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Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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miséricorde s’écria Salbris d’une voix rêche. Qu’aurais-je à faire d’un tonsuré ?… Allons, hâtons-nous !… Je suis attendu à Lyon. Après-demain, je repars pour Paris… J’informerai le roi…
    C’était pousser trop loin la confiance en soi ; Mathilde s’ébaudit, mais son rire tintait faux. La population du château s’était éparpillée sur les parois, et l’on eût dit une montre de statues en loques. Ydoine prit en ses mains les rênes des chevaux pour les mener derrière la chapelle.
    – Vous triompherez ! dit-elle à Tristan ahuri de disparaître dans le clapotement des fers et de ses gros sabots. Dieu vous garde !
    Panazol eut un sursaut comme s’il venait d’assister à une trahison. Il tendit son visage au long nez vers Mathilde afin de l’interroger, d’un coup d’œil, sur ce comportement inattendu, mais elle haussa les épaules, prenant en dérision la déconvenue de son sénéchal. Le regard apeuré qu’elle porta sur Salbris disait assez sa désespérance :
    – C’est injuste !… Vous auriez dû enlever votre armure…
    – Et pourquoi pas le reste ? ironisa Salbris. Es-tu prêt, Castelreng ?
    Tristan considéra cet homme avec une attention forcenée, comme s’il le voyait pour l’avant-dernière fois : la dernière serait quand ils se trouveraient face à face, à cent pas l’un de l’autre.
    – Je suis prêt.
    « J’ai bu, rompu le pain aux côtés de cet homme. Nous avons chevauché talon contre talon, et sans qu’il fût mon ami, je l’avais en respect. Jamais je n’aurais pu penser qu’il me traiterait comme il le fit à Brignais et à Lyon, et qu’il voudrait ma mort avec acharnement… Vais-je trépasser ? Dire que nous sommes allés ensemble en Bourgogne !… Il faisait tout pour se faire apprécier de Tancarville… et d’un hutin que je trouvais désagréable, Fouquant d’Archiac… Ah ! Celui-là. Il n’y avait point, parmi nous, de rioteux 77 pire que lui… Je l’avais vu, sur le marché de Meaux, chercher querelle à Maingot.
    Maubert… Archiac !… Salbris lui ressemble, sauf sans doute pour les mœurs. Salbris, je vais te faire un trou supplémentaire ! Tu en jouiras mortellement. Quant à moi, il importe que la male chance m’épargne pour que je puisse, bientôt, vivre mes amours vraies… Voilà : nous sommes en place au mitan de la cour. »
    –  Si l’un de vous, dit Panazol, veut duper l’autre, Gondinet et Dumoustier que voici, et qui sont à Montaigny les meilleurs à l’arbalète, lui donneront regret de sa cautelle !
    – Il te plairait que ce soit moi !
    – Oh ! suffoqua Mathilde. Non, mon époux !… Non !
    Tristan frissonna, sentant contre ses épaules couvertes de velours la froideur de la dossière de Salbris. Il installa son arbalète en travers de sa poitrine, la dextre sur la détente, la senestre, paume creuse, soutenant l’arbrier.
    –  Un, deux, commença Mathilde.
    Dans le silence où un cheval hennit brièvement, sa voix tombait comme des gouttes sonores. Quatre, cinq Tristan qui entendait les froissements des plates de l’armure et le grésillement des solerets 78 s’efforçai d’allonger ses foulées. « La pointe du vireton juste au pli de l’aisselle… Je te tuerai Salbris… Tu ne pourras me décrier auprès du roi et de son fils ! » Neuf, dix « La mort pour moi aussi, peut-être Dieu nous juge… » Onze. « Plus tard, je veux et dois me justifier… Mathilde se réjouit de nous voir ainsi… Elle mouille autant qu’au lit… Jour de sang pour elle… Et pour moi ? » Quinze, seize. « Si je n’avais pas connu Oriabel, j’aurais pu sûrement m’accommoder d’elle et de Montaigny. » Vingt, vingt et un. « Elle aime ça… C’est une qualité dans le mariage. » Vingt-cinq, vingt-six. « Une qualité qu’elle dilapide sans remords avec moi comme avec les autres, mais avec plus de joie puisque je ne la maltraite pas ! » Vingt-neuf. « Si je vis, je fuirai… Pas tout de suite, car elle est soupçonneuse, mais lorsqu’elle me croira fortement attaché à elle. » Trente-deux, trente-trois. « Je dois supplanter Panazol au commandement du château. » Murs gris ; la mort ou la vie ? Blessure ou pas ? Qui lâcherait son carreau avant l’autre ?… Mollesse due à un premier jour de chevauchée… Trente-cinq. Qu’était devenu son Noiraud ? Sa Floberge se trouvait-elle en de bonnes mains ? Trente-huit. Mathilde n’avait ni

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