si quelque chose est humainement possible pour sauver notre ami, je suis disposé à le tenter mais, pour que je puisse agir utilement, il faut que vous me dévoiliez sur l’heure tout ce que vous savez… Chaque seconde qui passe amenuise nos chances de réussir.
    Clémire, grâce à l’intuition supérieure de son sexe, s’était, dès l’avoir vu paraître, convaincue de la sincérité du compagnon de Victor.
    – Tout ce que je connais, confia-t-elle à mi-voix, tient dans quelques mots. C’est ce que mon frère, qui se défie du bavardage des femmes, m’a parcimonieusement avoué en me faisant frémir… Le duc de Vendôme, son ancien protecteur, vient de jurer sa perte pour des raisons que j’ignore mais que deux personnes pourraient éclaircir pour vous : François Guyot, un jésuite novice, notre ami depuis deux ans, et Victor lui-même, qui a eu le courage de prévenir Brandelis qu’on allait l’arrêter. Ce sont à présent nos uniques soutiens, les seuls en tout cas à qui mon frère ait confié sa misère.
    – Vous disposez désormais d’un troisième bras sur lequel vous

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