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Le rêve de Marigny

Le rêve de Marigny

Titel: Le rêve de Marigny Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Monique Demagny
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Filleul qu’il n’avait jamais appréciée représentaient une pénitence qu’il n’avait aucun désir de s’imposer. Mais pouvait-il visiter des musées sans ses « yeux » ? Il entraîna Cochin et l’équipée, entreprise à contrecœur, commença à ressembler à du bonheur. Le 20 juillet Marigny, son épouse et Cochin quittaient Paris.

    Une nuit à Spa suffirait, juste le temps de reposer les chevaux. Le plus tôt qu’il semblait décent de partir dans la matinée du lendemain Marigny salua madame Filleul, en lui faisant remarquer toutefois qu’il lui laissait Julie mais qu’il reviendrait bientôt la chercher. N’était-il pas un bon mari ? Marmontel ne commenta pas l’événement, il regarda, la situation lui inspirerait peut-être un prochain roman, lui-même ne songeait pas encore à convoler. Dans l’immédiat Marigny s’empressa d’oublier l’état matrimonial, Cochin était là, des centaines de tableaux les attendaient, fouette cocher !
    Alors on traîna, on lambina sur les routes des Pays-Bas, et le mariage semblait bien meilleur à Marigny en prenant de la distance. Le retour ne se ferait qu’au dernier moment et Marigny ne poserait pas à Spa. Cochin ne ferait pas le détour il regagnerait directement Paris. Le Directeur des Bâtiments ne voulait prendre que le temps d’emmener Julie dont la mère était sans doute guérie, et vite à Paris, les Bâtiments n’attendaient pas.

    À Spa la marquise de Marigny ne semblait pas non plus s’être ennuyée. Elle s’était occupée, disait-elle. Les amusements des eaux le matin, des promenades l’après-midi, le soir la danse à l’assemblée du Ridotto. La danse ? L’époux haussa un sourcil. Vite on parla du jeu, pour détourner son attention. On jouait beaucoup et parfois gros, au Ridotto, mais nos femmes ne s’y étaient jamais risquées ! Qu’on applaudisse leur vertu. Elles n’étaient venues à Spa que pour accompagner une malade. Hélas, madame Filleul n’était pas guérie, loin de là. Elle aurait tant aimé garder Julie jusqu’à la fin de la saison des eaux… La demande fut faite devant Marmontel et la dame Seran, Marigny fut pris au dépourvu. Mais pourquoi pas ? La saison tirait à sa fin, il acquiesça. Peut-être comptait-on qu’un mari tant pressé allait aussitôt monter dans sa voiture ? Il serait dit pourtant que ce mari-là était imprévisible. Marigny, c’était rare, était d’humeur à flâner. Il souhaitait passer tranquillement la soirée à Spa, connaître le Ridotto dont les dames parlaient avec tant d’enthousiasme. La société de Spa était internationale et ce n’était pas lemoindre charme de la station. Tant qu’à être en ce séjour Marigny voulait se faire une opinion. À peine la voiture qui emmenait Marigny et sa petite compagnie vers le fameux Ridotto s’ébranlait-elle que deux jeunes Polonais firent cortège aux dames se tenant à cheval à hauteur des portières. Cette fois Marigny se rembrunit sérieusement et plus encore quand l’arrivée de son épouse et de madame de Seran créa une effervescence tangible à leur entrée au Ridotto. Elles étaient connues et admirées. Il semblait bien que les gardes-malades aient eu plutôt joyeuse vie. Au souper l’atmosphère fut lourde. Les échanges pour rares qu’ils fussent étaient teintés de mauvaise humeur et de lourds sous-entendus. Marigny lança quelques allusions amères avant d’éclater à la première perche malencontreusement tendue par sa jeune épouse qui n’était pas encore assez rouée.
    — Vous êtes bien sombre, monsieur, remarqua la jeune marquise.
    — C’est que je vois bien, madame, que ma présence est importune.
    — Je ne comprends pas ce qui vous fait supposer une telle inconvenance.
    — L’inconvenance, madame, est que je ne suis point aimé après avoir tant fait pour mériter de l’être.
    — Tout ce que vous avez fait, monsieur, a été apprécié.
    — Vraiment ? Je suis haï, voilà la vérité !
    — Quelle sottise !
    — Osez-vous prétendre que vous êtes venue à Spa dans un autre but que de vous amuser ?
    — Quelle injustice !
    — Et que vous n’aviez pas prévu de prolonger votre séjour ? Je ne suis pas dupe de vos belles manières !
    — Allons, monsieur, je suis prête à partir avec vous sur-le-champ.
    — Je ne veux pas vous imposer un sacrifice !
    — Oui, c’est un sacrifice que d’abandonner ma mère malade, mais je suis prête à faire ce

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