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Le Pont des soupirs

Titel: Le Pont des soupirs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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questions :
    « Comment et pourquoi Dandolo est-il devenu grand inquisiteur d’Etat ? Quand et pourquoi le père de Léonore a-t-il remplacé Foscari dans cette terrible fonction ? Et surtout, puisque le père de Léonore est grand inquisiteur d’Etat, pourquoi n’a-t-il pas employé son pouvoir à ma délivrance ? »
    Et les sourdes angoisses qui lui étreignaient la gorge s’évanouissaient devant cette solution à laquelle il se raccrochait.
    « Léonore, d’un mot, va tout m’expliquer. »
    Lorsqu’il eut enfin traversé un dernier pont et qu’il se trouva dans l’île d’Olivolo, son cœur se mit à battre plus fort. Il continua à s’avancer. Il se trouva tout à coup en présence du mur qui entourait le jardin Dandolo. Il vit la petite porte.
    Deux secondes plus tard, il était dans le jardin.
    Il s’arrêta pour respirer, pour refouler l’émotion des souvenirs réveillés en foule, et il regarda autour de lui.
    Le jardin était désert. Il paraissait abandonné. Une herbe épaisse avait envahi les allées. Les massifs de fleurs disparaissaient sous l’invasion des arbustes sauvages.
    « Qu’est-ce que cela veut dire ? » bégaya Roland.
    Il marcha droit à la maison, oubliant toutes précautions, et frappa rudement.
    « Qui va là ? demanda une voix.
    – Quelqu’un qui apporte une nouvelle importante. »
    La porte s’entrebâilla, maintenue par une chaîne. Une lumière parut. Et dans le limbe de cette lumière, une tête que Roland reconnut aussitôt. C’était un vieux serviteur de Dandolo. « Qui êtes-vous ? demanda-t-il. Comment êtes-vous entré dans le jardin à pareille heure ?
    – Monsieur, dit Roland en joignant les mains, ne me chassez pas. Je suis un proscrit. Je suis entré, il est vrai, dans ce jardin ; mais je ne pouvais faire autrement que j’ai fait sans risquer d’être reconnu. N’aurez-vous pas pitié d’un proscrit ? »
    Le serviteur regarda cet homme qui parlait ainsi d’une voix si douce. Et il vit tant de souffrance sur son visage, une telle loyauté dans ses yeux, qu’il retira la chaîne et ouvrit.
    Roland entra et regarda autour de lui avec émotion.
    « Vous tremblez ! reprit le vieillard, et vous êtes tout pâle. »
    Roland remercia d’un signe de tête. Ses dents claquaient.
    Il se trouvait dans la salle à manger de Dandolo.
    Là, rien n’avait été changé, et il en reconnaissait les moindres détails. Il revoyait des scènes de son passé. Il étouffait. Il se sentait mourir.
    « Asseyez-vous, dit le vieux Philippe, et remettez-vous. Par la vraie croix, nul n’aura l’idée de venir vous chercher en cette maison, je vous le jure. »
    Roland s’assit.
    Le serviteur lui versa un verre de vin qu’il avala d’un trait.
    « Monsieur, je vous remercie de votre bon accueil. Je vais vous dire la vérité. Proscrit, je suis rentré secrètement à Venise pour parler au grand inquisiteur ; on m’a dit que cette maison était la sienne, j’ai attendu la nuit et je suis entré…
    – Mais vous vous êtes trompé ! s’écria le serviteur.
    – Comment ! Cette maison ne serait-elle pas celle de Dandolo ?…
    – Si fait. Cette maison lui appartient. Mais il ne l’habite plus. Et même il n’y vient jamais. Je suis seul ici. Quant au seigneur Dandolo, il habite son palais du Grand-Canal… »
    Roland respira. Dandolo n’habitait plus l’île d’Olivolo. Tout s’expliquait ! Il eut un cri de joie et reprit :
    « Ah ! c’est donc cela que le jardin m’a paru abandonné !… Et depuis quand Dandolo habite-t-il son nouveau palais ?
    – Il y a eu deux ans à la Saint-Jean.
    – Et… sans doute… sa famille habite avec lui…
    – Sa famille ?… Quelle famille ?…
    – On m’avait assuré… qu’il avait… une fille…
    – Ah ! vous voulez parler de la signora Léonore ?…
    – Oui… elle est donc… morte ?…
    – Morte ? s’écria le vieillard. A Dieu ne plaise ! elle est pleine de vie et de beauté !… »
    Roland se mordit les lèvres jusqu’au sang pour étouffer le rugissement de joie infinie qui montait du fond de son cœur.
    A cet instant, le vieillard, d’une voix indifférente, ajouta :
    « La signora Léonore, naturellement, habite le palais de son illustre époux… Holà ! holà ! qu’avez-vous donc ?… »
    Roland s’était relevé d’un bond. Livide, échevelé, flamboyant, il avait saisi le vieux serviteur par les deux épaules et le secouait

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