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Le Prisonnier de Trafalgar

Le Prisonnier de Trafalgar

Titel: Le Prisonnier de Trafalgar Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
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en patois galicien sans susciter le moindre signe d’intérêt, puis il en cloua un exemplaire sur la porte de l’église.  
    Un peu avant de lever le camp, deux soldats escortèrent Nat et Hazembat chez Irma pour qu’ils y récupèrent leur fardage. Hazembat prit le petit Manœl par les épaules.  
    — Ecoute, garçon, dit-il, ce bateau avec lequel nous sommes venus, tâche de le cacher au fond d’une crique. Je te le donne. Plus tard, tu pourras t’en servir et prends-en soin : c’est un bon bateau.  
    Le détachement arriva à Ortigueira dans la nuit. Le village était un peu plus important que Cedeira, mais il avait été récemment dévasté par un raid de guérilleros. Castaneda n’eut presque pas d’auditeurs pour la lecture de sa proclamation.  
    — Maintenant, dit-il à Hazembat, nous allons nous diriger vers Lugo en passant par Cabreiros. Notre colonel, le comte de Campina, doit se trouver par là avec le gros des troupes.  
    La longue marche sur les sentiers de montagne était pénible. Jour après jour, on s’enfonçait à l’intérieur des terres, mais Hazembat n’éprouvait pas cette angoisse que lui donnait en général l’éloignement de la mer.  
    Comme au temps où il allait de Saint-Jacques-de-Compostelle à Bilbao avec les Basques de Don Gorka, il avait l’impression de naviguer sur un océan immobile. On aurait dit que les crêtes qui se succédaient à perte de vue étaient les vagues d’une mer figée.  
    Toujours grave et silencieux, Nat s’adaptait extraordinairement bien aux difficultés du chemin. Les hommes du détachement avaient fini par l’adopter comme un des leurs et il commençait à baragouiner un mélange de galicien et de castillan. Il s’acquit une considération particulière quand les soldats tuèrent une vache efflanquée, perdue dans la montagne. Ils se gorgèrent de viande et s’apprêtaient à laisser les restes de la carcasse aux charognards quand Nat leur montra comment on pouvait faire sécher les bouts de maigre qui adhéraient encore aux os, les réduire en grains avec un peu de gras et obtenir ainsi une nourriture qui pouvait durer des semaines.  
    Cela se passait dans la montagne au sud de Lugo et l’automne était déjà avancé. A Lugo, les soldats avaient trouvé une ville en état de siège, aux mains d’une milice locale bien décidée à résister aux assauts des Français. L’armée de Galice avait déjà fait mouvement vers le sud-est et le mot d’ordre était de rejoindre le gros des troupes à Pampliega, devant Burgos. Castaneda examina la carte grossière que lui avait remise Valcalde de Lugo.  
    — Presque cent lieues ! grogna-t-il. Une fois la montagne franchie, il nous faudra des semaines pour y arriver et, si l’hiver nous prend en route, peut-être des mois !  
    On était déjà en octobre et la bise se faisait glaciale. Il y eut de la neige au col de Cabrero, à la frontière du Léon, et la troupe se trouva bloquée une semaine dans une cabane de berger. C’est là que le pemmican de Nat se révéla providentiel.  
    Puis le temps se leva et Castaneda conduisit prudemment ses hommes sur les pentes verdoyantes du Bierzo. Trois fois, ils rencontrèrent des bandes d’irréguliers qui pillaient les villages, mais c’étaient de petits groupes faméliques qui fuyaient le contact des soldats.  
    Inlassablement, Castaneda lisait sa proclamation dans tous les villages, plus ou moins bien accueilli, parfois hué ou couvert d’injures par le curé. Çà et là, il recueillait des informations. On disait que Wellington avait fait retraite devant Burgos et que les Français poussaient des pointes de plus en plus audacieuses vers le sud et l’ouest. Certains prétendaient même qu’on avait vu des patrouil les de hussards et de chasseurs impériaux entre Palencia et Léon. C’était une étrange guerre où il n’y avait ni front ni territoire conquis : des armées ou des fragments d ’armées se pourchassaient à l’aveuglette dans le labyrinthe des montagnes espagnoles sans qu’il y eût jamais de bataille décisive.  
    Si les Anglais se retiraient de Madrid vers le Portugal, il était probable que l’armée de Galice refluerait vers l’ouest. Castaneda décida de gagner les abords d ’Astorga et d’y prendre ses quartiers d’hiver en attendant les événements. Le détachement s’installa donc en bordure d’un bois, près du village de Santa Colomba de Somoza dont les habitants se montrèrent

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