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Le règne des lions

Le règne des lions

Titel: Le règne des lions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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qui s’était remis à pétiller. Le moine était devenu stratège depuis que nous l’avions quitté. Un fin stratège que j’apprécierais, cette fois, de contenter.
     
    *
     
    Planté gaillardement sur son destrier au sommet d’une colline proche de Périgueux, le roi Malcolm d’Ecosse semblait content. Sa face molle et blanche se tournait d’un côté de la plaine à l’autre sans distinguer autre chose que des gens d’armes. Là, c’étaient ceux d’Henri avec leurs lances à pennon et leurs étendards frappés d’un léopard, ici les mercenaires brabançons en rangs serrés, plus loin les chevaliers dont le heaume argenté et le bouclier étincelaient sous le soleil. Il en avait lui-même armé trente parmi ses jeunes vassaux pour la circonstance. Il tourna la tête vers Henri qui avait arrêté son cheval à ses côtés.
    — Vous aviez raison de m’exhorter à la patience. Cette parade était nécessaire pour souder nos couleurs. C’est de surcroît un fort joli spectacle.
    Henri lissa la pointe de sa barbe rousse, l’air satisfait.
    — J’ai appris ce matin que la ville de Cahors s’était ralliée à notre cause. Ses gens marchent déjà sur Toulouse dans l’idée de rejoindre Raymond Trencavel de Carcassonne et le comte de Barcelone. Point n’est besoin de se précipiter. Bien au contraire, montrer notre puissance est le meilleur argument de reddition croyez-le. Vous-même en êtes impressionné mon ami.
    — Je le suis. Je le suis, c’est vrai, admit Malcolm d’Ecosse. Quand partons-nous ?
    — A l’aube, annonça calmement Henri avant de tirer sur le filet pour détourner son cheval de l’à-pic.
    Le roi d’Ecosse s’attarda un instant encore sur cette vision superbe, puis, laissant Raoul de Dicet, un des barons anglo-normands, lever manche pour la disperser, reprit à son tour le chemin pour s’en éloigner.
    Henri mentait. Il avait voulu cette parade pour laisser à Louis le temps d’agir, convaincu par les arguments que je lui avais transmis. Aussi, lorsqu’il parvint en vue des fortifications de Toulouse, fit-il de nouveau immobiliser son armée en prenant prétexte de l’attente de ses alliés. L’après-midi passa. Le lendemain matin, Malcolm d’Ecosse l’exhorta à assiéger la ville, avant de se ranger finalement à son sentiment que cause commune valait mouvement commun et qu’il aurait été déplacé de mécontenter qui que ce soit.
    À midi, alors qu’Henri et Malcolm trompaient leur impatience devant leur tente en une partie d’échecs qu’ombrageait un grand chêne, un messager se présenta. L’homme portait bannière à fleur de lys et bref urgent. S’excusant auprès de son adversaire de partie qui se demandait s’il devait avancer pion ou cavalier, Henri le déroula sans tarder.
    Son visage se ferma.
    — Sacrebleu, il me coupe l’herbe sous le pied ! rugit-il, faisant sursauter le roi d’Ecosse.
    Et d’aussitôt lui brandir le parchemin sous le nez.
    — Il est dans la place. Le roi de France est dans la place. Savez-vous ce que cela signifie ?
    — No… non, bafouilla Malcolm, pris de court, son pion entre les doigts.
    Il le garda en voyant choir sur ses genoux pièces et échiquier. Henri avait bondi tel un fauve enragé. Après avoir balayé le plateau de jeu dans un mouvement de colère, il moulinait à présent des bras, rouge d’emportement.
    — Que je ne peux capturer mon propre suzerain. C’est contraire à toutes les coutumes !
    Il posa brusquement ses deux mains à plat sur la table, avança un œil féroce vers Malcolm, exsangue.
    — Vous, vous qui êtes mon vassal par vos possessions anglaises, oseriez-vous assiéger une ville dans laquelle je me trouverais ?
    — Certes non… mais…
    Henri se redressa avec la même brutalité, soulageant aussitôt son vis-à-vis avec qui, quelques années plus tôt, il était encore à guerroyer. Il pointa un index accusateur sur lui.
    — Il n’y a pas de « mais » ! J’ai prêté serment d’allégeance et y resterai lié.
    Il se tourna vers le messager, demeuré immobile et en retrait.
    — Dites au roi de France qu’avant la nuit mon armée se sera retirée. Pour celle des comtes de Barcelone, de Narbonne et de Montpellier, qu’il s’en débrouille lorsqu’elles montreront leur nez.
    Malcolm d’Ecosse demeurait interdit. Il songeait au déploiement des forces, à la belle bataille qu’il allait manquer. Tout autant, il comprenait. Lui-même aurait vu d’un

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