Le retour de la mariée
qu’on me disait pour argent comptant, j’ai même remercié Ace d’avoir vengé la mort de Suzanne, poursuivit Ben. En fait de preuve, il y avait la fameuse carte. Ce qui m’a mis la puce à l’oreille, c’est la façon dont Fanny insistait pour que je la déchiffre le plus vite possible. Ce n’était pas vraiment une carte, mais une sorte de puzzle dont les pièces rappelaient des événements anciens.
— Des événements de quelle sorte ? demanda Will.
— Euh… Par exemple, dit le vieil homme en se grattant la barbe, il était écrit « à deux cents mètres au nord du poker de Wilbur ». Shotgun, Suzanne et moi étions les seuls à pouvoir nous rappeler l’endroit exact où nous avions joué aux cartes avec Wilbur Burlington, trois jours avant sa mort, à un demi-mile d’ici.
— Vous étiez donc le seul à pouvoir lire cette carte ? fit observer Logan.
— Le dernier, dit Ben. En fait, je l’ai déchiffrée assez vite, je vous raconterai cela tout à l’heure, mais j’ai gardé le secret pour moi, heureusement. J’aurais pu tomber dans le piège, mais Fanny avait vraiment l’air trop pressée. Je voulais prendre mon temps, vous comprenez. Je n’avais pas fait tout ce voyage pour de l’or, mais surtout pour faire mon deuil de ma Suzy, et pour comprendre ce qui s’était vraiment passé, pour qu’on me dise le nom de l’assassin, par exemple. Ilfallait qu’il soit bien renseigné, pour venir chercher la carte à Artesia. Quand j’ai compris leur jeu, j’ai fait la mauvaise tête.
— C’est pour cela qu’elle a envoyé Deuce enlever Will à Artesia, dit Logan. Elle comptait bien vous faire chanter.
— Elle est capable de n’importe quoi, reconnut piteusement Ben. J’étais si content de vous retrouver tout à l’heure. Caroline et Will, mais quand je pense à ce que vous avez dû endurer…
Will laissa à sa mère le soin de faire un compte rendu des événements à Ben. Quand elle en vint à l’enlèvement, Ben tint à féliciter Will.
— Tu as échappé à Deuce, fiston, ce n’est pas rien. A ton âge, surtout !
— Deuce est mort, dit Will. L’assassin, c’était lui. Papa l’a abattu.
Ben pencha la tête, le menton sur la poitrine. Caroline s’approcha, prête à le soutenir, en voyant qu’il titubait.
— Ben ? s’inquiéta-t-elle.
— C’est donc Deuce qui a tué ma Suzy, murmura-t-il. Je suis en dette avec vous, Grey.
— Pas de dette entre nous, dit Logan. Il avait enlevé mon fils.
L’air morose, Ben acquiesça. Il ruminait sa douleur. Pour éviter qu’il ne sombre dans la mélancolie, Caroline lui demanda comment il avait réagi quand l’enlèvement de Will avait été décidé.
— Je l’ai su après le départ de Deuce, répondit-il en se frottant la nuque. J’ai failli la tuer, cette sorcière… Jamais de ma vie je n’avais frappé une femme, et j’y suis allé fort. Quand Ace est arrivé, je m’attendais qu’il vide son chargeur sur moi. C’est un faible dans le fond, il a peur du noir, sa mère le terrorise, mais il l’adore. Mais elle n’a pas voulu qu’il me tue. Elle préfère l’or à la vengeance, cette garce.
— Tant mieux pour toi, fit observer Caroline.
Ben se contenta de hausser les épaules.
— J’étais leur prisonnier, à la Cité du Diable, mais j’ai plusd’un tour dans mon sac, avec mon expérience… Toujours est-il que j’ai réussi à me réfugier ici et à me cacher, en attendant le retour de Deuce. J’espérais bien qu’il n’arriverait pas à enlever Will dans une ville civilisée, mais il faut croire que je m’étais trompé. Et puis j’avais avec moi Jim White, mon arme secrète.
Le visage jusqu’alors impassible du jeune homme se fendit d’un large sourire, qui s’effaça aussitôt. Ben reprit ses explications.
— J’avais dit à Fanny, au début, que ma mauvaise vue m’empêchait de bien lire le plan. Comme elle ne voulait surtout pas mettre dans le secret les gens de la Cité du Diable, elle m’a donné sans le savoir ma chance en allant chercher dans le seul ranch des environs un jeune cow-boy débrouillard…
Il désigna du pouce Jim White, qui refit le même sourire.
— … qui traquait les serpents dans toutes les cavernes des environs.
— Pour vendre leurs peaux, précisa son « associé ». Mais je vais les laisser tranquilles, maintenant. Moi aussi, j’ai eu de la chance, ce jour-là, puisque je suis devenu riche !
— Vous avez trouvé la
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