Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le règne du chaos

Le règne du chaos

Titel: Le règne du chaos Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
Vom Netzwerk:
semblait s’être prise d’amitié. Sur un tabouret proche, à la lumière d’une lanterne, Demontaigu lisait une histoire du roi Arthur. La souveraine paraissait de bonne humeur. Elle pria Bertrand de cesser sa lecture pendant que Dunheved et moi lui résumions ce qui s’était dit au dîner chez les Beaumont. Le visage embelli par la lueur du feu, elle nous écouta en souriant à demi.
    — Les Beaumont…
    Elle se rencogna dans sa chaire, les yeux levés vers les poutres noires.
    — Ils sont si ambitieux ! Ils feraient n’importe quoi ! Je me demande parfois pour qui ils penchent.
    — Madame ? m’étonnai-je.
    — Eh bien, ils sont liés par le sang à tous les souverains d’Europe. Les renseignements, les commérages qu’ils récoltent sur la cour d’Angleterre sont-ils rapportés à mon père, au pape en Avignon, en fait à quiconque veut les acheter ? Ils trempent dans tout ; mais ce qu’ils disent est exact.
    Son sourire s’évanouit.
    — Je ne peux rester ici plus longtemps. Si les routes du Sud sont périlleuses, peut-être est-il temps que nous nous embarquions.
    — Votre Grâce, riposta Dunheved, le printemps est très avancé. La mer est forte, pleine de dangers. Je vous supplie de patienter. Le roi va, à n’en pas douter, envoyer bientôt des messagers.
    — Vraiment ?
    Isabelle s’agita et fit signe à Demontaigu.
    — Reprenez votre lecture. Il est agréable d’entendre comment les choses devraient être plutôt que ce qu’elles sont. Vous avez une belle voix ; relisez le passage sur le chevalier qui arrive à la cour d’Arthur et qui défie à la joute n’importe lequel de ses paladins.
    Elle serra ses mains l’une contre l’autre.
    — Ne serait-il pas plaisant d’être de retour à Sheen, à Windsor ou à Westminster, d’attendre le soleil, de sortir dans les champs, de voir tomber la nuit ?
    Sa voix se chargea d’amertume.
    — Au lieu de cela nous sommes comme les lapins dans la garenne, détalant dès qu’ils voient l’ombre d’un faucon. Lord Henry Beaumont a raison. Il faut en finir, mais comment et quand, je ne peux le préciser. Mathilde, restez si vous voulez ; sinon…
    Je m’inclinai et me retirai. J’avais beaucoup bu au festin des Beaumont, aussi désirais-je me coucher de bonne heure.
    Le lendemain matin, je fus réveillée par un coup retentissant à la porte. Demontaigu, sur le seuil, une cape sur les épaules, bouclait son ceinturon.
    — Venez, Mathilde, venez. Il y a du tumulte autour du corps de garde. Le bruit court qu’Alexandre de Lisbonne et ses Noctales sont sur le départ.
    — Bon vent, répliquai-je. À quoi servent-ils ici ?
    — Allons, Mathilde, s’il vous plaît !
    Je refermai la porte, m’habillai en toute hâte, chaussai une paire de grossières bottes de cuir et m’enveloppai d’une mante. J’expliquai de quoi il retournait à l’un des écuyers de la reine et emboîtai le pas à Bertrand à travers la basse-cour noyée de brume vers la barbacane et le vaste corps de garde où Lisbonne et ses suppôts de Satan attendaient dans leurs livrées noires, pavillons flottant au vent, au milieu des aboiements des chiens. Il y avait foule dans la grande cour. On avait attaché sur des poneys de bât des sacoches, des coffres et des futailles. Je regardai ces hommes, cette légion de démons qui, pendant ces quatre dernières années, avaient rôdé, porteurs d’un miasme mortel, autour de la Cour. Meute maléfique et ignoble, ils avaient suivi à la trace les malheureux templiers à bout de souffle, commis d’affreux meurtres et s’étaient comportés en seigneurs de l’Enfer. Et voilà qu’ils voulaient quitter les lieux. Le départ de tant de combattants, qui les affaiblirait, consternait le gouverneur et ses sergents de l’arc et de l’épée, surtout au moment où le danger, caché dans le brouillard des landes, se faisait pressant. Alexandre de Lisbonne, tenant d’une main les rênes de son noir destrier au poil luisant, prenait congé d’un geste hautain du gouverneur. Près de lui un soldat déroulait la bannière noir et or des Noctales, indiquant ainsi qu’ils allaient se mettre en selle et partir. Demontaigu et moi nous approchâmes. Lisbonne fit un pas de côté et appela d’un geste une silhouette vêtue de peaux de bêtes, cheveux et barbe en broussaille.
    — Voici mon guide ! cria-t-il au gouverneur. Oswyth de Teesdale. Il dit que le roi et Lord Gaveston avec une armée d’une

Weitere Kostenlose Bücher