Le pays des grottes sacrées
silex ?
— Cela n’a rien à voir,
répondit-il. Bien sûr que les femmes le peuvent. Lorsque je vivais avec Dalanar
et que j’étais son apprenti, il formait en même temps ma cousine proche,
Joplaya. C’était à qui serait le meilleur. Quand j’étais jeune, je ne l’aurais
jamais reconnu, mais je n’hésite pas à déclarer maintenant que sur certains
aspects elle me surpasse. Seulement, je ne sais pas où cette jeune femme
dormirait. Je ne peux pas la mettre avec les trois garçons. Nous pourrions la
prendre chez nous, mais elle aurait besoin de place pour ranger ses outils et
les éclats de silex sont tranchants. Ayla est très contrariée si elle en trouve
un accroché à mes vêtements quand je rentre. Elle s’inquiète pour Jonayla et je
la comprends. Si j’acceptais ta demande, nous devrions construire une annexe au
logement des apprentis, ou une habitation séparée.
Kareja retrouva immédiatement son
calme. L’argument de l’intimité nécessaire à la jeune fille de la Onzième
Caverne était tout à fait sensé. Elle aurait dû savoir qu’avec pour compagne
Ayla, une femme qui était bonne à la chasse en plus d’être acolyte de la
Première, Jondalar ne pouvait pas partager le point de vue ridicule de l’homme
de l’Ouest. De plus, la mère de Jondalar avait été chef. Mais il a soulevé un
vrai problème, songea la grande femme mince.
— Une habitation séparée
serait préférable, convint-elle. La Onzième aidera à la construire, et si tu me
dis où tu la veux nous pourrions le faire pendant votre Voyage…
— Attends un peu !
s’exclama Jondalar, sidéré par la rapidité avec laquelle Kareja avait pris les
choses en main.
La Première retint un sourire et
coula un regard à Ayla, qui semblait amusée, elle aussi.
— Je n’ai pas dit que je la
prenais, poursuivit Jondalar. Je demande toujours à ceux qui veulent être mes
apprentis de faire un essai. Je ne sais même pas qui est cette fille.
— Tu la connais, c’est
Norava, répondit Kareja. Je vous ai vus travailler ensemble, l’été dernier.
Jondalar se détendit et sourit.
— Oui, je la connais, et je
crois qu’elle ferait une excellente apprentie. Lorsque nous chassions
l’aurochs, l’année dernière, elle avait cassé deux pointes de sagaie et elle
était en train de les retailler quand je suis passé près d’elle. Je me suis
arrêté pour la regarder faire, elle m’a demandé mon aide. Je lui ai montré une
ou deux choses et elle a tout de suite compris. Elle apprend vite, elle a de
bonnes mains. Oui, si vous lui construisez un logement, je prendrai Norava
comme apprentie.
19
La plupart des membres des
Cavernes voisines qui n’étaient pas à la Réunion d’Été se trouvaient à la
Neuvième lorsque les voyageurs y parvinrent. Un messager avait annoncé leur
venue et on avait guetté leur arrivée. Un repas les attendait. Des chasseurs
avaient abattu un mégacéros, cerf aux bois gigantesques dont l’envergure
pouvait atteindre plus de douze pieds chez un mâle adulte. On en coupait
souvent les andouillers, destinés à un autre usage, pour garder la base, large
et concave, aussi solide que de l’os. On pouvait s’en servir comme plat ou,
après en avoir aiguisé un bord, comme pelle pour vider un âtre de ses cendres,
creuser un trou dans le sable d’une berge ou dans la neige. Si on lui donnait la
forme adéquate, elle pouvait aussi se transformer en aviron ou en gouvernail
pour faire avancer et diriger les radeaux. Ce gigantesque cerf fournit aussi de
la viande pour les voyageurs affamés, les membres de la Neuvième Caverne et
leurs voisins, avec abondance de restes.
Le lendemain matin, ceux qui
accompagnaient la Première rassemblèrent leurs affaires, dont une partie des
restes de viande, pour le Voyage et couvrirent la courte distance séparant la
Caverne du Gué. Ils traversèrent en pataugeant pour rejoindre le quai en bois
situé en face de l’abri connu sous le nom de Bord de Rivière, la Onzième
Caverne des Zelandonii. Plusieurs radeaux faits de troncs de jeunes arbres,
ébranchés et attachés ensemble, étaient amarrés au quai, simple structure en
bois s’avançant au-dessus de l’eau. Certains étaient prêts à être utilisés,
d’autres en cours de réparation. Ayla remarqua sur la berge les troncs alignés
d’un radeau dans la première phase de fabrication. La partie la plus épaisse
des jeunes arbres constituait l’arrière, les extrémités plus
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