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Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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son détriment le cœur de son époux avec une autre l’indignait sans qu’elle se rassurât en se disant qu’Oriabel était loin, morte peut-être, et qu’il était à sa merci. Elle eût aimé disposer du pouvoir d’effacer tout ce qui avait précédé leur arrivée à Montaigny – sauf leur mariage. Cauteleuse, subtile, d’une constance de tigresse à l’affût, elle attendait qu’il commît cette faute grave, im pardonnable, de la fuite. Elle le ferait mourir dans des souffrances qui, elles aussi, la combleraient d’émoi de la tête à la vulve.
    Il en venait à souhaiter, parfois, que Naudon de Bagerant, le Petit-Meschin et quelques centaines de Tard-Venus prissent d’assaut Montaigny pour l’en libérer, dût-il, ensuite, retomber sous leur coupe.
    – Jusqu’au dernier de ses cheveux, jusqu’au dernier de ses poils, j’extirperai cette pute de ton cerveau !
    Voire. Il ne cesserait de comparer la jeune à la « vieille », la femme de sa vie à celle de sa mort lente. Plus son existence s’assombrissait, plus Oriabel étincelait dans sa mémoire. Plus Mathilde affirmait son règne, mieux il corporifiait cette jouvencelle énamourée qui, capable d’allier tant de beauté à tant de séduction, refusait de disparaître de son cœur et de s’enténébrer dans sa mémoire – ce que la dame de Montaigny, perspicace, n’ignorait point. « Tu penses à elle », lui reprochait-elle fréquemment, même lorsqu’ils s’accouplaient, elle affamée, et lui livré aux affres écœurantes de la satiété.
    Pour le moment, elle lui montrait son dos et contemplait ses faux-visages. Quelque effort qu’elle entreprît, elle ne parviendrait jamais à résoudre l’énigme des amours inextinguibles d’un chevalier et d’une vacelle, d’un hobereau et d’une roturière.
    – J’y userai mon temps et ma patience, mais je finirai bien par te guérir de cette improbité qui me déshonore et qui infecte notre vie !
    Elle confondait le remède et le poison comme elle confondait l’amour et la luxure. Doucereuse ou furibonde, son impudicité ne parviendrait jamais à exclure d’une âme en peine ni la mélancolie d’une existence claustrale ni l’amertume de simulacres exténuants ni, surtout, l’affliction des bonheurs évanouis. Jamais elle ne dissoudrait d’un cœur malade les vestiges d’une passion qui relevait certainement d’un miracle et pouvait, un beau jour, renaître d’un second.
    – Tu verras, je triompherai.
    Tristan resta coi : ses silences avaient la singulière propriété d’infliger à la hautaineté de Mathilde, outre l’affront d’un sentiment d’impuissance, un ébahissement sans fin pour la perfection d’une passion que peut-être, jadis, elle avait ardemment souhaitée. Il était probable sinon certain que les souvenances de sa jeunesse, de sa puberté, du premier vertige des sens revenaient inopinément et fréquemment dans sa tête et son corps, alliés à l’affliction du temps révolu. Et sans doute aussi pressentait-elle qu’il y avait dans les fêtes du corps quelque chose de plus voluptueux qu’elle ne le pensait, quelque chose qui exaltait l’âme plus que les entrailles et qui valait d’être éprouvé ; une spiritualité nette, vaste, simple, éperdue, hors des singularité et métaphores sensuelles dont elle était et prodigue et friande ; quelque chose qui, sans doute, était un don divin. Alors, à la rancœur d’être trompée sans qu’il y eût adultère succédait le mésaise, au mésaise l’affliction et à celle-ci la fureur.
    – Tu penses à elle !
    – Par ma foi, c’est bien vous qui m’y faites penser !
    D’un regard, Tristan embrassa la chambre. Il l’avait désormais en horreur. Une horreur qui ne cessait de féconder trois regrets : celui de la cellule de Fontevrault, celui de la geôle bourguignonne d’où Tiercelet l’avait sauvé, celui de la chambre glacée du donjon de Brignais. Maintenant, leur exiguïté, leur sobriété, leur pénombre acquéraient un charme et des dimensions qui le merveillaient sitôt qu’il revivait à grands traits les événements qui l’avaient poussé de l’une à l’autre, infailliblement. Mais pourquoi ?
    – Tu ne sortiras pas, dit Mathilde. Je déteste te voir un visage aussi pâle. Je sais que tu n’es pas malade. D’ailleurs, si tu l’étais, je demanderais à Ydoine…
    Il la laissa patrociner et de tout son cœur, de toute son âme, appela Oriabel à son

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