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Le retour

Le retour

Titel: Le retour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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son travail à cette heure-là. Mais le temps
qu'elle prenne une décision, le trolleybus traversait la rue Sainte-Catherine
et elle en fut quitte pour descendre au terminus de la rue Harbour, sous une
espèce d'auvent en fibre de verre verte. Après une très courte attente, elle
put monter à bord du tramway de la rue Notre-Dame qui
    3° allait la
déposer au coin de Fullum deux minutes plus tard, comme tous les jours de la
semaine.
     
    Quand le véhicule
eut croisé la rue Dufresne, Laurette se leva péniblement et s'avança vers la
porte avant pour descendre au prochain arrêt. Dès que le tramway s'immobilisa,
elle descendit.
    Elle retrouva
immédiatement les odeurs entêtantes de la Dominion Rubber et de la Dominion
Oilcloth. En ce début d'avril, les vieux immeubles délabrés de la rue Notre-
    Dame avaient
encore leurs fenêtres doubles tellement sales qu'on pouvait se demander comment
les locataires parvenaient à voir à l'extérieur. La neige avait fondu. Les
papiers sales et les déchets qu'elle avait pudiquement recouverts durant
l'hiver avaient revu le jour et avaient été poussés par le vent au pied des
maisons et contre le moindre obstacle.
     
    Les branches des
érables du parc Bellerive, en face, commençaient à peine à s'orner de
bourgeons.
     
    Laurette se mit
en marche sur le trottoir inégal et parcourut quelques centaines de pieds sur
Fullum avant de tourner au coin de la petite rue Emmett, qui reliait les rues
Fullum et Archambault, au sud de la rue Sainte-Catherine.
     
    A faible distance
à l'ouest, on pouvait voir une section de la structure métallique du pont
Jacques-Cartier. En attendant d'être appelés par leur mère pour souper, des
enfants se poursuivaient sur la rue Archambault en criant à tue-
    tête. Quelques
adolescents, massés devant le restaurant-
    épicerie Paré,
fumaient en discutant des chances du Canadien de l'emporter contre les Red
Wings de Détroit, le lendemain soir.
     
    Laurette longea
les cinq habitations vétustés à un étage du côté sud de la rue tout en
examinant d'un oeil critique les maisons à deux étages qui leur faisaient face
de l'autre côté de l'artère étroite. Il n'existait rien pour accrocher l'oeil
dans ces murs lépreux en brique rouge, sauf l'unique
    31
    escalier
extérieur de la rue situé à deux pas de la porte de chez Paré. Le restaurant
occupait le coin de la rue et l'escalier conduisait à un long balcon desservant
quatre appartements à l'étage.
     
    Laurette Morin
s'arrêta devant l'une des deux portes vertes de l'avant-dernière maison située
du côté sud de la rue. La porte à la peinture écaillée était dotée d'une vitre
obstruée par un vieux rideau en dentelle défraîchie. Elle s'ouvrait à quelques
pouces du trottoir et donnait accès à l'appartement du rez-de-chaussée que la
famille Morin occupait depuis près de vingt-quatre ans. La mère de famille
poussa la porte et entra, heureuse de pouvoir enfin retirer ses chaussures.
     
    - Attention de
pas salir mon plancher! fit une voix en provenance de la cuisine située au fond
de l'appartement.
     
    - Ben oui, fît
Laurette. J'ai déjà ôté mes souliers.
     
    - Ah! C'est vous,
m'man. Je pensais que c'était Jean-
    Louis qui
arrivait, dit Carole en apparaissant dans l'encadrement de la porte de la
cuisine. Après l'école, j'ai épluché les patates et je viens de finir de laver
et de cirer le plancher de la cuisine et celui du corridor pour qu'on soit pas
obligées de faire ça demain.
     
    - T'es ben fine,
dit sa mère en suspendant son manteau bleu un peu étriqué à l'un des crochets
disposés près de la porte d'entrée.
     
    - Les patates
sont cuites. Là, je suis en train de faire de la sauce aux oeufs pour le
souper, ajouta l'adolescente.
     
    J'haïs ça, le
vendredi. Je sais jamais quoi préparer à souper parce que c'est maigre.
     
    - Il y avait encore
des bines dans le frigidaire.
     
    - Je les ai pas
vues, m'man.
     
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    - Bon. C'est
correct. On les mangera demain midi.
     
    As-tu vu Gilles?
     
    - Il est passé
manger un sandwich tout à l'heure. Il est parti travailler.
     
    Après les heures
de classe, Gilles était employé à la livraison de meubles par le magasin Living
Room Furniture de la rue Sainte-Catherine.
     
    - Et Richard,
lui?
     
    - Je l'ai pas vu.
Vous le connaissez, m'man. Il doit encore traîner avec sa bande de chums à la
salle de pool.
     
    - Attends qu'il
rentre, lui. Il va m'entendre. Il va s'apercevoir qu'ici dedans, c'est

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