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Le roi d'août

Le roi d'août

Titel: Le roi d'août Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Pagel
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qu'il ne s'y attendait. Sinon, ça ne servira à rien.
    Il acheva son geste. Lysamour, une nouvelle fois, sursauta. Ses yeux n'avaient rien d'inhabituel, tant le désir était loin de la posséder. Ils s'agrandirent en découvrant Philippe penché au-dessus d'elle, le visage de cauchemar que révélaient les chandelles. Elle ouvrit la bouche comme pour crier mais aucun son ne franchit ses lèvres. Sans l'avoir voulu, elle jeta un regard craintif aux cordes qui lui maintenaient les poignets, semblant regretter qu'elles fussent aussi solidement nouées.
    Philippe, d'un geste rapide, écarta les nattes qui dissimulaient la gorge. Les ouïes lui apparurent, palpitantes, semblables à celles des poissons. Il les jugea laides mais pas aussi monstrueuses qu'autrefois, pas au point que leur vue le fît défaillir. Ce n'étaient finalement que des organes un peu particuliers, dans lesquels il lui eût suffi d'insérer le doigt pour qu'ils se révèlent une faiblesse. Elles lui parurent si anodines qu'il n'hésita même pas avant de refermer la main autour du cou de Lysamour.
    La fille des rivières se crispa, persuadée qu'il allait l'étrangler, mais il ne voulait que prendre son pouls – qu'il trouva endiablé : ce n'était pas une comédie ; elle était bel et bien terrifiée. Au moment où il le comprenait, Philippe réalisa qu'il l'avait touchée et n'avait éprouvé aucun choc, aucune décharge électrique, aucune révulsion. Si l'un des deux souffrait au contact de l'autre, c'était elle.
    — Tu m'as fait beaucoup de mal, dit-il simplement, sans retirer sa main.
    Elle avala sa salive puis abaissa les paupières en guise d'acquiescement.
    — Je te présente mes excuses, articula-t-elle, la voix cassée, et je t'autorise à user de moi comme tu l'entends. Je ne puis faire plus.
    Cette totale soumission acheva le travail qu'avait entamé la terreur : Lysamour n'était pas un monstre. C'était une femme, et Philippe n'avait pas peur des femmes. Ou il n'en avait plus peur. Il n'avait pas envie de coucher avec celle-ci – bien qu'elle parût repentante, il la détestait encore et la détesterait toujours – mais il s'en sentait capable.
    Il se retourna vers son épouse qui attendait à trois pas de là, immobile, retenant son souffle.
    — Elle ne me fait plus rien, dit-il. (La reine poussa un imperceptible soupir de soulagement.) Vraiment plus rien… Je ne sais pas si…
    Elle se porta vivement à sa hauteur et lui posa la main sur la bouche.
    — Laisse-moi faire, chuchota-t-elle.
    Avec des gestes pleins de douceur, elle entreprit de le dévêtir. Il se rappelait le froid qui l'avait torturé ici même et s'étonna de n'en pas sentir les attaques quand son bliaud puis sa robe lui furent retirés. Les mains qui frôlaient sa peau, la poitrine ferme qui effleurait la sienne, mais par-dessus tout le sourire et le regard aimant d'Isambour lui faisaient plus d'effet que le corps dénudé étendu sur le lit. Quand son épouse s'accroupit devant lui pour dénouer ses braies et les baisser, il avait déjà atteint une demi-érection qui lui communiqua un frisson de plaisir lorsqu'autour d'elle se referma une main fraîche, caressante.
    En quelques instants, des doigts et de la bouche, la reine acheva la tâche. Philippe se tourna vers Lysamour, qui se tordait le cou pour contempler la scène avec moins d'effroi qu'auparavant, semblait-il, mais sans plaisir. Il allait la trouver desséchée, peu désireuse de l'accueillir, le subissant tel un mal nécessaire. Ce ne serait pas un viol, non, mais ça n'en serait pas loin.
    Un tic plus violent que les autres agita ses lèvres. Il se pencha, saisit Isambour sous les aisselles, la contraignit à se relever et l'embrassa à pleine bouche. Comme elle lui jetait un coup d'œil éberlué, il lui dégrafa sa ceinture.
    — Philippe, tu…
    — Je n'ai pas envie d'elle, déclara-t-il. Décidément, non. Mais j'ai envie de toi, et j'en ai envie depuis tellement longtemps que je vais te prendre ici, tout de suite. Ensuite, nous rentrerons au château, et je te prendrai encore. Et encore !
    Il lui arracha plus qu'il ne lui enleva ses vêtements, avide de la toucher, d'emplir ses mains de cette chair blanche dont le parfum le grisait.
    — Mais Philippe ! protesta encore faiblement Isambour. Devant elle ?
    — Elle en a vu d'autres.
    Renversant son épouse sur un lit fort accueillant, quoique Lysamour en occupât le centre, il la caressa juste assez longtemps pour avoir la

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