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Le Peuple et le Roi

Le Peuple et le Roi

Titel: Le Peuple et le Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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neuf heures.
     
    Chaleur et outrages.
    On crache au visage du roi. On malmène la reine dont la robe
est déchirée.
    « Allez ma petite belle, on vous en fera voir bien d’autres »,
lance une femme.
    « La reine baisse la tête, presque sur ses genoux. »
     
    Entre Épernay et Dormans, vers sept heures du soir, les
trois commissaires que l’Assemblée nationale a désignés pour ramener le Roi
rejoignent la berline.
    Barnave et Pétion montent avec la famille royale, La Tour
Maubourg s’installe dans l’autre voiture, en compagnie du colonel Mathieu Dumas.
    La foule accueille les commissaires avec ferveur.
    « Je ne puis peindre le respect dont nous fûmes
environnés, dit Pétion. Quel ascendant puissant, me disais-je, a cette
Assemblée ! »
    Barnave s’est installé entre le roi et la reine. Pétion
entre Madame de Tourzel et Madame Élisabeth.
    Il semble à Pétion que la sœur du roi s’abandonne contre lui.
    « Madame Élisabeth serait-elle convenue de sacrifier
son honneur pour me faire perdre le mien ? » se demande-t-il tout en
observant Barnave qui chuchote avec la reine.
    La chaleur est étouffante.
    « Le roi n’a pas voulu sortir de France », répète
Madame Élisabeth.
    « Non, Messieurs, dit le roi en parlant avec volubilité,
je ne sortais pas, je l’ai déclaré, cela est vrai. »
     
    On arrive à Meaux le vendredi 24 juin.
    On repartira pour Paris vers sept heures du matin, le samedi
25 juin.
     
    Louis feuillette son Journal, relit ce qu’il a écrit, jour
après jour, au fil de ces heures qui, et il s’en étonne, ne lui laissent aucun
regret pour lui-même.
    Il souffre pour la reine et les enfants, pour sa sœur et ses
trois gardes du corps, insultés, et pour Madame de Tourzel.
    Il songe à cet homme, sans doute un noble fidèle, égorgé
dans un fossé.
    Il a appris que le comte de Provence a atteint la Belgique
sans encombre.
    Dieu décide du sort qu’il réserve à chacun.
    Louis a noté :
    «  Jeudi 21 juin : départ à minuit de Paris,
arrivé et arrêté à Varennes-en-Argonne, à onze heures du soir.
    22 : Départ de Varennes à cinq ou six heures du’matin,
déjeuner à Sainte-Menehould, arrivé à dix heures à Châlons, y souper et coucher
à l’ancienne Intendance.
    23 : À onze heures et demie on a interrompu la
messe pour presser le départ, déjeuner à Châlons, dîner à Épernay, trouvé les
commissaires de l’Assemblée auprès du port à Buisson, arrivé à onze heures à
Dormans, y souper, dormi trois heures dans un fauteuil.
    24 : Départ de Dormans, à sept heures et demie, dîner
à la Ferté-sous-Jouarre, arrivé à onze heures, à Meaux, souper et coucher à l’Évêché.
    Samedi 25  : Départ de Meaux à six heures et
demie… »
     
    Il ajoutera à cette journée du samedi 25 juin :
« … arrivé à Paris sans s’arrêter. »
     
    Il ne dit rien de la foule immense dans la chaleur, des cris,
du tour de Paris par les « nouveaux boulevards », pour éviter les
manifestations violentes.
    Puis les Champs-Elysées, la place Louis-XV.
    La garde nationale forme la haie, crosse en l’air. Et la
foule crie, quand la reine descend de voiture dans la cour des Tuileries :
« À bas l’Autrichienne. »
    On se précipite pour tenter de s’emparer des trois gardes du
corps habillés en courriers. Les commissaires les arrachent à ces « tigres »
– comme les nomme Barnave – qui déjà, dans la forêt de Bondy, puis à Pantin, ont
voulu prendre la berline d’assaut. Les femmes étaient les plus haineuses, « tigresses »,
qui menaçaient de dépecer la reine, de l’écarteler.
    On a crié : « La bougresse, la putain, elle a beau
nous montrer son enfant, on sait bien qu’il n’est pas de lui. »
    C’est la garde nationale qui les a repoussées, et le fait
encore devant les Tuileries. Mais les soldats n’appliquent pas l’ordre qui a
été donné par l’Assemblée :
    « Quiconque applaudira le roi sera bâtonné, quiconque l’insultera
sera pendu. »
    Mais le roi reste le roi : il n’a été que suspendu.
     
    Dans les appartements royaux, les valets en livrée s’affairent
autour de Louis, font sa toilette.
    « En voyant le roi, écrit Pétion, en le contemplant, jamais
on n’aurait pu deviner tout ce qui venait de se passer ; il était tout
aussi flegme, tout aussi tranquille que si rien n’eût été. Il se mit
sur-le-champ en représentation. »
    À La Fayette qui vient prendre ses ordres, Louis

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