Le retour de la mariée
poster devant la porte de derrière et se mit à contempler le paysage déjà enveloppé par l’obscurité du crépuscule. Il réfléchit, longuement. Comme il semblait hésiter, Caroline se trouva dans la nécessité de renchérir.
— Je n’ai pas l’intention de me morfondre ici, Logan. Je te suivrai comme ton ombre, de toute façon.
Il tourna la tête pour la regarder dans les yeux.
— Tu serais bien capable de me suivre, quoi que j’en pense.
— Tu peux compter là-dessus.
— Est-ce que tu as la moindre idée de ce dans quoi tu veux t’engager ? Les seules femmes qu’on rencontre dans ce trou perdu sont des garces de bas étage. Les hommes sont des brutes sans foi ni loi, des violeurs, des tueurs.
— Pour mon fils, je suis prête à prendre tous les risques, à faire tous les sacrifices, à donner ma vie. Tu me prends pour une mauvaise mère, Logan Grey, mais Will sait bien que je suis une mère aimante, dévouée, attentive. Tu peux me croire quand je te dis que je ne resterai pas dans ma cuisine à vous attendre. Je sais qu’il faudra que je fasse attention. Je sais aussi que, tout comme je te suivrai pour te protéger, tu me rendras la pareille.
— Jésus Marie Joseph, bougonna-t-il après un court silence, qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre ? C’est à devenir fou.
— Pendant le hold-up à la banque, tu n’as pas regretté mon aide, il me semble. J’ai gardé mon sang-froid, je me suis rendue utile quand tu en as eu besoin. Notre fils a besoin de nous, Logan. De nous deux.
Excédé mais incapable de répliquer, il jura entre ses dents.
— Alors raconte-moi tout ce que tu sais de Ben Whitaker et des Plunkett, lança-t-il.
— Alors tu es d’accord ? Tu ne vas pas me faire la guerre pour m’empêcher d’y aller avec toi ?
— Pas si vite. Je compte bien y mettre des conditions, et fixer quelques règles que tu me promettras de respecter.
— Des règles ? Quelles règles ?
— Je ne sais pas encore. Il faut que j’y réfléchisse. Parle-moi de Ben. Si nous devons vraiment nous faire admettre à deux dans le canyon du Fantôme noir, il faut que je réfléchisse à une stratégie.
***
Deux jours plus tard, dans la chambre d’hôtel qu’ils avaient réservée à Van Horn pour jouir d’une bonne nuit de sommeil avant leur grande expédition, Logan tenait tête à sa femme en lui jetant des regards mauvais.
— Pour la dernière fois, je refuse de me couper les cheveux ! s’écria-t-il, les bras croisés sur son torse, l’air têtu.
Dès le début du projet, cette clause avait fait l’objet de discussions passionnées, sans cesse reprises, jamais abouties. Logan s’étonnait que, tranquillement assise, l’aiguille à la main, Caroline soit capable de lui proposer les pires extravagances, avec une inébranlable conviction.
— Il faut que tu en sois vraiment fier, de tes cheveux. Quelle coquetterie surprenante pour un homme !
— Je n’en suis pas fier ! s’exclama-t-il avec d’autant plus de force qu’il mentait sciemment. Mais je trouve que ce n’est pas en m’en privant que je changerai d’allure.
— Tu crois qu’une chemise et un chapeau blancs vont te rendre méconnaissable ?
— J’ai toujours porté du noir.
Il crut la voir sourire. Osait-elle se moquer ?
— Changer de costume, ce n’est pas mal, admit-elle calmement, bien que passer du noir au blanc… Vu l’importance denotre mission, un déguisement plus radical s’impose. J’y ai pensé, heureusement. Regarde ce que je t’ai rapporté d’Artesia.
Elle désigna du menton un grand sac fourre-tout. Logan poussa un gémissement d’horreur en l’ouvrant.
— Un pantalon rose ! Tu veux que je mette un pantalon rose !
— Il n’est pas rose, il est jaune potiron, avec la veste assortie, dit-elle en se levant pour venir l’aider. Le Club d’art dramatique d’Artesia me l’a prêté. Il est à peu près à ta taille, l’effet n’en sera que plus convaincant.
La veste « assortie » était pourpre. Quand elle sortit du sac une écharpe vert lavande, Logan recula de trois pas.
— Habille-moi en femme, pendant que tu y es !
— Tu te ferais trop remarquer. Ce n’est pas le but de l’opération. Il faut simplement que celui que tu vas devenir ressemble le moins possible à celui que tu es. Et regarde le joli chapeau !
Du fond du sac elle sortit un chapeau melon.
— Là, tu vas trop loin ! protesta-t-il en grimaçant.
— Dans le
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