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Le Pacte des assassins

Le Pacte des assassins

Titel: Le Pacte des assassins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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manières libres et naturelles des accusés. Tous
avaient bonne apparence. Les prisonniers renoncèrent librement à l’assistance d’un
avocat. Ils auraient pu l’obtenir gratuitement, s’ils l’avaient désirée, mais
ils préférèrent se défendre eux-mêmes. Et si l’on en juge par leurs aveux et
par leur facilité d’élocution, ils n’eurent pas à regretter leur décision. L’accusateur
public, Vychinski, ressemblait à un homme d’affaires anglais intelligent et
plutôt doux… L’exécutif de l’Union soviétique a sans doute fait un très grand
pas vers la suppression des activités contre-révolutionnaires. Mais il n’est
pas moins évident que la justice et le procureur de l’Union soviétique ont fait
un progrès aussi important dans l’estime du monde moderne… »
    Julia ferme les yeux.
    Elle voit Maria Kaminski. Elle entend la
petite fille répéter sans comprendre : « Julia Garelli » aux
carabiniers en faction devant l’ambassade d’Italie.
    Elle imagine le « corbeau noir »
dans lequel on a précipité Vera Kaminski. Celle-ci hurle, se débat. On lui a
arraché Maria.
    Julia pleure silencieusement, la tête appuyée
sur l’épaule de Willy Munzer.

35.
    Julia Garelli a vécu les trois derniers mois
de son séjour à Berlin comme un calvaire, une douloureuse agonie mais où la
résurrection précède la mise en croix.
    C’est elle qui, dans son journal, décrit de
cette étrange manière ce qu’elle a vécu de mai à juillet 1938.
    Elle sait qu’il lui
faut choisir.
    Le général Karl von Kleist lui a fait
comprendre que le Führer n’était pas disposé à répondre aux sollicitations de
Staline.
    Hitler veut que Paris et Londres s’inclinent
devant sa politique de force, reconnaissent les droits des Allemands des
Sudètes. N’ont-ils pas accepté l’Anschluss ? Et l’Autriche est rentrée
dans le Reich allemand. Hitler est sûr que les « démocraties enjuivées »
plieront une fois encore, abandonneront la Tchécoslovaquie plutôt que de
prendre les armes. Les Blum et autres pacifistes craignent par-dessus tout la
guerre. Des entretiens ont déjà commencé avec Mussolini, qui servira d’intermédiaire.
Ces messieurs en fracs s’imagineront que le Reich, après sa réunion avec les
Sudètes, s’enfoncera, selon sa pente naturelle, dans la grande plaine d’Europe
orientale, jusqu’à Varsovie et, au-delà, en Ukraine. Et qu’ainsi le nazisme et
le communisme, l’Allemagne et la Russie s’entretueront pour le plus grand
profit de la City de Londres !
    Après avoir expliqué la partie de poker qui va
s’engager, Karl von Kleist a conclu que c’est à ce moment-là, quand les
démocraties auront capitulé, livré la Tchécoslovaquie, qu’il faudra abattre les
cartes.
    — Vous reviendrez dans un an, a-t-il dit
à Julia.
    Puis il a claqué les talons et elle n’a plus
été invitée aux réceptions de la chancellerie.
    Mais elle a en revanche été convoquée à l’ambassade
russe.
    Lorsqu’elle lui a
fait part du rendez-vous qu’elle avait pris avec Alexandre Meskine, Willy
Munzer l’a adjurée de ne pas s’y rendre.
    On pouvait la retenir, l’assassiner sur place,
faire disparaître son corps dans les chaudières du bâtiment.
    Elle devait quitter Berlin au plus vite, gagner
Bruxelles, où se trouvait Thaddeus Rosenwald, ou bien Paris. Elle pourrait y
rencontrer un écrivain anglais, Arthur Orwett, que Munzer avait connu en
Espagne.
    Autrefois, Orwett avait cru à la fable de la
révolution mondiale. Sans jamais être communiste, il avait travaillé pour le
Komintern. Munzer avait toute confiance en lui. Orwett la ferait entrer en
Angleterre.
    Il pourrait publier dans l’un des journaux
auxquels il collaborait ce que Julia jugerait bon de lui révéler. Elle était un
témoin capital. Elle avait rencontré Lénine, Staline, Hitler. La notoriété qu’elle
y gagnerait la protégerait, et les services secrets britanniques, les meilleurs
du monde, veilleraient sur elle.
    Mais se rendre à l’ambassade soviétique et
rentrer à Moscou relevait du suicide.
    Julia écrit dans son journal :
    « J’écoute
Willy Munzer.
    Je sais qu’il a raison, mais je ne peux me
résoudre à rompre avec tout ce qui a fait ma vie, et à payer ma liberté avec la
mort de Heinz Knepper qu’on tuera à l’instant même où je me rebellerai.
    Mais je suis déchirée, j’agonise.
    Lorsque j’ai prononcé devant Munzer le nom de
Heinz Knepper, il m’a prise

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