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Le quatrième cavalier

Le quatrième cavalier

Titel: Le quatrième cavalier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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d’un
bras de mer semé d’oyats. Je voyais déjà la colline au bord de la Pedredan où
nous avions été pris au piège par Ubba et je racontai à Iseult la bataille tout
en perchant. La coque racla la vase par deux fois et je dus regagner de moins
bas-fonds, quand je me rendis compte que la marée descendait rapidement. Alors,
j’attachai la barque à un pieu. Nous traversâmes une vaste étendue de terre
vers la rivière en plein vent, mais nous vîmes tout. Les Danes aussi pouvaient
nous voir. Je n’avais pas ma cotte, mais j’avais pris mes deux épées. Des
hommes apparurent sur la rive opposée et me braillèrent des insultes. Je les
ignorai. Je dénombrai les navires. J’en vis vingt-quatre parmi les restes des
épaves calcinées des navires d’Ubba dépassant du sable comme des côtes noircies.
    — Combien comptes-tu d’hommes ? demandai-je à
Iseult.
    Ne connaissant pas les mots en angle pour les grands nombres,
Iseult ouvrit et ferma six fois les mains.
    — Soixante ? Soixante-dix au plus. Et vingt-quatre
navires. (Elle ne comprit pas où je voulais en venir.) Vingt-quatre navires, cela
fait une armée de… huit cents ? neuf cents soldats ? Donc ces
soixante hommes sont les gardes des navires. Et les autres ? Où sont-ils ?
    Pendant ce temps, cinq Danes tiraient une barque avec l’intention
de traverser et nous capturer, mais je n’avais pas l’intention de rester aussi
longtemps.
    — Les autres, répondis-je à ma propre question, sont
partis piller au sud en laissant leurs femmes. Ils brûlent, massacrent et s’enrichissent.
Ils violent le Defnascir.
    — Ils arrivent, s’alarma Iseult en voyant les hommes
monter dans la barque.
    — Tu veux que je les tue ?
    — Tu le peux ? demanda-t-elle, pleine d’espoir.
    — Non. Partons.
    Nous rebroussâmes chemin dans la vaste étendue de vase et de
sable, tandis que la marée remontait à une vitesse surprenante.
    Les marées sont fortes en Sæfern. Une cabane construite à
marée basse disparaissait sous les vagues lorsqu’elle remontait. Au jusant, des
îles se dressaient à dix mètres au-dessus de l’eau, pour être englouties à
marée haute. Comme Iseult montrait des signes de fatigue, je la pris dans mes
bras pour la porter comme une enfant. Je peinais, j’avais l’impression de
patauger dans une mer infinie, quand soudain, peut-être parce que Hoder, l’aveugle
dieu de la Nuit, m’était favorable, j’aperçus notre barque.
    Je déposai Iseult dedans, m’y hissai à mon tour, coupai l’amarre
et m’écroulai, gelé et effrayé, pour la laisser dériver.
    — Il faut rentrer te réchauffer, me dit Iseult.
    Je regrettai de n’avoir pas emmené le villageois, car j’allais
devoir retrouver mon chemin dans le crépuscule. Iseult s’accroupit auprès de
moi et contempla une colline verte qui se dressait au loin.
    — Eanflæd m’a dit que c’était Avalon, reprit-elle avec
révérence.
    — Avalon ?
    — Là où Arthur est enseveli.
    — Je croyais que pour vous il dormait.
    — Il dort, dit-elle avec ferveur. Dans son tombeau, avec
ses guerriers. (Elle fixa la colline qui semblait luire, prise dans le dernier
rayon solitaire perçant les nuages.) Arthur, chuchota-t-elle. C’était le plus
grand roi qui ait jamais vécu. Il avait une épée magique.
    Et elle me conta qu’il l’avait retirée d’une pierre, pour
mener les plus grands guerriers à la bataille. Moi, je songeai que ses ennemis,
c’était nous, les Saxons. Pourtant, Avalon était en Anglie. Je me demandai si, dans
quelques années, les Saxons, sous le joug des Danes, se souviendraient de leurs
rois perdus et prétendraient qu’ils étaient merveilleux. Iseult chantonna dans
sa langue et m’expliqua que la chanson parlait d’Arthur : il avait posé
une échelle contre la Lune et pris au filet un essaim d’étoiles pour faire une
cape à sa reine Guenièvre. Sa voix glissait sur l’eau sombre, entre les roseaux,
tandis que derrière nous les feux des gardes disparaissaient dans la nuit. Au
loin, un chien hurla, et la pluie qui commençait à tomber fit frissonner la
surface du marais.
    Iseult se tut quand apparut Brant.
    — Il va y avoir une grande bataille, dit-elle doucement.
(Ses paroles me surprirent. Je crus qu’elle pensait encore à Arthur et
imaginait que le roi endormi allait surgir de son tombeau.) Une bataille près d’une
colline, continua-t-elle, et il y aura un cheval blanc, et la colline
ruissellera de sang et les

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