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Le marquis des Éperviers

Le marquis des Éperviers

Titel: Le marquis des Éperviers Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Paul Desprat
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d’apprendre que le disparu s’était ouvert à monsieur de Mériadec, notre filleul, que voici, de certaines démarches qu’il devait effectuer au profit d’un mystérieux personnage rencontré cet été au hasard de sa route… D’après ce que je crois comprendre, cet homme serait l’un de ces jongleurs comme il s’en trouve encore de nos jours, capable de couvrir des agissements répréhensibles par des discours plus ou moins bien ficelés sur la réforme de la société… On peut craindre le pire lorsque l’innocence et la jeunesse s’offrent à ces sortes de têtes brûlées.
    – Sauveur ! balbutia madame Davignon à qui la poudre parfumée du fard n’était pas parvenue à rendre des couleurs.
    – Que vous a dit exactement monsieur de Gironde ? demanda Boucher d’Orsay en considérant le vidame debout près du fauteuil de son parrain.
    – Deux phrases, pas plus, un soir lorsque nous parlions dans sa chambre : qu’il avait découvert en venant ici ce brigand au cœur généreux, que celui-ci l’avait chargé de porter deux messages à des personnes habitant Paris.
    – Est-ce absolument tout ? insista le prévôt.
    – Oui, confirma Hercule, en revanche je tiens pour certain qu’il m’a fourni sans le vouloir un indice important. Fin septembre, très peu de temps après être arrivé ici, il a dû aller s’acquitter de sa première mission rue Saint-Sauveur, d’où il est revenu extrêmement troublé.
    – Il y a deux mois, dites-vous… Rue Saint-Sauveur, reprit Boucher d’Orsay en donnant l’impression d’exercer un prodigieux effort sur sa mémoire, il ne s’agit sans doute que d’une coïncidence mais c’est vers ce temps-là qu’a été commis, dans la même rue, un crime demeuré impuni : un marchand de cierges retrouvé dans sa boutique, la nuque brisée, sans qu’aucun vol ait accompagné ce forfait… Je ne négligerai pas ce fait quoiqu’on puisse penser que monsieur de Gironde n’avait a priori aucun motif d’être en relation avec ce boutiquier. Je vais de ce pas conférer de cette affaire avec monsieur Voyer d’Argenson, le lieutenant général de police.
    Il suspendit son discours pour couvrir le conseiller d’un sourire esquissé où l’ironie le disputait à la gravité.
    – Je sais que vous ne l’aimez pas et que c’est pour cela que vous m’avez demandé de venir préférablement à lui… Vous craignez sa dureté et ce n’est pas sans raison non plus que le peuple de Paris, depuis bientôt cinq ans qu’il a remplacé La Reynie, ne le nomme avec épouvante que Perruque Noire ou Juge des Enfers. Cet homme est épris d’ordre comme les jardiniers du roi le sont de symétrie. Il faut dire à sa décharge qu’il a fort à faire après le laisser-aller qu’avait fini par tolérer son prédécesseur vieillissant et qu’il ne sait que trop, lui, que cette ville foisonne de gens sans état qui n’attendent que l’occasion d’entrer dans des crimes et des séditions.
    Pendant que monsieur Davignon était descendu raccompagner le prévôt des marchands jusqu’à son carrosse timbré de la nef de la ville, Jean-Hercule s’était rapproché de sa marraine.
    – Prions ! cher Hercule, prions pour que tout ceci finisse bien, se lamentait celle-ci, que Victor nous revienne vite et que nous le pressions davantage de nos soins…
    Elle fut brusquement interrompue par le grincement de la porte donnant sur le vestibule. C’était Stella, apparue la mine effarouchée, ses cheveux fous collés par mèches à ses joues ruisselantes de pleurs. Elle, qui jamais auparavant n’avait quitté son grenier avant la tombée du jour, courut se jeter contre madame Davignon.
    – Brave cœur ! s’exclama la tante de Victor en la recueillant dans ses bras, il te manque à toi aussi.
    Le vidame, qui avait profité de ce tendre mouvement pour retirer ses doigts de l’étau fiévreux qu’avait improvisé la conseillère en le retenant par une main, s’empara de la capote et de l’épée qu’il avait posées sur une chaise en entrant.
    – Je ne puis demeurer ici inactif, annonça-t-il, fût-ce pour remuer le vent, je cours mener ma propre enquête. Je vous dis : à ce soir… Nous serons deux pour souper, ajouta-t-il en forçant un factice enthousiasme.
    Il sortit en trombe, se précipitant dans l’escalier où il croisa monsieur Davignon qui remontait du vestibule.
    – Parrain ! lui cria-t-il, je pars à la recherche d’une connaissance de Victor qui pourrait peut-être

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