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Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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férissaient les aciers adverses tenus par le menu fretin navarrais. Il y eut encore un sabotement. Le seigneur au genet chavira, désarçonné par Paindorge qui ne l’épargna point.
    Un rire s’éleva au-dessus des rumeurs : Thierry, lui aussi, pourfendait un homme.
    À défaut de la moindre vertu, Tristan devinait chez son adversaire des qualités de bon guerrier. Prudent et circonspect, il assenait des coups de bûcheron sur cet homme vif, prudent, dont le teint mat devenait olivâtre. Il vit trois ou quatre sicaires sortir des fourrés, entendit les cris aigus de Luciane : «  Garde-toi, Robert ! » auxquels se joignirent les hennissements des chevaux que ne cessaient de titiller les mouvements, les appels, les mouches. Ils s’ébrouaient et sabotaient lourdement les graviers.
    Tristan taillait, estocadait, taillait encore. En vain.
    Une épée surgissait, prompte, devant la sienne, quel que fût le coup assené.
    – Fuis-t’en, maraud, dit-il au Navarrais, sans quoi tu ne mangeras pas, ce soir, le brouet de ton maître !
    L’homme se tenait sur ses gardes. Il para un fendant et répliqua si promptement que Tristan dut reculer contre Malaquin pour soustraire au coup son épaule senestre. Un homme hurla et suscita un rire : Thierry. Un autre cri, un autre ébaudissement : Paindorge.
    – Deux de moins !… Tu ferais mieux de guerpir.
    – C’est toi qui périras… Jamais Francisco Soltero n’a reculé devant un marmouset de ton espèce ! Jamais un caballero…
    –  Pas même Navarrais, mais du fond de l’Espagne !… Un mercenaire de plus pour Charles le Mauvais…
    Reculant d’un pas, Tristan détacha un taillant qui atteignit Soltero de plein fouet. L’homme chut en retenant ses plaintes, sans lâcher son arme, sans perdre son sourire. Le dernier cavalier passa, l’épée levée, pour venger son compère. D’un coup de sa Floberge, Tristan lui entama la moitié de la cuisse. Son visage éclaboussé de sang apeura un jeunet qui voulait le combattre.
    – Au large ! cria-t-il. Partons, compères !
    Mais la vengeance hantait la plupart des esprits. Tristan se vit entouré par quatre hommes : trois épées, une archegaie 323 . Le cercle allait en se rétrécissant, et l’arme d’hast, surtout, devenait menaçante. Comme il allait pousser de l’avant sans s’occuper de rien d’autre que de l’archegaie, une ombre le rejoignit et chargea en même temps que lui avec des cris de fille.
    – Allons, messire, débarrassons-nous de cette maraudaille. À vous les épées, à moi l’archegaie !
    Luciane !
    – Bâtards ! cria-t-elle. Vous allez savoir ce qu’il en coûte de tendre des embûches aux bonnes gens et d’occire un servant de la papalité !… Viens, toi, que je te découse ! Approche !… Où vas-tu ainsi ? À la pêche ?… Avance !… Non ? Alors, c’est moi.
    Une plainte. Le manche de l’arme d’hast s’était rompu ; l’épée de la jouvencelle creusa son chemin dans une poitrine défendue par une simple chemise. Elle rit et Tristan fut consterné par cette joie pourtant licite. S’ils avaient été capturés, c’eût été Luciane la plus malheureuse.
    – À toi, dit-elle… Oui, viens !… Oui, tu vois, une tresse a quitté mon chaperon… Je suis une fille ! Viens !… On va faire la haine tous deux !
    Tristan était trop occupé par deux épées pour surveiller la jouvencelle. « Bon sang ! Elle paraissait si… fragile quand je l’ai vue chez Cobham !… À qui se fier ? » Il entendit un cri de rage. Ses deux ennemis s’enfuirent. Il se détourna.
    Luciane posait un pied sur un homme grognant de fureur impuissante. En vain essayait-il de se relever : de son talon ferré et de son épée, elle le maintenait au sol.
    – Qui vous a envoyés ? demanda Paindorge dont le poignet entaillé sur le dessus saignait abondamment. Charles le Mauvais ? Son frère Philippe ?
    Soulevé sur un coude, l’homme eut une grimace et cracha sur la heuse de Luciane qui le maintenait à terre. Aussitôt le picot de la lame lui perça le cou entre deux veines jugulaires.
    – Je devrais t’occire. La vue de ton sang échauffe le mien.
     
    La face du vaincu s’emperla. Cette donzelle allait-elle exécuter sa menace ? Il était jeune – dix-huit ans. C’était un manant de Normandie qu’un peu d’or et des promesses fallacieuses avaient tiré de la maison paternelle. Tenant l’honneur et la vie des autres pour rien, il s’était fait

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