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Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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entalenté aux armes et aux solas 76 mortels ; davantage sans doute, que dans ceux auxquels tu me convies depuis notre mariage… Tu vois, ce jour d’hui, le sang va couler de toutes parts…
    Tandis qu’il sentait sur son avant-bras la crispation d’une main de noyée, Mathilde se détourna comme si cette évocation la rendait subitement pudique.
    – Je t’aime… Tu m’appartiens, Tristan…
    Était-ce bien le lieu et le moment de revenir sur cette servitude ?
    – Soit, dit-il, faisant face à Salbris. Conserve ton armure et finissons-en.
    « Chargé de fer comme il est, son pas sera pesant, petit… Je m’efforcerai de faire de grandes enjambées. Je dois l’atteindre avant qu’il ne lâche son trait… Je ne sais encore comment, mais ce dont je suis sûr, c’est que l’habileté n’est rien sans la vélocité. »
    –  Il vous faut, dit Panazol, échauffé par sa soudaine importance, il vous faut, messires, examiner l’un et l’autre, et de fort près, votre arbalète.
    – Elles sont en bon état, dit le plus jeune des cranequiniers.
    Seize ans, glabre encore, il bourgeonnait au nez, aux joues et certainement au front, couvert jusqu’aux sourcils par sa trop grande barbute. Sur le plastron de son pourpoint, ses manches et ses chausses, une éruption de bossettes complétait son aspect boutonneux, ajoutant à sa laideur quelque chose de malsain.
    – Jean a raison, dit un autre arbalétrier. Ces armes portent loin et juste, et les cranequins (433) sont neufs. Aussi vrai que mon nom est Paindorge.
    C’étaient des armes simples, courtes, dont l’arc se composait d’un assemblage de lames de corne, et la corde de boyaux tressés. Leur arbrier de frêne, droit, légèrement effilé à l’arrière, devait se manier aisément. Le disque de la noix qui maintenait l’arc tendu était en os ; la gouttière où placer les carreaux profonde et soigneusement ointe de graisse. En arrière de la noix se trouvait un ressort qui pressait légèrement l’extrémité du trait dans la rainure et permettait d’incliner l’arme sans que le carreau pût tomber. Le cranequin semblait effectivement neuf ; celui qu’examinait Salbris l’était aussi.
    – Cela vous convient-il, messire ?
    Interpellé par Panazol, Salbris eut un froncement des narines comme s’il reniflait l’odeur du rustique, et soupesant l’arbalète à deux mains :
    – C’est une arme de manant.
    Il se souciait peu, lui qui aimait les hommes, d’offenser les siens et ceux de Montaigny. Tous étaient d’ailleurs trop excités par cette joute inaccoutumée pour s’offenser d’une plate sentence. Le picquenaire barbu partit rassurer son cheval qui semblait flairer le sang.
    – Les viretons, demanda Panazol. Bien sûr, si aucun de vous n’atteint l’autre, vous recommencerez.
    Il avait décidément pris les devants pour conduire l’affaire à son terme fatal. Le nommé Jean s’empressa de se défaire du pavois suspendu dans son dos et vida sa couire dessus. Elle ne contenait que des viretons courts, en bon frêne, avec une empenne de basane trempée dans une colle de poisson afin d’en durcir les ailettes. Leur fer pyramidal avait des arêtes tranchantes et une pointe aussi acérée qu’un aiguillon.
    – Arme-moi ça, enjoignit Salbris au picquenaire qui, laissant son cheval à Ydoine soudainement apparue, s’était approché à pas lents.
    Jean dégrafa le cric qu’il portait à la ceinture et tendit à son compagnon. Tandis qu’il engageait les branches de la grande fourche de fer dans les tourillons de l’arbalète, Tristan, souriant de son application, saisit l’arme que Panazol lui tendait avec un respect tellement exagéré qu’il puait la provocation. Il l’inspecta minutieusement et grommela en souriant un peu :
    – Je vais te décevoir, sénéchal… car je vais vivre…, et jusqu’à ce que j’en parte, tu regarderas chaque nuit le donjon en imaginant ce que j’y fais à ta place…
    Ils échangèrent un regard signifiant que c’en était fini des simagrées. Ils se trouvaient désormais en état de guerre ouverte. Tous les coups seraient permis.
    – Où nous affrontons-nous ? demanda Tristan.
    – Dans cette cour, dit Salbris. Elle a, dans la longueur, plus de cinquante pas.
    « Tu commets une faute ! Tu chancelleras sur pavement disjoint ! »
    –  Montaigny, dit Mathilde, aussi grise qu’une hostie, a perdu l’an passé son chapelain.
    – Dieu nous voit et je crois en Sa

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