Le retour de la mariée
figure de prophète.
— Tout seul, je commençais à m’ennuyer ! lança-t-il si jovialement que personne n’aurait pensé à le plaindre.
Caroline se jeta dans ses bras en balbutiant des mots sans suite, lui baisant les joues, le palpant comme pour vérifier qu’il était bien là.
— Sain et sauf ! Tu es sain et sauf, Ben !
— On peut le dire, reconnut Ben en passant la main dans les cheveux de Will dont les yeux brillaient.
Caroline prit un peu de recul pour le voir tout entier. Dans les yeux bleu pâle de son bienfaiteur, son père adoptif, elle vit passer une lueur de culpabilité qui, d’un coup, lui rappela bien des griefs. A la chaleur de l’enthousiasme succéda celle du ressentiment.
— Je devrais te tuer, Ben Whitaker, pour te punir de tout le mal que tu nous as fait en venant jusqu’ici, à ton âge !
Ben cessa de sourire. Il était tout penaud.
— Je te demande pardon, lumière de ma vie. Je n’aurais jamais dû…
— On peut le dire. Quand je pense à tout ce qui s’est passé depuis ton départ d’Artesia, j’en deviens folle.
— Je te demande pardon, répéta Ben après s’être raclé la gorge. Jamais je n’aurais imaginé que tu viendrais me chercher jusqu’ici. Tu n’aurais pas dû, ma fille. Et puis tu as appelé ce chasseur de primes à la rescousse ? Il va te coûter combien ? Quelle affaire ! Tu as perdu la tête, il faut croire.
— Il ne s’agit pas de mon père, dit Will, mais de toi et de maman. En partant comme un fou, tu l’as désespérée. Elle ne pensait qu’à toi, Ben, c’était affreux pour elle, affreux. Et pour moi aussi.
Ben avait les larmes aux yeux, à présent.
— Je vois bien que si vous êtes tous là, et même Grey, c’est ma faute, bien sûr. J’ai honte. Quand j’ai compris ce quise passait, j’ai tout fait pour remettre les choses en place, et faire payer la sorcière.
On aurait pu croire qu’il divaguait. Où voulait-il en venir ?
— Que se passe-t-il ? demanda Caroline. Qu’as-tu appris de nouveau ? Et qu’est-ce que tu fais, dans ce trou ? Nous sommes dans la mine d’or ? Tu l’as trouvée ?
— Non. On n’a pas cherché la mine, Jim et moi.
— Jim ? Qui est ce Jim ?
— C’est moi, fit une voix juvénile, mais ferme et assurée.
Un garçon qui n’était sans doute pas beaucoup plus âgé que Will s’avança pour sortir de l’obscurité qui le dissimulait.
— Je m’appelle Jim White, déclara-t-il, et je suis l’associé de Ben Whitaker.
— Associés pour quoi faire ? demanda Will.
— C’est sans importance ! s’empressa de déclarer Ben, avec une étonnante désinvolture. Caroline, raconte-moi comment les choses se sont passées, depuis mon départ.
Pour la première fois depuis le moment des retrouvailles, Logan prit la parole.
— Je ne peux espérer toucher une prime pour votre capture, Whitaker, puisque les autorités ne vous recherchent plus. Mais avant de satisfaire votre curiosité, je vous conseille de répondre d’abord aux questions que Caroline et Will vous posent. Ils vous aiment beaucoup, j’en sais quelque chose. Alors videz votre sac en commençant par le commencement, vous nous devez bien cela.
Ben lui aurait bien répondu vertement, mais l’attitude de Will et de sa mère l’en dissuada. Il raconta d’abord ce qui se savait déjà, la lettre par laquelle Fanny Plunkett suggérait que Suzanne avait peut-être été la victime d’un voleur qui aurait dérobé le plan d’accès à la mine d’or ou au trésor dont Shotgun Reese détenait le secret.
— Ce voleur, cette crapule, je pensais bien le trouver par ici, et je voulais tant venger ma Suzanne… Je voulais la venger, au risque d’y laisser ma peau. Pour être franc, j’espérais même en mourir, moi aussi.
— Oh Ben…, murmura Caroline, qui déjà ne lui en voulait plus.
— Je n’étais pas revenu par ici depuis plus de vingt-cinq ans, reprit-il. En me retrouvant sur la piste, dans le désert, j’avais l’impression de rajeunir. Le Canyon n’a guère changé. A la Cité du Diable, je n’ai pas eu de mal à retrouver Fanny Plunkett, qui m’a fait bon accueil. J’ai appris d’elle, dès mon arrivée, que son fils Ace avait déjà réglé son compte à l’assassin de Suzanne, qui était aussi celui de Shotgun Reese. Elle mentait, naturellement.
— Ace Plunkett ? Le jumeau de Deuce ?
— Tout à fait, répondit le jeune Jim.
— J’ai d’abord pris ce
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