Le retour de la mariée
pas encore ?
Elle jeta un coup d’œil au gibier qui rôtissait au-dessus des braises.
— Il sent bon, ce lapin.
— Sans vouloir me flatter, dit Logan en se rengorgeant, je suis expert en cuisine. J’ai attrapé ces deux lapins, et à force de recherches j’ai trouvé des carottes, des oignons et des pommes de terre. Lapin rôti pour tout à l’heure, et ragoût de lapin pour demain. Voilà le travail !
— Je m’étonne toujours de ce qu’un chasseur est capable de récolter en fait de légumes, dit-elle en riant. Tu n’aurais pas limité tes recherches aux sacs de provisions, par hasard ?
— Les lapins, je les ai vraiment attrapés, ne dis pas le contraire. Dans cette région, c’est un exploit !
— Alors il ne me reste qu’à te présenter mes excuses et à te remercier, Logan Grey.
— C’est à moi de te remercier, Caroline.
Au lieu de lui dire pourquoi, il se contenta de la regarder pensivement, puis détourna les yeux.
— Il faut absolument que je te dise…, reprit-il. Eh bien, en fait…
Il resta silencieux. Sur ses gardes, Caroline appréhendait ses paroles. Chaque fois qu’il lui demandait de l’écouter, le pacte conclu entre eux au départ d’Artesia se trouvait menacé. Ce fragile équilibre, elle entendait pourtant bien le maintenir. Les discussions la fatiguaient, à la fin.
— On pourrait remettre les choses sérieuses à plus tard, tu ne crois pas ? plaida-t-elle. Nous sommes si bien. J’aimerais…
— Je tiens à ce que tu saches que parmi les choses que je t’ai dites, il y en a que je regrette. D’abord, je sais profondément que tu es une bonne mère. Une mère comme il en existe peu. Une mère assez aimante pour faire des folies quand il s’agit de son fils. Je n’aurais pas rêvé mieux pour mon enfant.
Caroline laissa échapper un soupir. Un tel discours menaçait de la bouleverser, une fois de plus.
— Tu m’as dit…
— Je sais ce que j’ai dit, et j’ai eu tort de le dire. C’est ce que j’essaie de te faire comprendre, Caroline. Je me suis montré brutal avec toi. La colère m’a aveuglé, je n’ai pas su me retenir.
Il lui sourit. Son regard semblait la supplier de lui pardonner. Il tenait vraiment à la convaincre en toute sincérité, cela se lisait dans ses yeux, s’entendait dans sa voix.
— Je t’ai menacée de t’enlever Will et de le garder un certain temps seul avec moi, rappela-t-il. Je le regrette. Cette menace, je la retire.
— Tu ne vas pas le garder avec toi ? s’étonna-t-elle.
— Quand bien même je le voudrais, je ne vois pas comment m’y prendre, dit-il avec humour. Ce garçon s’est débarrassé de Deuce Plunkett, qui à sa manière ne manquait ni d’expérience ni de ténacité. Je ne parviendrais pas à le retenir près de moi s’il n’en avait pas envie. Mais ce n’est pas pour cela que j’ai changé d’avis, Caroline. J’aurais eu tort, je le comprends àprésent que je vois clair en moi. J’aurais mieux fait de me taire, ce soir-là. C’est pourquoi je te demande pardon.
Caroline respira plus librement. Logan renonçait au pacte conclu à Artesia, mais c’était pour faire la paix.
— Cela ne veut pas dire que je m’en désintéresse, reprit-il. J’ai bien l’intention d’entrer dans son existence s’il veut bien de moi. Et si tu me le permets.
A ce mot, elle sentit son cœur battre très vite.
— A quoi penses-tu, précisément ?
Il haussa les épaules et détourna le regard, incertain de lui-même.
— Je ne sais pas. Quand nous en aurons fini avec toute cette affaire, il faudra en discuter. Pour autant que je sache, Will pourrait très bien refuser d’épouser mes vues. Je ne dis pas que je renoncerais à le convaincre, non, je ferai tout pour qu’il m’accepte, tel que je suis. Mais je te donne ma parole que je tiendrai le plus grand compte de ses vœux, et je n’agirai que pour son bien, à l’avenir.
— Sois tranquille, il t’acceptera, Logan. Ta carrière le passionne déjà. Dans le pire des cas, il voudra mieux te connaître, ne serait-ce que pour satisfaire sa curiosité.
— Je n’en suis pas tout à fait certain. Il a quatorze ans. Il n’est plus un enfant, mais il n’est pas encore un homme. L’aventure qu’il est en train de vivre risque de le faire mûrir prématurément. Il peut très bien m’inviter à disparaître de son existence, en estimant être devenu assez grand pour prendre soin de toi sans l’aide de personne.
Weitere Kostenlose Bücher