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Le roi d'août

Le roi d'août

Titel: Le roi d'août Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Pagel
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résultat évoquait une jupe de légionnaire romain.
    — Et voilà ! reprit-il d'un ton satisfait. Suis-je moins effrayant, à présent ?
    — C'est… c'est mon frère qui vous envoie ? interrogea la reine sitôt qu'elle eût retrouvé sa voix.
    — Non. Personne ne m'envoie, mais ma présence ici est cependant la conséquence d'un appel que m'a lancé ton père.
    Elle ouvrit de grands yeux.
    — Vous faites erreur, messire, assura-t-elle. Comme vous devez le savoir si vous êtes danois, mon père était le roi Waldemar, et il n'est hélas plus de ce monde.
    L'inconnu secoua la tête.
    — Je ne suis pas danois et Waldemar n'était pas ton père, déclara-t-il en reprenant le bougeoir qu'il avait déposé sur la cheminée.
    Il le porta jusqu'à la table de chevet puis attira à lui un escabeau et s'assit près du lit, à quelques pieds de la jeune femme qui demeurait bouche bée, se demandant encore si elle avait bien entendu.
    — Que dites-vous ? balbutia-t-elle avant d'ajouter, soudain impérieuse : Qui êtes-vous ?
    Il leva une main apaisante. Son sourire ne l'avait pas quitté. Son regard, cependant, n'était en rien moqueur, son attitude en rien menaçante.
    — J'ai bien des choses à t'apprendre, Ingeborg…
    — Je m'appelle Isambour ! coupa-t-elle sans réfléchir, comme elle en avait pris l'habitude chaque fois qu'on usait de son nom danois. Je suis reine de France !
    — Et fière de l'être à ce que je vois, reprit l'homme sans se démonter. Mais cela ne n'impressionne pas : je suis roi moi aussi, vois-tu… (Cette affirmation la laissant muette, il reprit là où il avait été interrompu :) J'ai bien des choses à t'apprendre, Isambour, mais tu ne les croirais pas, et il me faudrait te les dire deux fois : une pour que tu me ries au nez, une pour que tu m'écoutes. En conséquence, nous allons gagner du temps : je vais dès à présent te donner une preuve ; ensuite, puisque tu seras convaincue, je t'expliquerai ce qu'elle prouve et nous parlerons.
    Sa voix basse, posée, avait un effet envoûtant. Il ne devait pas être aisé de dire non à cet homme. Quoiqu'il fût à moitié nu, il émanait de lui une indéniable majesté.
    D'un geste souple, il se leva et alla chercher le petit miroir ovale en argent, encadré d'or, qui reposait sur une coiffeuse. Lorsqu'il le lui tendit, Isambour le prit machinalement.
    — Donne-moi la main, ordonna-t-il en se rasseyant, et regarde-moi dans les yeux.
    Une nouvelle fois, elle lui obéit sans discuter. Elle savait n'avoir rien à craindre de lui, simplement à la manière dont il se tenait, dont il parlait. Toute sa raison criait à la jeune femme qu'un géant nu s'introduisant dans sa chambre au beau milieu de la nuit n'était pas digne de confiance, mais tout son instinct lui hurlait encore plus fort de s'en remettre à lui. Elle se pensait intelligente, lettrée ; ce fut pourtant son instinct qu'elle suivit.
    Même lorsqu'elle plongea le regard au fond des yeux noirs luisants et se rendit compte qu'elle ne pouvait plus l'en détacher, elle n'eut pas d'appréhension.
    — Comprends bien que ce que je vais faire à présent n'a pour moi aucune signification cachée et ne doit pas en avoir davantage pour toi. Je suis le roi d'une seule reine. Ce n'est pas la loi – je parle de la nôtre, pas de la leur – mais c'est ainsi.
    Avant qu'elle pût se demander ce qu'il voulait dire, elle éprouva une sensation étrange, connue sans être familière. Un creux à l'estomac, une bouffée de chaleur au visage, une bizarre démangeaison au niveau du bassin… Lorsque cela s'amplifia, elle comprit : c'était ce qu'elle n'avait encore ressenti qu'une seule fois dans sa vie. C'était ce que lui avait fait découvrir Philippe pendant leur nuit de noces, avant que le rêve ne se changeât en cauchemar.
    — Messire, je… commença-t-elle.
    — N'aie pas honte, lui répondit son compagnon, toujours aussi apaisant. Ce n'est qu'un effet de mon pouvoir et je ne toucherai pas autre chose que ta main. Laisse-toi gagner par le désir, Isambour : c'est important.
    Une heure auparavant, elle se fût jurée incapable de laisser quiconque lui parler en ces termes. Elle fît cependant ce qu'il disait, et pas seulement parce qu'il la tenait sous une sorte de charme par le magnétisme de son regard. Confusément, sans pouvoir l'expliquer, elle sentait que cet homme était bien roi. Et plus étrange encore : qu'il était son roi.
    Elle se laissa aller,

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