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Le Pacte des assassins

Le Pacte des assassins

Titel: Le Pacte des assassins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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traître, avait-il conclu.
    Qu’avait-il subi durant cette nuit ? Qui
avait-on menacé de torturer : son épouse, son enfant ?
    Munzer avait rapporté les commentaires du
Grand Paranoïaque sur les condamnations à mort de ceux qui l’avaient pourtant
aveuglément servi :
    « Ils ont été jetés hors de leurs
chancelleries comme des vieilleries hors d’usage, avait-il dit. Le peuple
soviétique n’a qu’à remuer le petit doigt pour qu’ils disparaissent sans
laisser de traces. Le peuple soviétique approuve l’anéantissement de cette
bande et passe à l’ordre du jour ! »
    —  Ils sont fous !,
avait répété Willy Munzer.
    Julia s’était
récriée. Munzer connaissait comme elle et les victimes et les bourreaux. Ces
derniers – tels Iagoda et bientôt Iejov – devenaient à leur tour des coupables,
ce sont eux qui subissaient à leur tour la torture, eux qu’on condamnait au
suprême châtiment, et certains, comme Ordjonikidze, qui avaient été
responsables de la terreur, qui avaient ordonné l’exécution de dizaines de
milliers d’innocents, la déportation de milliers de suspects ou de simples
paysans qui tenaient à leur terre, se suicidaient.
    — Non, ils ne sont pas fous, avait-elle
murmuré dans l’allée déserte du parc de Potsdam qu’embrasait le soleil couchant
de ce mois d’avril 1938.
    Elle avait empoigné les revers de la veste de
Willy Munzer :
    — C’est une meute que nous avons vu se
constituer, avait-elle repris. C’est nous qui l’avons rassemblée, nous en avons
fait partie, tu l’as servie et je la sers encore. Nous avons accepté dès 1918
les exécutions sommaires, la répression de la révolte des marins de Kronstadt, les
massacres. Nous n’étions pas fous. Ils ne sont pas fous. Nous avons voulu le
pouvoir, nous avons accepté de tuer pour le conquérir, le conserver. Souviens-toi,
Willy, souviens-toi !
    Elle avait continué alors qu’ils étaient
sortis du parc, qu’ils marchaient dans les rues de Potsdam, puisqu’elle
acceptait de passer la nuit avec Willy Munzer, non pas pour épuiser dans l’étreinte
cette colère, ce désespoir et cette angoisse qui l’habitaient, mais pour parler
jusqu’à l’aube, s’interroger sur ce qu’il fallait faire pour tenter de mettre
fin au règne de cette bande de criminels, en finir avec le système qu’ils
avaient mis en place, dont les ramifications, comme des racines vénéneuses, s’infiltraient
dans tous les pays.
    Elle avait lu l’interview
qu’avait donnée Alfred Berger à L’Humanité à son retour de Moscou où il
avait assisté au procès – à « l’anéantissement », disait-il, reprenant
le mot de celui qu’il appelait « la Pensée et la Voix du prolétariat
mondial » – de la clique contre-révolutionnaire.
    Berger évoquait la « Grande Révolution
française » qui avait su elle aussi châtier les traîtres, ce qui lui avait
permis de remporter les victoires de Valmy, de Jemmapes, de Fleuras. Et si la
Commune de Paris avait osé, dès le mois de mars 1871, instaurer la « dictature
du prolétariat », elle aurait été victorieuse, mais elle s’était elle-même
liée les mains, n’osant pas même s’emparer de l’or de la Banque de France !
    « Pas de pitié pour les traîtres, les
espions à la solde du fascisme ! », concluait Alfred Berger.
    Si le dégoût ne l’avait
pas emporté, il aurait fallu rire aux éclats, car Julia était à Berlin pour
faire comprendre aux dirigeants nazis que « le Loup de Kountsevo », le
« Guide du prolétariat mondial », le « Visage de l’antifascisme »
était prêt à conclure un pacte avec Hitler !
    Et c’était elle, Julia, qui, avec quelques
autres, devait transmettre ce message au Führer !
    Willy Munzer parlait de folie alors qu’il s’agissait
bel et bien d’une stratégie politique cynique qui ne trompait que ceux qui
voulaient l’être : les complices de la bande criminelle qui régnait à
Moscou.
    Willy avait souri. Il lui avait enveloppé l’épaule
de son bras.
    Elle parlait comme le procureur Vychinski !,
avait-il dit.
    Munzer avait lu à Julia le témoignage d’un
juriste anglais, avocat de la Couronne, qu’il avait autrefois rencontré et qui
était, comme on disait, « compagnon de route » des communistes, antinazi,
etc. Ce spécialiste du droit écrivait, après avoir assisté à l’un des procès :
    « La première chose qui m’impressionna en
tant que juriste, c’était les

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