Le pays des grottes sacrées
commença par extraire les deux pointes
de silex restées dans la chair de l’animal. Celle qui s’était plantée dans l’arrière-train
était intacte, il suffirait d’en laver le sang, mais l’autre avait l’extrémité
brisée. Il faudrait la retailler et Jondalar le ferait bien mieux qu’elle,
pensa Ayla.
Avec le couteau neuf qu’il lui
avait récemment offert, elle sectionna les parties génitales du carcajou et,
partant de l’anus, coupa en direction du ventre, s’arrêtant juste avant la
glande à sécrétion nauséabonde. Pour marquer leur territoire, les gloutons
s’accroupissaient au-dessus d’un rondin ou d’un buisson et le frottaient avec
la substance produite par cette glande, qui pouvait gâcher une fourrure :
impossible de porter autour du visage des poils imprégnés d’une odeur presque
aussi forte que celle d’une moufette.
Écartant la peau pour éviter de
percer le ventre et de toucher les intestins, Ayla cisailla autour de la
glande, tâta de la main avec précaution, passa le couteau dessous et la coupa.
Elle allait la jeter en direction des bois quand elle songea que Loup en
décèlerait l’odeur et viendrait la prendre, ce qui risquait d’empuantir aussi
son pelage. Elle prit délicatement la glande entre ses doigts, retourna à
l’endroit où elle avait abattu le glouton, repéra une branche fourchue et la
posa dessus. De retour près du carcajou, elle finit d’inciser la peau jusqu’à
la gorge.
Elle revint ensuite à l’anus et
enfonça son couteau à la fois dans la peau et la chair. Lorsqu’elle parvint à
l’ilion, elle chercha le bord situé entre côté droit et côté gauche et
sectionna le muscle jusqu’à l’os. Puis elle écarta les pattes de l’animal en
forçant, chercha de nouveau le bon endroit, accentua encore sa pression et
cassa l’os, coupant légèrement la membrane de l’abdomen. Après avoir élargi
l’ouverture, elle put prélever l’intestin et le reste des entrailles. Une fois
cette tâche délicate accomplie proprement, elle coupa la chair jusqu’au
sternum.
Un couteau ne suffirait pas pour
briser le sternum. Ayla savait qu’elle avait un petit percuteur dans le sac où
elle rangeait son bol et sa coupe mais elle regarda d’abord autour d’elle pour
trouver quelque chose d’autre. Elle aurait dû prendre la pierre arrondie avant
de commencer à écorcher le glouton mais, un peu déconcentrée, elle avait oublié
de le faire. Elle avait du sang sur les mains et ne voulait pas salir son sac.
Elle vit une pierre dépassant du sol et se servit de son bâton à fouir pour la
dégager mais elle se révéla trop grosse. Finalement, elle essuya ses mains dans
l’herbe et prit le percuteur dans le sac.
Il lui fallait autre chose
encore. Si elle frappait le dos de la lame de son nouveau couteau de silex avec
une pierre, il s’ébrécherait. Elle avait besoin de quelque chose pour amortir
le choc. Se rappelant alors qu’un bord de la couverture à porter était déchiré,
elle se releva, retourna à l’endroit où Jonayla battait des pieds en tentant
d’attraper Loup. Ayla lui sourit et coupa un morceau de cuir souple du coin
abîmé. De retour près du glouton, elle plaça toute la longueur de la lame de
silex sur le sternum, la recouvrit du morceau de cuir, ramassa le percuteur et
frappa. Le couteau fit une entaille mais ne brisa pas l’os. Ayla frappa une
deuxième et une troisième fois avant de sentir l’os céder. Lorsque le sternum
fut ouvert, elle prolongea l’incision jusqu’à la gorge pour dégager la trachée.
Après avoir écarté la cage
thoracique, elle libéra des parois le diaphragme séparant la poitrine du
ventre. Saisissant la trachée glissante, elle entreprit d’extraire les viscères
en utilisant son couteau pour les décoller de la colonne vertébrale. L’ensemble
des organes internes reliés entre eux roula sur le sol. Ayla retourna la
carcasse pour la laisser se vider.
La procédure était
essentiellement la même pour tout animal, petit ou grand. Si sa chair devait
être mangée, l’étape suivante consistait à la rafraîchir le plus rapidement
possible en la rinçant à l’eau froide ou, si c’était en hiver, en la posant sur
la neige. De nombreux organes internes d’herbivores comme le bison, l’aurochs,
le cerf, le mammouth ou le rhinocéros étaient comestibles et savoureux – le
foie, le cœur, les reins – et d’autres parties avaient une autre
utilisation. On se servait
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