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Le prix du sang

Le prix du sang

Titel: Le prix du sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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n’oserait refuser pareille invitation venant d’une femme aussi belle. J’accepte avec plaisir.
    Un instant plus tard, une main sur sa taille fine, l’autre tenant légèrement ses doigts gantés, il l’entraîna dans un tourbillon.
    â€” Vous êtes courageux de vous porter ainsi volontaire, dit-elle.
    â€” Une qualité inégalement partagée chez les Picard.
    Il lut la tristesse sur son visage, se trouva immédiatement mal à l’aise, puis bredouilla :
    â€” Je vous demande pardon. Sincèrement.
    Le silence s’installa entre eux, lourd. Il continua après une pause :
    â€” Je ne sais pas si je suis courageux. Aucun des volontaires ne le sait vraiment. Nous partirons tous avec l’espoir que le feu ennemi frappera nos camarades, tout en nous épargnant. En ce qui me concerne, je le saurai là-bas. Selon les histoires sans cesse répétées au camp d’entraînement, la bravoure vient le plus souvent de ceux dont on ne l’attendait pas.
    Ã‰lisabeth le regarda un moment dans les yeux, puis souffla :
    â€” Je souhaite de tout mon cœur que les balles vous épargnent. Sincèrement.
    Au terme de la valse, Mathieu préféra s’éclipser discrètement.
    * * *
    La grande maison blanche, rue Hôtel-de-Ville, affichait un air de quiétude identique à celui de l’année précédente. Le village semblait hors du temps. Marie se sentait presque chez elle, confortée par l’accueil de Paul. Même tante Louise paraissait disposée à accepter la présence d’une nouvelle femme dans la vie de son frère cadet. Une veuve dans la maison d’un veuf heurtait bien des convenances, d’autant plus que le chaperon manquait à l’appel. Au moins, Mathieu serait là avant la nuit.
    En fin d’après-midi, Paul avait multiplié les excuses avant de se rendre à une réunion politique. Amélie s’ébattait près du fleuve avec une brochette de cousins et de cousines. L’aînée demeura seule avec la visiteuse.
    â€” J’avais si hâte de le revoir, prononça Françoise.
    Les deux femmes occupaient des fauteuils de rotin placés sur la longue galerie. Marie choisit de mentir un peu, par gentillesse.
    â€” Lui aussi, soyez-en certaine. Il convenait qu’au moins un membre de la famille assiste à ce mariage.
    La jeune fille posa ses yeux gris sur son interlocutrice pour l’amener à répondre à une question muette.
    â€” Personnellement, cela m’était impossible. Mes relations avec mon beau-frère furent… très difficiles.
    â€” … Je comprends.
    Â«Â Jusqu’à quel point? » se demanda la femme. Elle connaissait assez la nature humaine pour se douter que les jeunes filles timides et sages possédaient une ouïe et une sensibilité très fines. Les vicissitudes de l’existence ne présentaient peut-être pas de grands mystères pour elle.
    â€” Comment se déroule votre été? demanda-t-elle, soucieuse de changer de sujet.
    â€” … Bien, sans doute.
    â€” Vous ne paraissez pas certaine.
    Françoise la regarda à nouveau et hésita un moment avant de confier :
    â€” L’été est merveilleux, avec papa et ma sœur dans la maison. Mais je gâche tout en songeant sans cesse à l’automne prochain.
    Elle baissa le regard avant de poursuivre à voix basse :
    â€” Il sera en Europe… et moi seule ici à me torturer d’inquiétude, sans personne à qui en parler. Enfin, tante Louise sera là…
    Ã€ nouveau, elle chercha un appui dans les yeux de son interlocutrice.
    â€” Mais sa présence ne se compare pas à celle de vos proches, je sais. Même Amélie doit faire une confidente agréable.
    â€” C’est vrai. Elle répète les secrets qui n’en sont pas, mais se révèle absolument muette sur les autres.
    Elle marqua une nouvelle pause avant de continuer.
    â€” J’ai beau avoir dévalisé la Librairie Garneau fin juin et rationner mes lectures depuis, je ne pourrai m’occuper l’esprit bien longtemps. Vous savez, l’hiver à Rivière-du-Loup est bien long.
    â€” Je peux facilement imaginer le froid, les grands vents venus du fleuve…
    â€” Puis, papa restera sans doute à Québec toutes les fins de semaine.
    L’affirmation contenait un

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