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Le roi d'août

Le roi d'août

Titel: Le roi d'août Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Pagel
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s'abattaient autour de lui.
    Philippe, à pleins poumons, donna l'ordre aux archers de couvrir son bouillant cousin par un tir nourri en direction du chemin de ronde, tandis que lui-même rechargeait son arbalète. À peine le bélier eut-il suffisamment reculé pour éviter de recevoir un nouveau projectile incendiaire que ses servants en sautaient, eux aussi armés de pelles, et imitaient l'évêque. Des chevaliers, se pressant autour d'eux, leur firent un rempart de hauts boucliers – parmi ceux-là le propre frère du prélat, Robert de Dreux, le maréchal Aubri Clément, Thibaut de Blois et le jeune Henri de Champagne.
    En dépit de cette précaution et de l'averse de projectiles qui visaient les remparts, aussi bien depuis le sol que du sommet du beffroi, un des combattants du feu s'écroula, un carreau fiché entre les omoplates. Un autre, touché à la jambe, s'abattit sur le sol où il demeura à se tordre en hurlant. Quand les flammes s'éteignirent enfin, étouffées par la terre, une demi-douzaine de Francs gisaient autour du bélier, morts ou grièvement blessés – ce qui, dans l'atmosphère insalubre du siège, revenait souvent au même à plus ou moins court terme.
    L'engin, cependant, n'avait pas trop souffert : le mât était à peine noirci ; il serait aisé de reconstituer les portions détruites de la carapace qui l'entourait.
    — Sire, prenez garde ! hurla soudain Thibaut de Blois, la main tendue vers le ciel.
    Philippe leva la tête juste à temps pour voir s'abattre un des énormes quartiers de roche que tirait par-dessus la tête des défenseurs un trébuchet en batterie à l'intérieur de la ville. Sans prendre le temps de déplacer son mantelet, il se jeta de côté et roula sur lui-même maladroitement, entravé par son haubert.
    Un brusque courant d'air le fouetta. L'instant d'après, un choc violent dont il perçut les vibrations dans sa chair annonçait l'impact, assorti d'un épouvantable vacarme de bois brisé. Le bloc s'était abattu à l'endroit exact occupé par le roi quand Thibaut l'avait alerté, faisant voler en éclats son fragile mantelet, ce qui le laissait à la merci des archers ennemis. Déjà, pourtant, ses chevaliers se pressaient autour de lui pour le garder du péril.
    — Soyez remercié, mon oncle, dit-il, haletant, alors que les flèches pleuvaient sur eux. Sans vous, la France n'avait plus de souverain.
    À sa grande surprise, nulle réponse ne lui parvint : le comte de Blois n'était pas de ceux qui perdent une occasion de s'exprimer, fût-ce en des circonstances peu propices aux longs discours. La raison de son mutisme devint évidente lorsqu'il tomba à genoux puis s'effondra tout à fait, un carreau d'arbalète profondément enfoncé dans la gorge, juste au-dessus du haubert. La plupart des chevaliers, lorsqu'ils ne prévoyaient pas de se battre au corps à corps, ne protégeaient leur tête que d'un casque ouvert, voire d'un simple chapeau de fer, le heaume étant par trop inconfortable.
    Thibaut, à qui sa corpulence rendait particulièrement pénible le climat de Palestine, ne faisait pas exception à la règle.
    Comme Philippe s'agenouillait auprès de lui, sachant qu'il était déjà trop tard, il voulut parler, s'en révéla incapable, esquissa un sourire douloureux, puis vomit un peu de sang et rendit son âme à Dieu. Son royal neveu lui ferma les yeux avec une involontaire crispation des mâchoires : plus qu'un parent, il perdait là un de ses plus fidèles barons, qui venait de surcroît de lui sauver la vie. Après Étienne de Sancerre, abattu quelques jours plus tôt, au cours d'un autre assaut, c'était décidément un lourd tribut que payait à la cause la maison de Champagne. Et elle n'était pas la seule. Si les choses continuaient ainsi, tous les grands du royaume allaient laisser leurs os sur ce rivage maudit. Au bout du compte, cela bénéficierait peut-être à la France, en supprimant des sources d'opposition potentielles à son roi, mais pour l'heure, tout chevalier qui tombait était un chevalier de moins à combattre les Infidèles.
    Philippe n'eut pas le loisir de s'en désoler. Pierrières et balistes adverses redoublaient d'activité, d'efficacité. Touché à plusieurs reprises, le gigantesque beffroi exposait ses entrailles par de grandes plaies béantes. Les défenseurs venaient d'incendier un des chats abritant les soldats occupés à combler le fossé, lesquels s'en échappaient en désordre pour tomber un à un,

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