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Le porteur de mort

Le porteur de mort

Titel: Le porteur de mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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construisez un bûcher funéraire. Avez-vous déjà aidé à déblayer un champ de bataille ?
    L’homme à la mine sombre acquiesça.
    — Oui, grommela-t-il avant de prendre la gourde de peau attachée au pommeau de sa selle et d’avaler une gorgée de vin.
    Il faillit s’étrangler quand Ranulf, poussant sans hésiter son cheval en avant, pressa la pointe de sa dague contre sa gorge.
    — Sir Hugh est le porte-parole du roi ! déclara Ranulf d’une voix brouillée par la colère. Messire, ne lampez point de vin quand il vous parle !
    Il se pencha et fit tomber la gourde de son interlocuteur.
    — Ni boisson, ni victuailles, rien, jusqu’à ce que Lord Corbett l’autorise ! prévint-il en se haussant sur ses étriers.
    Le capitaine retroussa sa chape et sa main chercha son épée.
    — Faites donc ! railla Ranulf. Tirez-la, Messire, mais moi je ne suis pas un fol sans défense qui s’abrite dans une église abandonnée.
    Robert de Scott renonça à son geste.
    — Combien d’entre vous, cria Ranulf, étaient ici pendant l’assaut ?
    La majorité des hommes levèrent la main.
    — Eh bien, vous avez semé le vent, récoltez donc la tempête. Recueillez les cadavres de ceux que vous avez occis.
    Sans plus tenir compte de Robert de Scott, Ranulf rejoignit son maître sous le petit porche de l’édifice.
    — Une vraie brute, chuchota-t-il. Par Dieu, Sir Hugh, à quoi pensait ce Scrope ? Attaquer, tuer, passe encore, mais abandonner ces défunts...
    — C’est vrai, l’interrompit Corbett en posant la main sur l’épaule de Ranulf. Bel ouvrage, bon et fidèle serviteur, se moqua-t-il, en citant les Évangiles.
    — Sir Hugh ?
    — Tu as raison, Ranulf : pourquoi Scrope les a-t-il laissés là ? Je peux comprendre un acte dû à l’impétuosité, mais ensuite ? L’un des devoirs principaux de l’oeuvre de miséricorde consiste à ensevelir les morts. Même le roi s’y plie, ajouta-t-il non sans ironie.
    Il entraîna son compagnon dans l’église.
    — Malgré nos menaces, ils nous ne nous diront pas la vérité.
    Il fit un signe de la tête.
    — Je pense que Scrope est venu ici non seulement pour châtier, mais aussi pour chercher. Mais quoi ? Je crois que quel que soit l’objet de sa quête, il ne l’a onc trouvé, ce qui explique qu’il ait laissé les dépouilles pour effrayer les curieux.
    Il observa les alentours et siffla doucement.
    — La chapelle des damnés ! Elle porte bien son nom !
    Les murs du bâtiment en ruine étaient couverts de lichen, son sol n’était qu’un ignoble bourbier noir que jonchaient les crottes des goupils, des chauves-souris et celles de tous les animaux sauvages de la forêt. L’air était fétide et délétère. Dehors les soldats s’activaient à présent sous les ordres hurlés par Robert de Scott et Maître Claypole. Les trois prêtres avaient entonné les psaumes des morts. Corbett s’interrompit et écouta les mots redoutables :
    Soyez juste quand vous délivrerez la sentence.
Et sans reproche quand vous jugerez.
Souvenez-vous que je suis né dans le péché.
J’ai été conçu pécheur.
    — C’est exact, c’est exact ! murmura-t-il. Le péché règne dans cette chapelle des damnés, Ranulf. Les fantômes se rassemblent et crient vengeance. Le sang, répandu avant l’heure, réclame le châtiment du Christ !
    Lugubre et ténébreuse, l’église, dépouillée de tous ses meubles, n’était plus qu’une carapace de pierre moisie. La lumière traversant la fenêtre en ogive ne suffisait pas à dissiper l’atmosphère sinistre. Corbett remonta la nef sans se presser et s’arrêta là où avait dû se trouver le jubé.
    — Rien ! constata-t-il en montrant les lieux. Rien du tout, Ranulf ! Pourtant les Frères du Libre Esprit devaient posséder des bagages, des sacs, des paniers.
    — Dérobés par ces coquins, là dehors, suggéra Ranulf. Maître, qu’en est-il ? Que cherchez-vous encore ?
    — Je ne sais.
    Le magistrat entra dans le choeur sombre et leva les yeux vers le petit oriel vide.
    — Je ne sais vraiment pas.
    Il pénétra dans la sacristie, une longue pièce étroite aux murs plâtrés et assez propres. Il gratta le sol crasseux du bout de sa botte et s’avança un peu.
    — Maître ?
    — C’était sans doute le réfectoire des Frères du Libre Esprit.
    Il s’accroupit et fouilla dans les ordures.
    — Regarde, Ranulf, l’empreinte des pieds d’une table, et là, celles d’un banc. Je

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