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Le prix de l'indépendance

Titel: Le prix de l'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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aggravée par l’étroitesse inhabituelle de sa mâchoire supérieure, qui avait contraint ses deux incisives à pousser de biais et vers l’intérieur au point qu’elles se touchaient presque.
    Je touchai l’abcès de l’une de ses molaires supérieures et elle tira brusquement sur les sangles qui l’attachaient au siège, poussant un cri strident qui s’enfonça sous mes ongles comme des échardes de bambou.
    Je me redressai avec l’impression que mes lombaires avaient été pressées dans une enclume. Cela faisait plusieurs heures que je travaillais dans l’imprimerie de Fergus. J’avais un petit bol rempli de dents sanglantes près de mon coude et un public fasciné de l’autre côté de la vitrine.
    — Donne-lui-en encore un peu, Ian.
    Ce dernier, après un son dubitatif très écossais, saisit néanmoins la bouteille de whisky et adressa un sourire encourageant à la petite fille. Celle-ci poussa un nouveau cri de terreur en voyant son visage tatoué puis serra les lèvres. Perdant patience, sa mère la gifla, arracha la bouteille des mains de Ian et, pinçant le nez de sa fille de l’autre main, lui glissa le goulot dans la bouche puis inclina la bouteille.
    L’enfant ouvrit des yeux ronds comme des billes et cracha une explosion de gouttelettes de whisky du coin des lèvres. Elle déglutit néanmoins, son petit cou maigrelet s’agitant convulsivement.
    — Euh… je crois qu’elle en a eu assez, déclarai-je.
    J’étais plutôt alarmée par la quantité d’alcool qu’elle ingurgitait. C’était du très mauvais whisky local. Jamie et Ian, après l’avoir goûté, avaient décrété qu’il ne rendait probablement pas aveugle mais j’avais des doutes.
    La mère examina sa fille d’un œil critique sans pour autant retirer la bouteille.
    — Hmm… fit-elle. Oui, je suppose que ça ira.
    Le regard de l’enfant se révulsa soudain et elle devint toute molle. Sa mère écarta la bouteille, en essuya soigneusement legoulot avec son tablier puis la rendit à Ian en le remerciant d’un signe de tête.
    Je pris le pouls de ma petite patiente et vérifiai sa respiration. Elle semblait en assez bonne santé ; pour le moment…
    Je saisis mes pinces en marmonnant :
    — Carpe diem . Ou devrais-je plutôt dire Carpe vinorum ? Ian, vérifie qu’elle respire.
    Ian se mit à rire et versa un peu de whisky sur un bout de tissu propre.
    — Je crois que vous avez le temps de lui arracher une autre dent, tante Claire. A vrai dire, vous pourriez les lui arracher toutes qu’elle ne broncherait pas.
    Je tournai la tête de l’enfant.
    — C’est une idée. Tu peux approcher le miroir ?
    J’avais cassé un petit morceau de miroir qui me permettait, avec un peu de chance, de diriger la lumière à l’intérieur de la bouche du patient. En travaillant derrière la vitrine, je disposais de lumière naturelle en abondance. Malheureusement, il y avait tellement de curieux se pressant contre la vitre qu’ils nous cachaient le soleil, frustrant les efforts de Ian pour projeter le faisceau là où j’en avais besoin.
    Je repris le pouls de la fillette au cas où, et appelai :
    — Marsali !
    — Oui ?
    Elle sortit de l’arrière-boutique, essuyant ses doigts tachés d’encre sur un torchon.
    — Vous avez encore besoin de Henri-Christian ? Si ça ne dérange personne…
    — Pensez-vous ! Il adore ça, ce petit cabotin. Joanie ! Félicité ! Allez chercher le petit. On a besoin de lui dehors !
    Félicité et Joanie, ou « les chatonnes de Satan » comme les avait surnommées Jamie, ne se firent pas prier. Elles aimaient le numéro de leur petit frère presque autant que lui.
    Joanie ouvrit la porte de la cuisine et lança :
    — Tu viens, Bubbles ?
    Henri-Christian accourut, se dandinant sur ses courtes jambes, radieux, et criant :
    — Hop là ! Hop là ! Hop !
    — Mets-lui son chapeau ! dit Marsali. Il va attraper froid aux oreilles !
    Il faisait beau mais venteux et Henri-Christian était sujet aux otites. Il portait un chapeau en laine noué sous le menton, avec des rayures bleues et blanches et orné d’une rangée de pompons rouges. C’était Brianna qui le lui avait tricoté et de le voir me procura un petit pincement au cœur, mélange de plaisir et de peine.
    Ses sœurs le prirent chacune par une main, Félicité attrapant au passage le chapeau mou de leur père suspendu à une patère afin de faire la manche. Ils furent accueillis à l’extérieur par des hourras et des sifflets. A travers

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