Le retour
arrêter de saigner presque tout de suite. Fais ça. Tu
me rappelleras dans une heure pour me dire si ça a marché.
Sur ce, Laurette
s'empressa de raccrocher. Au même moment, Gilles et Carole rentrèrent de l'école,
pratiquement transformés en bonshommes de neige.
- Secouez-vous
dans l'entrée pour pas mettre de la neige partout sur mon plancher, leur
ordonna-t-elle. Ma foi du bon Dieu! s'exclama-t-elle en les apercevant debout
près de la porte d'entrée, on jurerait que vous vous êtes roulés dans la neige.
- Ça tombe sans
bon sens, affirma Carole, les joues rougies par le froid.
- On voit ni ciel
ni terre tellement ça tombe fort, ajouta son frère en retirant ses bottes. Je
vais attendre que ça se calme avant de pelleter devant la porte.
Un peu avant six
heures, le téléphone sonna de nouveau et Laurette fit signe à Carole de
répondre.
- C'est encore ma
tante Marie-Ange, chuchota l'adolescente en plaquant sa main sur l'écouteur.
- Est-ce qu'elle
va finir par me lâcher un jour, elle!
s'exclama la mère
de famille, qui avait oublié avoir
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elle-même demandé
à sa belle-soeur de la rappeler. Elle arrête pas de me téléphoner.
Elle prit
l'écouteur en faisant signe à sa fille de s'occuper du boeuf haché qui cuisait
sur le poêle à huile.
- Oui,
Marie-Ange.
- C'est pour te
dire que le petit saigne plus, lui dit sa belle-soeur, apparemment très
soulagée.
- Il faut pas que
tu t'énerves à la moindre affaire, ne put s'empêcher de lui dire Laurette,
sinon tu vas crever avant d'être vieille.
- Je peux pas
m'en empêcher, reconnut Marie-Ange Brûlé. Là, je sais pas ce qui se passe, il
devrait être réveillé depuis dix minutes, c'est son heure de boire. Il dort.
Qu'est-ce que je
dois faire, d'après toi?
- Il dort? Ben,
laisse-le dormir tranquille, bonyeu!
Inquiète-toi pas.
Quand il va avoir faim, il va se mettre à crier assez fort pour que tu le
saches. Bon, là, je te laisse.
Mon souper est en
train de brûler sur le poêle.
Là-dessus, elle
raccrocha en poussant un soupir d'exaspération. Une appétissante odeur de boeuf
haché et d'oignons frits s'était répandue dans tout l'appartement.
Au moment où la
mère de famille allait demander à la ronde ce qui pouvait bien retarder Richard
et Denise, la porte d'entrée s'ouvrit pour leur livrer passage.
- Mettez pas de
la neige partout, leur cria-t-elle du fond de la cuisine.
Le frère et la
soeur retirèrent leurs manteaux et leurs bottes dans l'entrée avant de pénétrer
dans la cuisine.
- On avait de la
misère à voir où on marchait, dit Richard en s'assoyant près de Gilles. À deux,
on portait presque Denise.
- Comment ça, à
deux? demanda sa mère en se tournant vers lui.
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- Ben. Pierre est
venu nous reconduire jusqu'à la porte. J'ai pensé qu'il voulait pas qu'un coup
de vent emporte ma soeur ou que la charrue la ramasse sans le vouloir.
- Où est-ce qu'il
est, lui? demanda Laurette à sa fille qui s'apprêtait à entrer dans sa chambre
à coucher.
- Ben. Il est
retourné chez son oncle.
- Il me semble
que t'aurais pu l'inviter à entrer pour se réchauffer, lui reprocha sa mère.
Avec un temps pareil, on laisse même pas un chien dehors.
- C'est ce que
j'ai fait, m'man, mais il a pas voulu entrer parce que c'était l'heure du
souper. Il voulait pas déranger.
- La prochaine
fois, tu le forceras à entrer. On n'est pas des sauvages. On est capables de
lui servir une assiette.
- Je vais lui
dire ça la prochaine fois, promit la jeune fille.
Les Morin
soupèrent en écoutant la radio. De temps à autre, ils entendaient les
raclements de la pelle sur le balcon arrière, à l'étage.
- On dirait que
le père Beaulieu a peur de mourir enterré dans la neige, fît remarquer Richard,
moqueur.
- Ris pas trop,
toi, lui dit son frère. Nous autres aussi, on va être obligés de faire ça tout
à l'heure.
- Peut-être qu'un
peu de chocolat nous donnerait assez de force pour pelleter, fit remarquer
l'adolescent en jetant un regard entendu à sa mère.
Laurette avait
compris le message. La semaine précédente, son mari lui avait offert une boîte
de cinq livres de chocolats aux cerises Lowney's pour marquer leur vingt-
quatrième
anniversaire de mariage. Depuis, Richard ne cessait de taquiner sa mère sur son
chocolat qu'elle avait caché dans sa chambre à
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