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Le Pont des soupirs

Titel: Le Pont des soupirs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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sa gorge serrée.
    Elle revint à elle enfin… Alors, elle se releva d’un bond, et s’élança, écumante, à travers son palais, en rugissant :
    « Arrêtez cet homme !… C’est Roland Candiano !… »
    Roland descendait à ce moment les degrés de marbre du palais. Il marcha sans hâte jusqu’à la gondole qui l’attendait et qui s’éloigna rapidement. Lorsque les serviteurs d’Imperia se précipitèrent sur le quai, il avait disparu…
    Imperia rentra dans son appartement où, pendant une heure, elle demeura prostrée. Puis tout à coup elle appela ses femmes et se fit habiller.
    Bientôt sa gondole la déposa devant le palais de Dandolo, et quelques instants plus tard, elle était en présence du Grand Inquisiteur.
    « Je ne sais si vous me reconnaissez, monseigneur, dit-elle : nous ne nous sommes vus qu’une seule fois, il y aura bientôt sept ans… dans une circonstance…
    – Inoubliable, répondit sourdement Dandolo ; et je vous reconnais, madame… La première fois que nous nous sommes vus, c’était dans votre palais où Altieri m’avait entraîné. Il y avait encore avec nous Foscari, aujourd’hui doge, et Bembo, maintenant cardinal-évêque. C’était vers minuit. Roland Candiano venait d’être arrêté, et nous y discutâmes ce que nous devions faire de lui, de son père et de sa mère. Est-ce bien cela, madame ? Un même pacte nous unit !… Et puisque vous voilà, je devine que c’est de ce pacte que vous venez me parler…
    – Oui, monseigneur. Et voici ce que je viens vous dire : Un de ceux qui assistaient à la scène que vous évoquez n’est plus. Il vient d’être tué. »
    Dandolo n’eut pas un geste d’étonnement. Il s’attendait à tout depuis qu’il avait vu Sandrigo.
    « Lequel ?… Qui de nous a été frappé le premier par Roland Candiano ?
    – Celui qui est tombé, c’est Bembo.
    – Comment le savez-vous ?
    – Par Roland Candiano. Il sort de chez moi. »
    Un soupir de découragement gonfla la poitrine du Grand Inquisiteur. Alors Imperia, en quelques mots, raconta la passion de Bembo pour Bianca, l’intervention du secrétaire de l’Arétin, l’enlèvement de la jeune fille, et finalement l’entretien qu’elle avait eu avec l’homme qui s’appelait Jean di Lorenzo.
    « Et maintenant, ajouta-t-elle en terminant, j’ai la conviction que Paolo, secrétaire du poète, Jean di Lorenzo et Roland Candiano sont le même personnage. »
    Dandolo réfléchissait profondément. Il cherchait un jour dans ces ténèbres, un fil pour l’aider à sortir du labyrinthe.
    Cependant Imperia continuait :
    « Voilà le début de Roland : Bembo tué ; ma fille disparue pour toujours, cela, c’est le coup de poignard qu’il me destinait à moi !… Malheureux ! ajouta-t-elle dans un paroxysme de désespoir qui fit frissonner le Grand Inquisiteur. Pourquoi ne m’a-t-il pas tuée aussi ? Mère, j’avais ma raison d’être ! Séparée de mon enfant, il ne me reste qu’à vieillir dans un coin et à me laisser mourir dans le regret et les larmes. Oh ! cet homme est vraiment fort, monsieur, puisqu’il a su pénétrer mon cœur, puisque parmi tant de châtiments, il a choisi pour moi celui qui me frappait jusqu’à l’âme ! Roland Candiano n’est pas mort comme on l’a cru, il est lancé sur nous…
    – Je savais tout cela !
    – Vous le saviez et vous ne m’avez pas prévenue…
    – Soyez tranquille. Toute la police de Venise est sur pied, Roland Candiano sera dans nos mains avant trois jours…
    – Trois jours ! C’est bien long !…
    – Voyons, puisque vous venez de le voir, donnez-moi une description exacte du déguisement qu’il a adopté. Vous dites qu’il se fait appeler Jean di Lorenzo ?…
    – Oui. Et voici son signalement. »
    Imperia, l’esprit tendu, la voix rauque, se mit à dicter, tandis que Dandolo écrivait. Lorsque ce fut fini, la courtisane se leva et se retira. Dans le vestibule, elle se croisa avec un vieillard qui, joyeusement, disait à un valet :
    « Prévenez notre maître que j’ai trouvé un acquéreur pour la maison, et qu’il faut que je lui parle au plus tôt. »
    Imperia, parvenue à sa gondole, donna l’ordre de la ramener chez elle. Puis, comme la gondole se mettait en marche, elle jeta un regard chargé de soupçons sur la maison Dandolo, et changeant tout à coup d’avis, cria :
    « Non ! au palais Altieri !… »
    Avant de suivre Imperia dans la nouvelle démarche

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