Le nazisme en questions
à l’extérieur comme à l’intérieur du Reich –, la SA attire rapidement de plus en plus de jeunes et d’ouvriers, ce qui lui confère un profil social très différent de celui du parti.
Sous l’effet de la crise économique de 1929, son comportement ne tarde pas à se radicaliser et les tensions entre ses membres et les fonctionnaires du NSDAP (Nationalsozialistische Deutsche Arbeiter Partei : Parti national-socialiste des travailleurs allemands) augmentent. En 1930, un véritable conflit éclate : la SA de Berlin se révolte contre son Gauleiter (chef régional), Joseph Goebbels. Il faudra l’aide de la SS de Berlin pour mater la mutinerie et Hitler lui-même devra intervenirpour ramener de l’ordre. Mais la pression révolutionnaire de ces lansquenets – des déclassés sociaux, victimes de la crise et très hostiles au capitalisme – ne s’affaiblit pas pour autant. Afin de la contenir, Hitler s’efforce de soumettre la SA à une discipline plus stricte et les maintient sous une surveillance constante. Cette dernière tâche incombe à la SS. Elle convient d’ailleurs parfaitement à son nouveau chef (Reichsführer-SS), nommé le 6 janvier 1929, Heinrich Himmler, issu d’une famille de la moyenne bourgeoisie catholique munichoise.
Mais contrôler de près la SA ne suffit pas à garantir qu’elle se tienne tranquille. Il faut lui assigner un nouvel objectif pour canaliser sa soif d’action : d’où l’idée de lui donner un rôle militaire, idée chère à son père spirituel, le capitaine Ernst Röhm. Lorsque ce dernier reprend la tête de l’organisation, en 1931, il agit donc en ce sens, sans qu’aucune promesse formelle soit faite quant à la forme que pourrait prendre plus tard la SA en tant que force armée. Sous l’influence de Röhm et celle de la crise économique – les chômeurs viennent gonfler ses rangs –, la SA se développe d’une manière impressionnante : son effectif atteint sept cent mille hommes à l’automne 1932. Or son comportement ne cesse de se radicaliser. Himmler ne se prive pas d’exploiter les nombreux conflits qui opposent les troupes d’assaut au parti pour les dénigrer et mettre en valeur la discipline de ses cinquante mille SS.
De fait, la SS s’organise alors sur un mode militaire, retrouvant l’idée de la garde prétorienne qui a présidé à sa création. Ainsi, à Munich, cent vingt hommes soigneusement choisis forment la Leibstandarte Adolf Hitler, commandée par Sepp Dietrich, un ancienapprenti-boucher, nazi de la première heure. Dans d’autres villes, des commandos semblables sont créés pour être employés à des tâches quasi policières et semer la terreur dans la population. Ils deviendront les centurions enrégimentés, ou commandos politiques, bases de la troupe de réserve qui donnera plus tard naissance à la SS armée (Waffen-SS).
À côté de la SS générale (Allgemeine-SS) et de la SS armée, apparaît un service chargé plus particulièrement de la sûreté, le Sicherheitsdienst (SD, service de sécurité). Des services de renseignement existaient déjà dans différentes organisations du NSDAP et dans la SA. Et c’est en 1931 que Hitler demande à Himmler d’organiser un service identique dans la SS. Alors qu’il est occupé à cette tâche, ce dernier rencontre par hasard Reinhard Heydrich, un officier de la marine de guerre congédié pour avoir enfreint le code d’honneur, auquel il demande d’esquisser rapidement un plan pour un service secret de la SS, destiné à épurer le NSDAP des saboteurs et des agents infiltrés. Heydrich s’exécute, à la satisfaction de Himmler qui le nommera par la suite à des grades de plus en plus élevés, jusqu’à celui d’Oberführer (général).
Heydrich entre en fonctions le 1 er octobre 1931 pour mettre sur pied ce service secret. À cette fin, il établit un immense fichier. En réalité, il ne se donne pas seulement les moyens de surveiller les adversaires du parti, il espère faire de la SS la police du futur III e Reich, une police capable de contrôler chaque secteur de la société. Cette ambition correspond parfaitement aux idées de Himmler, et c’est grâce à la coopération des deux hommes que naissent les instruments de la stratégie révolutionnaire nazie : la Gestapo (Geheime Staatspolizei : police d’État) et les services spécialisés de la SS.
En 1933, Hermann Göring, commissaire à l’aviation dans le premier gouvernement
Weitere Kostenlose Bücher