Le retour
souffle.
- Tu relèves de
consomption, Gérard, plaida-t-elle.
C'est pas une
petite grippe, ça. C'est sûr que t'as besoin d'un peu plus de temps pour te
raplomber. Bon. C'est
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ben beau tout ça,
mais le souper est prêt. Lève-toi et viens manger.
Laurette quitta
la chambre et retrouva Carole, Gilles et Denise dans la cuisine. Jean-Louis ne
fit son apparition qu'au moment où sa mère et sa plus jeune soeur
s'installaient à table après avoir servi le repas. On mangea en silence en
écoutant les informations radiophoniques lues par Jean-Paul Nolet.
Au moment du
dessert, la mère de famille alla éteindre la radio et annonça la mauvaise
nouvelle aux siens. La figure de Jean-Louis se rembrunit en écoutant sa mère,
mais il n'ouvrit pas la bouche. Pour leur part, Denise, Carole et Gilles
promirent leur soutien à leur père durant la durée de sa convalescence.
Après avoir lavé
la vaisselle en compagnie de ses deux filles, Laurette alla rejoindre son mari
sur le balcon. A peine venait-elle de s'asseoir qu'elle entendit une bordée de
blasphèmes en provenance de l'un des vieux immeubles situés de l'autre côté de
la grande cour.
- C'est encore la
Brazeau qui s'énerve, commenta Laurette en apercevant la grande et grosse femme
gesticulant, debout sur son balcon du deuxième étage.
- Mon petit
Christ! hurlait la jeune femme à gorge déployée, tu viendras pas me casser une
vitre chez nous, toi! Ta balle, tu peux l'oublier!
- Maudite folle!
lui cria un adolescent que Laurette ne parvenait pas à voir, dissimulé qu'il
était par le coin d'un hangar.
- Je vais t'en
faire des "maudite folle", moi, si je descends en bas, mon petit
calvaire d'effronté! jura de nouveau la femme qui avait déjà un pied posé sur
la première marche de l'escalier étroit qui conduisait à la cour. Si je te mets
la main dessus, mon enfant de chienne, je vais t'apprendre à vivre.
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Laurette se leva
sur le bout des pieds sur son balcon pour essayer de voir le jeune. Elle était
certaine que ce n'était pas l'un des nombreux enfants Dionne qui vivaient au
rez-de-chaussée de la maison voisine. Peut-être était-ce l'un des jeunes
Rompre.
Une vieille dame
poussa la porte-moustiquaire dans le dos de la furie.
- Rentre donc,
Pierrette, fît Amanda Brazeau, sur un ton conciliant.
- Mêlez-vous pas
de ça, la belle-mère! lui ordonna sèchement sa bru. C'est pas de vos Christ
d'affaires!
Son mari, un
petit homme tiré à quatre épingles dont le visage étroit était paré d'une fine
moustache, apparut à son tour sur le balcon.
- Aie, la
voleuse! donne-moi ma balle, cria l'adolescent, toujours dissimulé aux yeux des
Morin.
- Qu'est-ce que
t'attends, maudit lâche, pour me faire respecter? cria la grande femme à son
mari qu'elle dépassait d'une demi-tête.
- Rentre donc
dans la maison, lui conseilla son mari d'une voix raisonnable. Cette balle-là a
rien cassé. Donne-
lui sa balle et
arrête de crier comme une perdue.
Ce disant,
l'homme saisit la balle tenue par sa femme et la lança dans la grande cour
avant même qu'elle ne songe à défendre l'objet du litige. Là-dessus, il tourna
les talons et rentra à l'intérieur, suivi de près par une Pierrette Brazeau
furieuse. La double porte fut claquée et on n'entendit plus rien.
- C'est de valeur,
on n'aura pas de show, dit Laurette, déçue qu'il n'y ait pas eu d'empoignade.
Au moment où
Gérard allait répondre, Carole apparut derrière la porte-moustiquaire.
- M'man, je pense
que mon oncle Bernard et ma tante s'en viennent nous voir. Ils sont sur la rue
Archambault, annonça l'adolescente d'une voix excitée.
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Carole était
assise sur le pas de la porte des Bélanger avec Mireille, son amie inséparable,
lorsqu'elle avait vu le frère de sa mère et sa femme venir dans sa direction.
- Tu peux
retourner jaser avec Mireille, lui dit sa mère. Je vais leur ouvrir quand ils
vont arriver.
L'adolescente
disparut. Le couple entendit la porte d'entrée claquer un instant plus tard.
- Ah ben, bâtard,
on aura tout vu! s'exclama Laurette.
À cette heure,
ils viennent nous voir! On leur a pas vu la face pendant trois ans, puis tout à
coup, ils arrivent.
Attends qu'ils
mettent les pieds ici dedans, ajouta-t-elle d'une voix menaçante, ils vont
apprendre comment je m'appelle.
- Calme-toi donc
les nerfs, fît Gérard. Tu sais ben qu'on les
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